Quelle place pour les questions féministes dans notre enseignement de la philosophie ? JOURNEES D’ETUDE 12-13 NOVEMBRE 2021
Lycée Lurçat – 48 avenue des Gobelins – Paris 13ème
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Entre valeurs et problématisation
La transmission de l’égalité femmes – hommes comme valeur de la République est une priorité de l’école, qui a pourtant les plus grandes difficultés à s’en emparer, notamment dans l’enseignement de la philosophie en Terminale. Or, la philosophe qui a ouvert le champ de recherche des études féministes au niveau international, Simone De Beauvoir, n’est entrée dans notre programme officiel qu’en 2020. Le terme “féministe” vient d’un philosophe français : Charles Fourier. Pourtant, le féminisme est souvent considéré seulement comme un mouvement historique, social et politique de lutte pour l’égalité des femmes et des hommes, plutôt que comme une ressource pour la réflexion philosophique et son enseignement.
Les recherches philosophiques contemporaines ont produit de nouveaux concepts permettant de penser le problème du sexisme et de la différence sexuelle. Le genre, le patriarcat, le consentement, le care, le male gaze, la culture du viol sont des concepts tout à fait propices au questionnement des notions au programme de terminale : la nature, la justice, la liberté, le devoir, l’inconscient par exemple. Qu’en faisons-nous dans nos classes ? Comment assurer la transmission de valeurs d’égalité des genres et de liberté dans notre enseignement de la philosophie, censé être problématisé ? Comment sensibiliser les élèves aux problèmes posés par les études de genre sans confondre enseignement et militantisme ? Comment articuler le descriptif et le normatif dans nos cours auprès des élèves des voies générale et technologique ?
Une spécificité de la philosophie ?
La thématique des inégalités de genre est davantage abordée au lycée dans une approche sociologique ou historique, en S.E.S. ou E.M.C. Cependant, notre enseignement est aussi porteur de l’esprit critique et d’une visée émancipatrice : n’est-il pas le lieu privilégié pour questionner la réalité effective de l’égalité des droits, nos catégories de pensée “homme” et “femme”, et plus largement, critiquer les concepts et arguments qui facilitent encore aujourd’hui l’oppression des femmes ? Le mouvement féministe n’étant pas monolithique, la distinction sexe / genre, le travail domestique, l’écriture inclusive, par exemple, donnent lieu à des controverses. Comment s’en saisir pour faire penser les élèves, c’est-à-dire en évitant les postures moralisantes comme le supposé bien connu, déjà su, déjà pensé ?
Lectures d’une tradition oubliée
Au-delà du champ ouvert par les études féministes depuis les années 70, rares sont les philosophes qui n’ont pas consacré une ou plusieurs pages à la différence des genres ou, à partir du XVIIe siècle au moins, à la question de leur égalité. Il suffirait pour s’en convaincre de consulter les textes rassemblés, il y a plus de 20 ans déjà, dans l’anthologie critique Les femmes de Platon à Derrida, par Françoise Collin, Evelyne Pisier, Eleni Varikas.
Si la visée émancipatrice de l’enseignement de philosophie n’est pas un vain mot, peut-on ne pas confronter les élèves aux critiques des arguments soutenant l’éternelle soumission des femmes, le refus de leur accorder les mêmes droits qu’aux hommes, et leur naturalisation ? Est-il indifférent que les filles et garçons d’aujourd’hui découvrent que le combat pour l’égalité des sexes n’est pas né d’hier, que la différence des sexes n’est pas un donné mais une question philosophique qui a une histoire et qui se poursuit ?
La liste officielle du programme, malgré la présence de J. S. Mill et Beauvoir, reproduit pour l’essentiel l’invisibilisation des autrices (Marie de Gournay, Gabrielle Suchon, Mary Wollstonecraft, Harriet Taylor Mill, etc.) et auteurs (Poulain de la Barre, Condorcet, Fourier, Thompson, etc.) ayant traité des problématiques féministes. Leur lecture ne nous amène-t-elle pas à reconsidérer les propos sexistes des classiques bien connus (Aristote, Spinoza, Kant, Rousseau, …) : préjugés de leur époque ou prise de position philosophique ? Que faire des thèses misogynes des philosophes en classe ? Les études féministes nous amènent également à reconsidérer les questions traditionnelles de la philosophie en se demandant si elles ne sont pas posées depuis un certain point de vue genré, et permettent ainsi de requestionner l’universel comme un donné peu évident.
Afin de nourrir les analyses de ces journées, les collègues de philosophie sont invité⋅e⋅s à répondre à un questionnaire sur les autrices et les thématiques féministes dans nos cours : https://vu.fr/acireph
PROGRAMME
VENDREDI 12 NOVEMBRE 2021
9H – Accueil des participants et présentation des journées
9H30 – 10H30 – Compte-rendu des pratiques de classes – Antoine Muller
10h30 – 12H – Conférence-débat : Vanina MOZZICONACCI, Maîtresse de conférences (Université Paul Valéry Montpellier)
Faire un cours de philosophie sur le consentement : propositions féministes
14H – 15H30 ATELIERS AU CHOIX
16H – 17H30
SAMEDI 13 NOVEMBRE 2021
9H – 10H30 – Conférence-débat : Geneviève GUILPAIN, professeure de philosophie (INSPE Créteil)
Gabrielle Suchon (1631-1703) : Le choix d’une existence “sans engagement” pour la pratique d’une philosophie engagée
10H30 – 12H – ATELIER COLLECTIF : Que serait une pédagogie non sexiste en philosophie ?
14H – 15H30 – ATELIERS au choix
16H – 17H30 – Réformes et actualité de la profession (H.L.P., CAPES et Masters MEEF)
ATELIERS animés par des professeurs de philosophie en lycée
► Organiser un débat sur les violences sexistes et sexuelles
► Monter un projet pour l’égalité hommes-femmes au sein du lycée
► Un colloque des philosophes sur les genres
► Droit, parentalité et inégalités
► Sensibilisation aux perspectives féministes à travers une approche de cinéphilosophie
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Les Journées d’étude de l’ACIREPh sont ouvertes à tous ceux que les questions de l’enseignement de la philosophie intéressent, et s’adressent tout particulièrement aux professeurs de philosophie, débutants ou expérimentés, qui souhaitent réfléchir collectivement à leur pratique, pour s’emparer des questions posées par leur métier.
Les journées d’étude sont organisées en tant que stage de formation syndicale, cette année en partenariat avec le SGEN-CFDT. La formation sur le temps de travail est un droit pour tous les personnels de l’Éducation nationale, syndiqués ou non. Il suffit d’adresser à votre Rectorat une demande de congé pour formation syndicale (modèle ci-joint) AVANT LE 12 OCTOBRE 2021.