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L’école de Macron intensifie la guerre aux pauvres et aux migrant·es Organisons le réarmement critique et syndical ! En grève dès le 1er février – En résistance toujours !

Pour cette rentrée de janvier, nous avons repris notre cartable avec la gueule de bois. On avait pourtant eu une semaine pour cuver le réveillon mais, même après trois semaines de reprise, on ne parvient toujours pas à digérer ce que feront la loi « immigration » à nos élèves et le « choc des savoirs » à notre école. La nomination d’une nouvelle ministre caricaturalement représentante de la bourgeoisie, totalement déconnectée des réalités sociales, des aspirations des classes populaires et des valeurs du service public, permet, en revanche, d’incarner sans fard la vraie nature du projet macroniste pour l’école : le contrôle social et la mise au pas réactionnaire de la jeunesse et des personnels. Il nous revient pourtant de donner du sens au présent dans un monde où l’avenir semble obstrué.

Loi immigration : discrimination et racisme « républicains »

La loi « immigration » attaque les droits fondamentaux de dizaines de milliers de nos élèves et de leurs familles par la suppression de minima sociaux et de l’accès à l’hébergement d’urgence en instaurant une authentique « préférence nationale » dans l’octroi de certaines prestations. D’après un rapport du collectif « nos services publics » ce sont 110 000 personnes dont 30 000 enfants qui seront privées de droits sociaux par l’application de cette loi. Ces mesures, contraires aux valeurs cardinales d’égalité et de fraternité que nous pensions « républicaines », préfigurent évidemment une dégradation des droits sociaux de tous et toutes. Leurs applications auront des effets délétères sur nos classes, car on ne connaît que trop bien les conséquences de la grande misère économique sur la santé, le travail et, finalement, le comportement des élèves les plus fragiles. Partout sur le territoire, nos collègues mettent à l’abri des familles sans toit en occupant les écoles. Cette loi provoquera bien sûr l’extension du nombre d’enfants à la rue parce qu’issus de familles étrangères, privées de droits aux hébergements d’urgence. Nous continuerons à occuper les écoles malgré les menaces indignes de nos inspecteur·rices.

Un pouvoir bourgeois en voie de fascisation

Tout de suite les grands mots… effectivement. On nous demandait déjà de mesurer la taille des jupes avec la directive « abaya », on nous « conseille » depuis Chatel, d’éviter de solliciter les mères de famille voilées pour accompagner les sorties… Contrôler et signaler, ce sont aussi les tâches qu’on veut nous imposer au travers des formations « laïcité » qui n’abordent cette notion qu’au travers des « atteintes à la laïcité » et jamais pour ce qu’elle doit permettre à l’origine : le plein exercice de la liberté de conscience. Nous continuons à penser que la loi de 2004 est un dévoiement de la loi de 1905 et que la laïcité perd son sens quand elle est instrumentalisée pour contrôler et exclure. À l’heure des obscurantismes religieux et nationalistes, alors que la droite instrumentalise l’antisémitisme et que l’armée « la plus morale du monde » éradique la Palestine et son peuple depuis trois mois, nous devons redoubler de discernement pour que l’école ne soit pas le détonateur de l’explosion identitaire.

Pour ce qui nous concerne, parce que nous sommes fonctionnaires et parce que les mots ont un poids historique, il nous appartient de déterminer la limite de notre collaboration.

« Un fonctionnaire qui ne fait que son travail, c’est quelqu’un de très dangereux » disait Hannah Arendt.

Un fonctionnaire a le devoir d’appliquer la loi de la république… jusqu’où ? Marine Le Pen et son parti ont présenté la « loi immigration » comme une « victoire idéologique » pour leur camp. Elle présentait déjà les réformes Blanquer comme des « victoires politiques ». Les néofascistes ont de bonnes chances d’accéder au pouvoir présidentiel dans trois ans, aussi, entre éthique et obéissance, nous devons choisir dès maintenant. Comme fonctionnaire, agent devant exécuter les politiques gouvernementales, la mise en œuvre du recul des libertés publiques passe nécessairement par notre mise au pas. La méthode est toujours la même : carotte et bâton, que l’on nomme prime et sanction quand on est un manager pudique. C’est ce qu’il faut comprendre quand le président dit vouloir faire du « mérite » le principal critère d’avancement dans la rémunération des fonctionnaires et quand, partout, la mise en place du « Pacte » divise les équipes entre les « méritants » et les autres, pour, comme prévu, amplifier les problèmes de gestion des remplacements et de la difficulté scolaire. Macron a affirmé que 95 % des absences de longues durées étaient désormais remplacées, c’est évidemment faux. Blanquer n’est plus là mais les mensonges chiffrés, eux, sont restés. La ministre a raison, les absences, dans le public, ne sont pas « sérieusement remplacées ». Nous rappelons tout de même que les profs sont moins absent·es que la moyenne des salarié·es et que ce n’est pas nous qui avons décidé de remplacer « sérieusement » des profs formé·es par des contractuel·les recruté·es en 30 minutes ou par des séances vidéos et leur intelligence très artificielle.

Le choc des savoirs : une innovation de l’école d’avant-hier ou fantasmée

Dans nos écoles, l’arrivée de l’uniforme à tous les âges ou de la Marseillaise à 8 ans ne sont que quelques arbres de la forêt des mesures réactionnaires repeintes en mesures sociales ou pédagogiques. Toutes ces orientations ont été empaquetées dans « le choc des savoirs », présenté comme issu des consultations éclaires (et fantoches) des enseignant·es de novembre mais qui étaient, sans aucun doute, dans les cartons depuis longtemps. En guise d’innovations, rien que du vieux comme d’habitude, voire du bien périmé :

— Évaluations nationales tous les ans du CP à la 3e pour achever le pilotage par les chiffres sans aucune intelligence pédagogique.

— Les évaluations serviront à créer des groupes de niveaux que le ministère nous promet « flexibles ». Aussi, au collège, les enseignements de maths et de français seront dédoublés. Il n’y a que les ministres qui ignorent que l’ensemble de la littérature scientifique a déjà démontré la nocivité des groupes de niveaux sur le plan éducatif et en matière de progrès des élèves. Par ailleurs, on sait d’expérience que les élèves en grandes difficultés scolaires sont aussi souvent ceux qui manifestent des problèmes de comportements : les génies du ministère qui préconisent de regrouper tous les élèves difficiles à gérer dans une même classe seront bien au chaud dans leurs bureaux pendant que nos collègues s’useront chaque jour davantage dans des conditions de travail impossibles. Évidemment, la quantité de postes octroyés pour concrétiser cette dernière lubie ministérielle ne couvrira que 20 % des besoins réels.

— Manuels scolaires avec label du ministère pour uniformiser les pratiques, ce qui n’a jamais existé même sous la IIIe République. Les managers qui prétendent nous « piloter » n’ont toujours pas compris qu’en éducation, la liberté pédagogique des enseignant·es est la condition de leur efficacité professionnelle. Nous revendiquons toujours le fait d’être les artisans de nos pratiques, dans leurs exécutions mais aussi dans leurs conceptions. Nous refusons toujours d’être de simples exécutant·es de procédures mécaniques issues des laboratoires de neurosciences.

— DNB obligatoire pour accéder au Lycée. Les élèves qui n’ont pas le brevet devront passer par des classes de « prépa lycée » pour lesquelles le ministre débloque… 150 postes au niveau national.

— Restauration du redoublement contre l’avis des familles… pour quel bénéfice pédagogique ?

— Refonte totale des programmes de la maternelle à la fin du collège d’ici 2026 en commençant par la maternelle avec la même vielle boussole : le recentrage sur les « fondamentaux » (Original n’est-ce pas ?).

En math, on nous annonce l’adoption officielle de la « méthode de Singapour » sans précision. On parle de la pédagogie ? Ou des conditions de travail ? Cette cité-état autoritaire championne du monde des résultats PISA en calcul et… en suicide des adolescent·es : gagne ou crève, tout un programme !

Toutes ces mesures regroupées dans le « choc des savoirs » doivent être menées sur fond de suppression de postes, de stagnation salariale et de maintien des mesures « PACTE » qui créent, comme prévu, des dissensions dans les équipes à mesure que les personnels les acceptent pour encaisser l’inflation.

Le ministère a donc prévu de supprimer 2 000 emplois de moins que les 2 200 annoncés dans sa loi de finance. Pour les nul·les en maths, ça veut dire qu’il n’en supprimera quasiment pas car il faut assumer les redoublements et les dédoublements de ses classes de niveaux. Le SNU et les uniformes devraient coûter cinq milliards à l’État. L’institution trouve donc du fric et des postes quand il s’agit d’engager des réformes réactionnaires et antipédagogiques mais n’a rien à proposer pour alléger les classes ou assurer les remplacements.

L’ensemble des mesures et des annonces concernant l’école ces dernières semaines constituent le vieux cocktail empoisonné d’accroissement du tri social, de symboles bien réacs et démagos nommés « réarmement civique » et de pénurie de moyens compensée par de la violence managériale. Malheureusement, dans son retour à l’école d’avant-hier, le ministère n’a pas prévu de soutenir le moral des personnels en rétablissant le quart de rouge à la cantine… dommage.

Inclusion sans moyen : mépris des élèves, essorage des personnels

Du côté de l’inclusion, le carnage continue, le mépris des personnels aussi. Les AESH sont toujours payé·es des cacahuètes et semble condamné·es au statut de précaire à vie. Pire, comme l’état ne trouve personne pour ce boulot harassant payé des miettes, il prévoit de créer un statut d’accompagnant à la réussite éducative (ARE). Derrière ce nouvel acronyme, une nouvelle régression. Le dispositif disruptif qui doit permettre à ces collègues d’atteindre le SMIC est le suivant : travailler plus pour gagner de quoi survivre en faisant tout et surtout n’importe quoi. Les métiers d’AESH et d’AED ont des spécificités et ne sont pas interchangeables. Pour faire des heures, les ARE seront donc employé·es 10 heures par jour pour atteindre un 35 h annualisé. Le conseil d’État a, pour l’instant, bloqué l’avènement des Pôles d’appui à la scolarité – PAS. C’est donc toujours la MDPH qui décide des notifications de moyens pour les élèves handicapé·es et non pas l’EN qui rationne au maximum les prises en charge pour économiser les personnels qu’elle n’a pas. Les AESH encore en poste malgré les conditions d’exercice indignes qui leur sont faites, voient leurs prises en charge se multiplier avec la « mutualisation ». On voit, dans nos classes, des élèves handicapé·es en souffrance, condamné·es à stagner dans un marasme éducatif total, puisque l’école, lieu éducatif, ne devient pas un lieu thérapeutique avec le saupoudrage indigent de moyens actuels, même si on l’habille des plus généreux discours. La suppression de dizaines de milliers de place en institutions spécialisées n’a pas du tout été compensée par un transfert des moyens dans le milieu classique pour les élèves porteurs de handicap. Bien sûr, nous ne pouvons que partager la revendication qui veut abolir l’enfermement des personnes handicapées dans des institutions spécialisées et donc séparées. Mais nous vivons aussi la violence que constitue l’accueil des élèves porteur·euses de handicap, notamment TSA, dans des espaces collectifs qui les agressent. La revendication des moyens est cruciale mais elle laisse ouverte la question d’un accueil inconditionnel de tous les enfants dans un milieu particulier, souvent hostile, qu’est le milieu scolaire.

Obéir ou réfléchir, subir ou agir : nos choix sont clairs et révolutionnaires !

Les travailleuses et travailleurs de l’éducation de la CNT n’ont pas la moindre intention d’assister sans réagir à la mutation de l’Éducation nationale en machine à broyer la jeunesse à coup de SNU, d’uniforme, de Marseillaise et de compétition scolaire.

Les travailleuses et travailleurs de l’éducation de la CNT ne comptent en aucun cas collaborer à la mise en œuvre de ce programme réactionnaire et démagogique à rebours des valeurs émancipatrices et égalitaires d’un service public d’éducation populaire.

Les travailleurs et travailleuses de l’éducation de la CNT seront en grève et souffleront sur les braises autant qu’il le faudra pour rallumer l’espoir et réduire en cendre l’école capitaliste et le monde qui l’a engendrée.

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