Une très belle rencontre hier soir chez Libertalia, avec Annabelle Allouch, autour de son livre publié chez Anamosa : Mérite. C’était passionnant et très riche, et j’en retiens quelques pistes à creuser :
1- on a évoqué le rôle du mérite dans la légitimation des inégalités sociales, sans nier la difficulté, en tant que personnels, parents ou jeunes, à nous défaire de cette notion, intimement liée à celle de « réussite » : comment qualifier les trajectoires scolaires, comment encourager les individus et les groupes, sans faire appel au mérite et à la réussite ? (question ouverte, n’hésitez pas!)
2- Ce qui sous-tend la logique méritocratique, c’est la notion d’efforts, de souffrance (avec sa mise en scène), de talent (ou génie, ou don) ainsi qu’une part de morale judéo-chrétienne. Ou un mélange de tout ça.
Je me demande si on ne pourrait pas y ajouter, liée à la souffrance, une logique sacrificielle (je sacrifie tout à ma réussite scolaire, pour montrer que je suis méritant·e), d’où une chute vertigineuse lorsque ça ne marche pas et ce rapport changeant au mérite, tout au long de notre trajectoire, avec des moments où l’on y croit fort, d’autres où l’on prend des distances, etc.
3- (Suite à nos échanges autour d’un bon repas) – Sur les (filières préparatoires aux) grandes écoles : elles contribuent à la structuration sélective et élitiste de l’enseignement, à la logique méritocratique.
Dès lors, comment se positionner ? Comment en démontrer les limites sociales sans blesser ou culpabiliser les collègues qui y travaillent et qui y voient – légitimement dans le système actuel – une porte de sortie pour les jeunes ? Peut-on subvertir ce système de grandes écoles de l’intérieur ?
4- Et enfin, mais ça c’est de la provoc’, que répondre aux gens qui diront, inévitablement, que critiquer la méritocratie, c’est contribuer à l’affreux « nivellement par le bas » ?
Merci à Annabelle pour ce précieux livre !