Éditorial
Pour résister aux manipulations et pressions de toutes sortes, nous avons besoin de mieux comprendre le monde physique et humain, et cette capacité passe aussi par les mathématiques qui nous aideraient à proposer d’autres modèles que ceux de nos gestionnaires, d’imaginer un autre futur. Pour cela, il nous faudrait sortir de l’aristocratisme traditionnel des mathématiques en France. On doit convaincre chacun qu’elles sont extraordinairement intéressantes non pour l’ascension sociale qu’elles promettent, mais pour elles-mêmes, pour ce qu’elles donnent à penser et à imaginer.
En pédagogie Freinet, nous militons pour une mathématique populaire et joyeuse.
Populaire parce que notre pratique est émancipatrice. Elle consiste à problématiser à partir des propositions des enfants, de leurs représentations, de leurs conceptions, à respecter le processus de chacun dans un groupe coopératif aidant et exigeant à la fois, à valoriser les réussites, si modestes soient-elles. Non, l’accès aux savoirs mathématiques ne repose pas intégralement sur un être supérieur infaillible ni sur la volonté divine, mais fait d’abord appel à notre faculté d’être pensant.
Joyeuse parce que notre pratique fait une part belle à la créativité, à l’imagination, à la liberté de penser, à l’intuition et à la coopération, promesse de jubilation collective. Elle favorise le plaisir de la découverte de vérités universelles, une sorte d’Eurêka pour ceux qui l’éprouvent.
Pour nous, praticiens Freinet, une pratique personnelle est incontournable et, comme avec les élèves, l’échange entre pairs est indispensable. Nous savons que, pour aller plus loin, il est nécessaire que chacun ose dire sa pratique. Serons-nous capables d’échanger coopérativement et sereinement sur ce que nous faisons en mathématiques ?
Serons-nous capables de proposer une alternative aux nouvelles directives ministérielles sur la base de pratiques émancipatrices, expérimentées et efficientes ?
Le comité de rédaction