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Nous ne voulons pas enseigner la peur

Nous ne voulons pas enseigner la peur La solidarité comme boussole Des attentats ignobles Après la tuerie de Charlie Hebdo et le carnage du 13 novembre dernier, l’autoproclamé « Etat islamique » a revendiqué plusieurs attentats cet été sur le territoire français. Le 13 juin un commandant de police et sa compagne étaient assassiné-e-s chez eux. Le 14 juillet à Nice, 86 personnes ont été tuées et 434 blessées suite à une attaque au camion-bélier. Le 26 juillet, deux personnes dont un prêtre ont été assassinées dans une église de Saint-Etienne-Du-Rouvray. Nous exprimons notre plus grande solidarité humaine aux blessé-e-s et aux proches des victimes. Nous condamnons de toutes nos forces ces attaques, leurs instigateur/trices et celles et ceux qui revendiquent ces attentats. “DAECH”, “l’Etat islamiste”, est une organisation djihadiste salafiste fanatique. Son projet politique, au nom d’un fondamentalisme islamiste, vise à instaurer dans l’ensemble du monde dit “arabo-musulman” un état totalitaire qui s’apparente au fascisme. Tout, dans ce projet et dans cette organisation, est en opposition complète aux valeurs qui animent notre action syndicale : la raison, la solidarité, la justice, la démocratie. Nous partageons pleinement l’émotion que ces événements dramatiques peuvent susciter. Mais ce sont ces valeurs qui doivent continuer à guider notre action dans ces circonstances si difficiles. Refusons les réponses anti démocratiques L’empathie que nous avons pour les victimes, où qu’elles soient, et notre opposition résolue au développement des idéologies mortifères ne nous empêchent pas de mettre en cause les politiques mises en œuvre à l’intérieur et à l’extérieur des frontières de la France et de l’Europe. Au contraire, ce sont les mêmes valeurs qui nous amènent à refuser l’extrême-droitisation des discours, l’orientation de plus en plus liberticide des politiques menées sur le territoire national et les politiques impérialistes et néocoloniales menées à l’extérieur. Nous condamnons la prolongation de l’état d’urgence, votée cet été. Comme le dit le collectif « Nous ne céderons pas », elle s’inscrit dans la logique d’un « état d’urgence sans fin, aggravé par des dispositions qui accroissent encore les possibilités d’arbitraire ou qui valident des mesures sans rapport avec l’objet du texte. Ainsi, les perquisitions administratives vont reprendre et même les enfants deviennent des suspects potentiels puisqu’ils pourront être retenus pendant quatre heures au cours d’une perquisition ! » Une rentrée dans un climat délétère La rentrée scolaire s’est ainsi déroulée dans un climat politique délétère de surenchère sécuritaire et raciste qui assimile une partie de la population au terrorisme sous couvert de prétendus débats sur la laïcité. Le traitement actuel de ces questions par celles et ceux qui nous gouvernent ou aspirent à le faire participe au développement des comportements xénophobes et racistes dans la population, tout cela favorisé par certains traitements médiatiques indignes où dominent amalgames, approximations et sensationnalisme. Nous devons combattre tous les racismes, toute stigmatisation des personnes cataloguées « musulmanes » et la façon dont sont aujourd’hui traité-e-s les migrant-e-s, à qui on refuse les droits les plus élémentaires. C’est dans ce contexte que le ministère de l’éducation nationale a publié fin juillet des instructions relatives aux mesures de sécurité dans les écoles et les établissements scolaires à la rentrée scolaire 2016. Des mesures inutiles, anxiogènes et liberticides Il s’agirait de « développer une culture commune de la sécurité », en réclamant une vigilance renforcée et des mesures qui au vu du quotidien dans les établissements et les écoles semblent bien loin de la réalité. Certaines de ces mesures sont anxiogènes, liberticides, extrêmement coûteuses, et aggravent la charge de travail des personnels quand elles ne débordent pas totalement le cadre de leurs missions. Une opération de communication cynique Dans un contexte d’austérité, les moyens alloués par l’État eu égard aux objectifs annoncés sont dérisoires (50 millions d’euros pour la sécurisation des établissements et 3000 réservistes de l’armée mis-es à disposition). L’essentiel du coût des mesures décidées par le gouvernement est donc une nouvelle fois reporté sur les collectivités territoriales, auxquelles l’État par ailleurs réduit continuellement ses apports. Les sommes nécessaires sont parfois bien supérieures au budget pédagogique alloué aux écoles ! Le cynisme du gouvernement est sans limite, puisqu’il vient de décider de prendre 30 millions du fonds destiné aux personnes en situation de handicap dans les universités pour financer les mesures sécuritaires. La dotation d’État représente une somme moyenne par école ou par établissement de 780€ et 1h45min de présence d’un-e militaire par semaine. Ces mesures coûteuses et inutiles permettent avant tout d’engraisser le patronat des entreprises de la sécurité et des outils du contrôle des populations. Des mesures inapplicables Il s’agirait de former tou-te-s les élèves aux « gestes qui sauvent » et certain-e-s d’entre eux et elles aux premiers secours. Il s’agirait aussi d’éviter les attroupements devant les écoles, collèges ou lycées, une blague pour quiconque a déjà assisté à une sortie d’école ou à la pause cigarette devant un lycée. Il s’agirait également dans tous les établissements du secondaire de doubler le système d’alarme incendie afin d’avoir un sonnerie distincte pour les alarmes de confinement. Le coût de ce type de système étant à la charge des établissements et pouvant représenter un coût de 23 000 € pour un lycée de taille moyenne (à comparer avec la dotation de l’Etat…). II faudrait multiplier les exercices d’évacuation. Et les exercices de confinement qui avaient été expérimentés l’an dernier sont supposés être généralisés cette année, avec l’idée de se barricader dans des salles en utilisant le matériel éducatif. Le ministère a été amené à préciser qu’aucun des exercices ne supposait l’usage d’armes factices, ce qui illustre bien le climat de panique que ces mesures induisent. Déjà des chef-fe-s d’établissements et des inspecteurs/trices expliquent sans vouloir l’assumer publiquement que ces exercices ne devront pas nécessairement être organisés. Nous ne sommes pas des agent-e-s de sécurité Il s’agirait ensuite de contrôler les sacs et identités des parents d’élèves que l’on connaît et voit chaque jour à la sortie de l’école, le tout dans une ambiance totalement dégradée et au mépris des missions de chacun et de chacune. Les personnels de l’éducation n’ont pas vocation à devenir des agent-e-s de sécurité. Les fouilles visuelles des sacs ne relèvent pas des missions des agent-e-s de l’Education nationale. Elles ne peuvent être effectuées que par des personnels assermentés (agent-e-s de sécurité et de police). Qui peut croire que ce contrôle aura une quelconque efficacité de dissuasion ou d’empêchement si un jour des fanatiques déterminé-e-s et organisé-e-s décident de s’en prendre à une école ? Refusons l’embrigadement de l’école Au lieu de rassurer élèves et personnels, ces mesures vont les habituer à vivre dans la peur ; au-delà elles œuvrent à obtenir le consentement aux instruments de contrôle social et de restriction des libertés publiques. Elles s’inscrivent ainsi dans la même logique que l’état d’urgence permanent. L’embrigadement de l’école, des enseignant-e-s, de l’ensemble des personnels dans cette logique sécuritaire est contradictoire avec le projet d’école émancipateur que nous portons. Il va encore fragiliser l’école publique en rendant son rôle de plus en plus confus. Face à des logiques sécuritaires inutiles et qui ne sont pas les nôtres, nous affirmons que nous ne voulons pas enseigner la peur, que nous ne voulons pas devenir les vigiles anti-terroristes d’une école bunkérisée.

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