M. Blanquer, Ministre de l’éducation nationale, a réagi le 5 décembre aux résultats de l’évaluation internationale PIRLS. Le ministre tire prétexte de cette publication pour relancer son offensive idéologique sur la lecture et contre la liberté pédagogique. Les réponses du ministre sont ineptes et inquiétantes.
Cette enquête cherche à évaluer « l’aptitude à comprendre et à utiliser les formes du langage écrit que requiert la société ». Le ministre y répond par les mêmes vieilles recettes des programmes de 2008 : une réaffirmation de la nécessité d’une dictée quotidienne, le renforcement de l’étude de la grammaire, la récitation quotidienne en élémentaire, le vocabulaire en maternelle… Pourtant l’enquête affirme que les élèves des écoles françaises déchiffrent plutôt bien et qu’ils et elles sont capables de retrouver des informations dans un texte. Ce sont les capacités de compréhension, de décontextualisation, d’application au monde réel qui font défaut. La réponse du ministre est donc complètement décalée et purement idéologique.
L’enquête propose plusieurs pistes d’explication, dont le rapport à la lecture dans la société et les familles et le type d’exercices proposés aux élèves, trop peu axés vers la compréhension. Le rapport pointe surtout le manque de formation continue des enseignant-e-s en France, ce que SUD éducation ne cesse de dénoncer. À cela le ministre répond par les 18 heures annuelles, ce qui est quantitativement ridicule et qualitativement le plus souvent extrêmement pauvre. Et quand on sait que le ministère voudrait que la moitié de ces heures soient effectuées en distanciel devant un ordinateur, on mesure l’inanité de la réponse.
Puisque c’est désormais sa solution à tous les problèmes de l’école, Blanquer met en avant le dédoublement des CP et CE1 en Rep et Rep+ dès l’an prochain. Macron a pourtant rappelé que les dédoublements ne seront effectifs que “dans le quinquennat”. Le Projet de Loi de Finances 2018 en atteste. Du reste, cette promesse prête à sourire au vu des coupes budgétaires qui touchent tous les services publics. Mais surtout, cette mesure ne saurait masquer le reste des politiques de réduction des postes et de suppression des dispositifs existant comme les « Plus de maîtres que de classes ». En se focalisant sur les CP et CE1 en Rep et Rep+, toutes les autres classes sont négligées. Les capacités de compréhension en lecture ne sont pourtant pas acquises en deux ans, loin s’en faut.
Le ministre, qui avait promis qu’il ne réformerait pas les programmes, annonce désormais que finalement, oui, il va les changer. Quand on sait que les programmes qu’ont suivis les élèves évalué-e-s par cette enquête sont ceux de 2008 – sans doute les pires depuis des décennies – que le même Blanquer a mis en oeuvre alors qu’il était directeur de la Dgesco, on peut être inquiet-e-s pour l’école publique et pour les élèves.
Surtout que le ministre veut confier les programmes et la formation à un comité scientifique centré sur les sciences cognitives, au détriment de toutes les approches pédagogiques complexes et collectives des apprentissages. Le principal objectif de ce comité sera de produire des évaluations nationales à foison : en début de CP, au milieu du CP, en fin de CP, au début de CE1, en 6ème… SUD éducation a déjà expliqué pourquoi nous refusons ces évaluations nationales, incompatibles avec les valeurs et les pratiques d’une école égalitaire, émancipatrice et autogestionnaire que nous promouvons.
Enfin, le tour autoritaire de la politique du ministère se manifeste en toute clarté dans son projet de contrôle des manuels scolaires. Le conseil scientifique à la botte du ministère donnera un label aux manuels scolaires. Ce label sera réservé aux manuels qui respecteront la nouvelle doctrine d’État en matière d’enseignement, en premier lieu sur la lecture, cherchant ainsi à imposer la méthode syllabique. Car notre ministre l’affirme : « notre institution doit indiquer le cap. La liberté pédagogique ce n’est pas l’anarchisme pédagogique ».
SUD éducation dénonce cette offensive réactionnaire du Ministre de l’éducation nationale sur l’école primaire. Nous appelons à constituer un vaste front de lutte en défense de l’école publique et de la liberté pédagogique.
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