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A propos de la méthode non directive

A propos de la méthode non directive

I – Remarques cursives suite au texte de Laurebnt Ott (auquel j’adhère globalement)
La “non directivité“ constitue une tarte à la crème. La plupart de ceux qui en parlent (et notamment ceux qui la fustigent) seraient incapables de la définir, d’expliciter ses origines, de situer le contexte d’apparition de cette expression et de cette idée.
Snyders, avec son petit bouquin de 1973 (Où vont les pédagogies non-directives ? Paris, PUF) a réalisé un “coup médiatique“ et a fait beaucoup de mal non seulement à l’idée de non directivité mais à toute pédagogie qui pouvait être soupçonnée de ne pas être autoritaire. Tout cela pour avouer ensuite qu’il n’avait pas lu Rogers !
Ce qui caractérise l’expérience de Summerhill est pour moi une méthode de pédagogie institutionnelle (pas au sens Oury-Vasquez, mais au sens propre), puisque les règles de vie collective, les décisions concernant la collectivité sont débattues et décidées en assemblée. Même chose pour le collège de Cassis sous la direction de Vincent Ambite, avec son parlement.

II – Précisions et recadrage sur la méthode non directive
Les expériences de Lewin à propos des “styles” de conduite (autoritaire, laisser-faire, démocratique) ont permis de construire le tableau “attitudes-méthodes”.
Ce tableau a circulé — il s’agissait d’un sorte de tradition orale — dans certains mouvements pédagogiques, dont les CEMEA. La troisième attitude était nommée facilitation. Mais dans une relation de personne à personne, il semble plus pertinent de la nommer écoute (facilitation présupposant un rôle particulier vis-à-vis de l’autre). Les méthodes correspondant à cette attitude étaient qualifiées, initialement, de ‘directive’ et ‘non-directive’. Suite à la confusion systématique entre ‘directive’ et ‘autoritaire’ — confusion que chacun pourra fréquemment observer — un certain nombre de formateurs ont comme moi préféré parler de méthode ‘démocratique’, le terme convenant pour caractériser ce type de méthode.

attitudes méthodes moyens (exemples de…)

pression – autoritaire – force…

– manipulatoire – séduction…

laisser-faire – néant – néant

écoute – démocratique – l’animateur intervient sur le contenu

– non-directive – l’animateur n’intervient pas sur le contenu

Une personne vis-à-vis d’une autre peut être en attitude :
– de pression (elle veut que l’autre fasse, ou ne fasse pas… elle veut pour elle),
– de laisser-faire (peu lui importe ce que fait ou pense l’autre),
– d’écoute (elle essaye de voir, par rapport à l’autre, comment elle peut s’arranger avec la différence).
Pour plus de détails, voir Sallaberry, JC, 1998, Groupe, création et alternance, Paris, L’Harmattan.

L’idée centrale de ce tableau est le lien attitude-méthode — une méthode correspond à (dépend de) une attitude. Cela amène à parler de “méthode non directive“ et non de “non directivité“. Une fois le statut de méthode rappelé, il faut savoir que cette méthode peut être utilisée dans un groupe qui veut travailler sur son propre fonctionnement (un groupe d’animateurs en formation, par exemple), et qu’elle exige :
1 – que ce contexte soit explicité (moment de formation au repérage du fonctionnement du groupe).
2 – que le binôme de formateurs qui la met en œuvre soit solidement formé non seulement à l’animation des groupes mais aussi à cette méthode.
3 – que ce binôme soit dans une position d’écoute rogérienne — la méthode n’exige ni d’être mutique, ni d’induire de l’angoisse en ne répondant pas…

1 Comment

  1. Jean Agnès

    A propos de la méthode non directive
    Il y aurait sur de telles questions quelques prétextes à recherche approfondie. Et répétons-le, à actualisation.

    En attendant quelque initiative aujourd’hui utopique en ce sens, voici quelques points auxquels m’a fait penser ce message.

    Non directivité : ce qui nous rajeunit.

    Nous étions quelques-uns (tant que cela ?) dans les années 70 à nous réclamer d’un courant “non directif” soucieux non pas d’organisation renforcée mais de libération de l’activité. Nous avons pu aussi appeler cela “pédagogie du silence” (mais l’expression est utilisée dans des sens divers…). Le maître s’efface au profit du travail réel de l’élève. Ce n’est pas lui qui travaille, ni lui qui parle. Nos “brillants causeurs” en seraient bien inspirés!

    Comme pour d’autres pratiques simplement efficaces, donc bien mal vues de notre employeur, qui s’est toujours ingénié à les casser, nous pensions surtout à nous affranchir du traditionalisme pédagogique. Nous étions encore loin des principes d’une “pédagogie muable” (Agnès 2005 ) que nécessiterait aujourd’hui le changement de paradigme.

    Pour autant, comme tout ce qui dans les “pédagogies nouvelles” relève de la méthode sans qu’elle soit nécessairement orientée à un horizon d’engagement politique, nous restions à ce niveau – même très actifs par ailleurs dans l’action critique et la volonté “sociale”- dans le domaine de l’efficacité. On peut y trouver en effet la possibilité d’une promotion plus égalitaire. Mais d’autres philosophes de l’éducation ont bien souligné bien avant nous que si l’on en reste à telle notion liée au rendement, “l’éducation nouvelle”, elle-même d’ailleurs disparate, pouvait très bien servir des intérêts contraires – et les pires – à ceux de la visée émancipatrice.

    Il faut à ce propos souligner la tendance actuelle à convoquer l’héritage de l’éducation nouvelle dans la perspective d’un aggiornamento de l’école conforme à l’idéologie postlibérale. (Année de la recherche en sciences de l’éducation
    Sallaberry et al., 2013)

    Ce n’est pas nouveau, comme on l’a vu avec l’arraisonnement systématique de Freinet notamment, mais c’est un pas de plus dans l’avancée d’un monde syncrétique, sans alternative.

    P.S. Rogers : un important travail rogérien a été mené ces dernières années par Jean-Daniel Rohart (“réenchanter l’école”. Voir : Renouveler l’éducation, 2013 – ), avec le mérite de placer la question méthodique sur une ligne de sens.

    Il me paraît, toujours aujourd’hui, difficile de dissocier philosophie de l’éducation et “action pédagogique”.

    JA

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