Pour une autre école : l’heure est à l’offensive !
L’appel unitaire à la mobilisation de la maternelle à l’université, comprenant les syndicats enseignants mais aussi la principale fédération de parents d’élèves (la FCPE) et des organisations étudiantes et lycéennes, a fait de la journée de grève du 13 janvier une grande réussite : avec trois quarts de grévistes dans le premier degré et deux tiers dans le second, c’est la plus importante grève dans l’éducation depuis des années.
Elle témoigne d’une colère qui n’a fait que monter ces derniers jours face à une gestion de la crise sanitaire catastrophique. Des protocoles insuffisants ou inapplicables, revus en toute hâte et sans concertation, ont en effet transformé la vie des enseignant·es et des parents en petit enfer de tous les jours.
Depuis le début de la crise sanitaire, il semble que le gouvernement n’a d’autre politique que celle consistant à nous laisser nous débrouiller comme nous pouvons pourvu que les écoles restent ouvertes. Mais cela n’est possible qu’à la condition de débloquer des moyens humains et matériels exceptionnels pour répondre à une situation qui l’est tout autant.
Nous n’avons eu de cesse de réclamer des personnels pour assurer la désinfection des locaux ou faire des remplacements. Les besoins en personnels éducatifs ou d’aide aux élèves en situation de handicap (AED et AESH) sont eux aussi criants, pour ne rien dire des carences en matière de personnels soignants en milieu scolaire… qui manquent eux-mêmes cruellement dans les hôpitaux. On a pu s’amuser de la boutade « Demandez-nous de quoi vous avez besoin et nous vous dirons comment vous en passer », mais elle est à peine exagérée tant elle semble tenir lieu de politique pour le ministère. Certes, des annonces ont été faites suite à une mobilisation dont le gouvernement n’a pu contester l’ampleur, mais le compte n’y est pas pour éviter que les conditions d’accueil et de travail à l’école se détériorent encore. Il faudrait en effet un plan d’urgence d’envergure pour répondre réellement aux besoins. Rien que pour cette raison, la poursuite de la grève est une nécessité absolue.
Tourner la page Blanquer et imaginer une autre école
Mais la grève du 13 janvier a fait plus que mettre en évidence notre colère : elle a aussi fragilisé un ministre de l’éducation qui semblait intouchable. Nous sommes par conséquent en position de force pour dénoncer une politique autoritaire qui n’a cessé de s’affirmer depuis que Blanquer s’est installé à la tête du ministère. N’écoutant que lui-même, il a fait le choix de la brutalité et de la répression systématique pour imposer ses conceptions réactionnaires de l’éducation. Usant du mépris, de la manipulation pure et simple (on pense à son rôle dans l’affaire du syndicat Avenir lycéen ou à sa dénonciation d’un prétendu courant islamo-gauchiste qui pervertirait les universités), de l’intimidation et des menaces disciplinaires, il a fini par concentrer tous les pouvoirs sur sa personne pour faire taire ses adversaires et imposer sa vision libérale-autoritaire de l’école. Le résultat est là, notre liberté pédagogique se réduisant à rien. Au-delà des moyens nécessaires au bon fonctionnement du service d’éducation en temps de crise, la grève est aussi l’occasion de dire que l’école de Blanquer, autoritaire, concurrentielle, élitaire et dure avec les plus faibles, n’est pas la nôtre. La grève peut aussi être un espace où discuter des conséquences des réformes de ces dernières années, de la réforme du lycée, de Parcousup, de l’individualisation, de l’esprit de compétition et des plans d’évaluation visant la performance plutôt que le développement humain.
Bien sûr, c’est un mode de gestion qu’il faut critiquer et pas seulement un homme. La prise de parole d’Emmanuel Macron lors de la clôture du congrès de la Conférence des présidents d’université montre bien qu’il partage les vues du ministre de l’éducation. C’est la méthode Blanquer qui pose problème et non le fond de toute évidence. Évoquant la nécessité d’une transformation systémique de l’université, il a ainsi déclaré vouloir mettre fin au principe de gratuité et renforcer la professionnalisation des cursus.
Et si le combat pour une école démocratique et égalitaire qui se joue tous les jours et partout recommençait maintenant ?
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