Nous relayons ce communiqué du MOLACNATS (qui date de décembre 2014, d’où la référence à Noël mais dont les enjeux dépassent la seule actualité immédiate) ainsi qu’une synthèse de la situation des enfants migrants dans le monde et plus particulièrement en Amérique centrale.
Introduction. Il existe des mouvements d’enfants et d’adolescents travailleurs dans de nombreux pays d’Amérique Latine, d’Afrique, et d’Asie. Le premier s’est constitué au Pérou, en 1974. Depuis, les initiatives se sont multipliées, des rencontres de pays à pays et d’un continent à l’autre se sont organisées, accompagnées d’éducateurs et financées par des organisations humanitaires. Le MOLACNATS fédère tous les mouvements d’enfants travailleurs des pays d’Amérique Latine-Caraïbes.
Pour tous ces mouvements, l’objectif de l’OIT d”éradiquer le travail des enfants” manque de réalisme…
Movimiento Latinoamericano y del Caribe de Niñas, Niños y Adolescentes Trabajadores (Mouvement Latinoaméricain et Caribéen des Enfants et Adolescents Travailleurs)
Le 9 décembre 1996, des représentants des mouvements d’enfants -‐ filles et garçons -‐ et d’Adolescents travailleurs d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine se sont rencontrés pour la première fois dans la ville de Kundapur (Inde) pour échanger leurs expériences et leurs propositions afin de faire valoir leurs droits. Dix ans plus tard, en octobre 2006, en célébrant la 3ème rencontre mondiale des NATS (Enfants et Ados Travailleurs) dans la ville de Sienne, (Italie) nous avons décidé de choisir le 9 décembre de chaque année comme date pour rappeler et réaffirmer la lutte de millions d’enfants et d’adolescents travailleurs du monde entier.
Depuis lors, chaque 9 décembre nous nous unissons en cette journée pour célébrer nos avancées, dénoncer les injustices qui continuent d’être commises contre l’enfance en général et en particulier contre l’enfance travailleuse; et nous réaffirmons notre engagement pour continuer de lutter pour notre dignité d’enfants et d’adolescents travailleurs organisés au niveau mondial.
Nous célébrons le renforcement de notre mouvement depuis les bases de chaque pays où nous sommes présents et les actions où nous sommes visibles. Cette année nous tenons à souligner la lutte et le triomphe obtenu par les enfants et adolescents travailleurs de Bolivie pour obtenir la reconnaissance du droit au travail dans des conditions dignes et dans le respect de la culture indigène garantie par l’article 61 de la Constitution de l’Etat Plurinational et le Code de l’Enfant et de l’Adolescent récemment approuvé.En tant que membre du MOLACNATS nous continuons d’accompagner nos amis de Bolivie, à présent dans le processus de réglementation du Nouveau Code afin de générer les bases d’une politique intégrale de protection avec la participation active des sujets protagonistes des droits. Cette lutte est devenue la nôtre et nous disons en Amérique Latine : “Si la Bolivie a pu le faire, nous le pouvons aussi !”
Nous dénonçons : les différentes formes de violences envers les garçons, les filles, et les adolescents, comme les mauvais traitements, les insultes, le manque de reconnaissance de l’enfance travailleuse organisée, les conditions d’exploitation que vivent des millions de NATS dans le monde et l’absence de respect du droit à la vie.
Nous tenons à dénoncer l’assassinat d’un adolescent travailleur du Mexique, dans l’Etat de Puebla, aux mains des forces de police. L’assassinat de José Luis Alberto Tehuatle Tamayo, 13 ans, n’est pas un fait isolé dans notre région d’Amérique Latine. Des centaines d’enfants et d’adolescents centroaméricains meurent à cause de l’indifférence, ou maltraités par les autorités, et par les difficiles conditions vécues en passant la frontière entre Mexique et Etats-‐Unis.
Nous dénonçons les cas de mauvais traitements policiers qui ont causé des morts en Argentine et la disparition de plusieurs garçons et filles dans ce pays frère, sans que les autorités décident d’enquêter et de donner des réponses à leurs familles. Nous dénonçons la mort d’adolescents paraguayens dans des centres éducatifs sous la tutelle de l’Etat, ainsi que le harcèlement et la persécution d’enfants et d’adolescents de familles paysannes dans ce pays frère.
Nous nous engageons à renforcer nos organisations de base avec dynamisme pour contacter davantage d’enfants travailleurs surtout dans les zones paysannes et indigènes de nos pays ; à continuer la lutte pour que nos droits soient respectés et que ceci ne reste pas lettre morte dans nos lois nationales et internationales ; nous nous engageons à organiser et célébrer notre 9ème Rencontre Latinoaméricaine du mois de mars 2015 à Asunción, Paraguay; comme espace de réflexion et d’action transformatrice pour que le MOLACNAT’s soit un mouvement social reconnu comme référence de lutte pour tous les enfants et adolescents travailleurs d’Amérique Latine.
Vive les filles, les garçons et les adolescents travailleurs du Monde ! Justice pour José Luis Tehuatle !
Joyeux Noël sans enfants maltraités, sans assassinats ni disparitions !
MOLACNATS le 9 décembre 2014.
http://www.derechosinfancia.org.mx/Temas/temas_trab1.htm
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Migration d’enfants non accompagnés. ( déc. 2014 )
(www.rebelion.org)
Le droit international définit comme “réfugié” une personne qui, “du fait de ses craintes fondées d’être persécutée pour motifs de race, de religion, de nationalité, d’appartenance à un groupe social ou d’opinions politiques, se trouve hors du pays de sa nationalité et ne peut pas, -‐ ou à cause de ses craintes ne veut pas -‐ recourir à la protection de ce pays, ni y retourner”.
Expulser les enfants sans papiers ?
Bien que le droit international protège “les enfants étrangers non accompagnés” qui arrivent aux Etats-‐ Unis, le gouvernement et les partis politiques de la Chambre des Représentants cherchent à empêcher le respect de ces droits en vertu d’une “crise migratoire” qui est en réalité une demande massive du statut de réfugié.
Les arguments sur lesquels s’appuie l’idée de déportation sommaire ont trois origines :
-‐ la patrouille frontalière se dit “débordée” et évoque son manque de préparation pour avoir affaire à des mineurs,
-‐ les réclamations des Cours migratoires pour l’avalanche de dossiers,
-‐ la rhétorique de la nationalité et de la menace étrangère , mécanisme xénophobe qui exprime la nécessité de faire porter aux migrants la responsabilité de la crise économique américaine.
Depuis quand des enfants entreprennent-‐ils seuls ce long voyage ?
Le thème des enfants sans papiers qui se rendent du Mexique aux Etats-‐Unis n’est pas récent. Depuis des années, quoiqu’en nombre moins préoccupant, ce phénomène existe. Les raisons sont multiples:
-‐ ces enfants vivent dans une grande précarité économique et sociale,
-‐ ils ne migrent pas par plaisir ni par volonté, mais par obligation,
-‐ ils sont dans une grande vulnérabilité et exposés à des situations de risques pour leur intégrité physique, voire pour leur vie, et subissent des vexations et des abus constants.
-‐ si finalement ils réussissent à parvenir au terme de leur parcours, (les Etats-‐Unis) ils souffriront des conditions de marginalisation dues au fait qu’ils sont sans papiers. Leur condition d’enfants ne leur apportera aucune bienveillance. Si les Droits Humains, -‐ et donc les droits des enfants -‐, ont un caractère universel et inaliénable, dans ce contexte on semble les ignorer.
Pourquoi migrent-‐ils ?
Le triangle nord de l’Amérique Centrale -‐ El Salvador, Guatemala, Honduras -‐ constitue l’une des régions les plus violentes du monde. Les conditions existant dans cette région sont la conséquence de l’intervention directe des Etats-‐Unis qui se manifeste de trois façons: 1.coups d’Etat et dictatures militaires. 2. appui aux guerres de contre-‐insurrection. 3. politiques économiques patronnées par le Consensus de Washington. Cet ensemble de facteurs d’origine, plus d’autres facteurs circonstanciels ont engendré des sociétés blessées par les inégalités sociales, terrorisées par la violence des pandillas ( bandes de jeunes délinquants ) et par les escadrons de la mort.
De nombreux parents, et tout au moins le père, sont partis aux Etats-‐Unis, parfois depuis plusieurs années, dans l’espoir d’améliorer leurs conditions de vie. La réunification familiale peut aussi être le motif de la tentative des enfants.
Dimensions du phénomène.
Selon les données de la Patrouille Frontalière et du gouvernement des Etats-‐Unis, entre octobre 2013 et la mi-‐juin 2014, plus de 52 mille mineurs ont tenté de traverser la frontière entre Mexique et Etats-‐Unis. Ils provenaient principalement de trois pays : le Honduras (15027), le Guatemala (12 670) et le Salvador ( 11 436 ). Il faudrait y ajouter les enfants mexicains qui étaient plusieurs milliers.En moins de 5 ans, cette migration centro-‐américaine a connu une croissance exponentielle: en 2009, les enfants migrants salvadoriens étaient au nombre de 1221. En moins de 5 ans, ce chiffre a été multiplié par dix. Au Honduras, le nombre est passé de 968 en 2009 à 15 027 en 2014…
Entre vulnérabilité et extorsion…
La traversée à effectuer suppose un déplacement de milliers de km et de plusieurs semaines. Ce voyage est plein de risques. Les enfants peuvent avoir à faire face à diverses situations. Ils devront utiliser de multiples moyens de transport (bus, train de marchandises “la Bestia”, déplacement à pied, etc.) pour parvenir au nord du Mexique et traverser la frontière Mexique-‐Etats-‐Unis. Durant le transit, ces enfants sont exposés à toutes sortes d’abus et d’agressions: extorsions, vols, violence physique, mutilations, viols, trafic de personnes, prostitution forcée, séquestre, assassinat…
Ces abus sont perpétrés par divers individus ou groupes : groupes de délinquance organisée et/ou de narcotrafic, comme los Zetas, les pandillas ou maras (groupes de jeunes délinquants), autorités mexicaines du niveau municipal, fédéral ou de l’Etat… Les enfants et les migrants adultes deviennent de la monnaie d’échange de laquelle les personnes mentionnées plus haut soutirent des ressources économiques. Cependant, face à ce phénomène, il y a aussi des individus, des associations de défense des droits humains, ou d’autres organisations de la société civile ou religieuse, qui tentent d’améliorer les précaires conditions de voyage des migrants, par de l’assistance sociale, des conseils juridiques, un accueil momentané, etc.