Le 2 septembre 2021, le président Macron, en visite à Marseille, a annoncé un vaste plan d’expérimentation pour 50 écoles marseillaises à compter de la rentrée 2022. Ce plan, qui repose sur les vieux ressorts rouillés de la libéralisation du service public d’éducation, n’a, en réalité, rien de neuf. Alors que le Président était attendu pour mettre fin à la situation indigne des écoles marseillaises que le journal Libération qualifiait de « honte de la Nation », il a préféré décliner son programme idéologique.

Contractualisation des moyens, mise en concurrence des établissements, recrutements directs des enseignants par les directrices et directeurs des écoles, fin, de facto, du statut des professeurs des écoles… ces vieux ingrédients rances composent depuis des années la recette de la vieille soupe libérale et réactionnaire.

Nous, éducatrices et éducateurs de l’ICEM-pédagogie Freinet, apportons notre plein et entier soutien aux équipes marseillaises qui refuseront cette expérimentation et nous nous opposons avec force et détermination à toute généralisation de celle-ci.

Nous affirmons que nous avons déjà suffisamment expérimenté.

Nous avons déjà suffisamment expérimenté et nous savons ce qui ne fonctionne pas !

Ainsi, la Suède, dans les années 1990 a expérimenté les recettes libérales que préconise aujourd’hui le président Macron : décentralisation extrême, contractualisation des moyens, recrutement des enseignants par les personnels de di- rection, poids accru de la hiérarchie locale, pilotage par les évaluations, mise en concurrence des établissements, chèque éducation… Les conséquences de ces expérimentations à grande échelle sont maintenant bien connues : les résultats des élèves suédois se sont effondrés dans les différentes évaluations internationales, et les inégalités se sont accrues. Finalement, ces expérimentations, basées sur le modèle libéral aujourd’hui promu par Emmanuel Macron, ont révélé ce que l’on soupçonnait déjà : on ne soigne pas les malades avec de la mort-aux- rats !

Nous avons déjà suffisamment expérimenté et… nous savons ce qui fonctionne !

Lorsqu’en 2001 l’école Hélène Boucher de Mons-En-Baroeul, classée en ZEP et dont les résultats étaient catastrophiques et le niveau de violence élevé, a été choisie pour permettre à des militantes et militants de la pédagogie Freinet d’y mener une expérimentation en appui sur les principes qui fondent cette pédagogie, là aussi le résultat fut sans appel.

Travail d’équipe, absence de hiérarchie entre les enseignants, coopération entre enfants et entre adultes, travail authentique et personnalisé, coformation, voilà ce qui a permis à cette école, suivie pendant plusieurs années par une équipe pluridisciplinaire de chercheurs et chercheuses, de restaurer un bon climat scolaire et d’obtenir des résultats équivalents aux meilleures écoles de centre-ville.

Alors oui, nous avons déjà suffisamment expérimenté et nous connaissons par- faitement les ingrédients d’une école qui réussit et qui fait réussir. Travail d’équipe, formation et coformation, coopération et absence de hiérarchie, effectif des classes n’excédant pas 20 élèves pour permettre les échanges et la personnalisation des apprentissages, locaux adaptés et suffisamment vastes, aides humaines supplémentaires… la liste est longue des choix dont la pertinence est validée par les études et les expérimentations, dont aucune ne reconnaît d’intérêt aux options portées par le président Macron.

Cessons les expérimentations dont nous connaissons les résultats, mais offrons à nos enfants, à nos familles, à nos éducateurs et éducatrices les moyens de faire exister une école de la coopération, de la citoyenneté, de l’émancipation, une école qui ne confond pas liberté et libéralisme, une école qui offre à tous ses enfants les conditions dignes pour leur permettre de devenir des citoyennes et des citoyens éclairés, responsables et coopérants.

Le Comité collégial d’animation de l’ICEM pédagogie Freinet