On connaît Shlomo Sand pour ses écrits sur l’histoire du peuple juif, en particulier son essai Comment le peuple juif fut inventé (2008) où il déconstruit la mythologie sioniste et son récit fondateur d’un peuple uni par la même origine remontant à la terre d’Israël.
Avec La Mort du Khazar rouge, l’historien israélien se lance, pour la première fois, dans le roman policier et nous invite ainsi à découvrir le résultat de ses recherches historiques par le biais de la fiction. On retrouve en effet, dans ce récit à suspens, les principales thèses de l’universitaire sur l’importance des conversions au judaïsme dans l’histoire (par exemple chez les berbères d’Afrique du Nord ou dans l’ancien empire khazar d’Asie centrale).
Ce sont ces recherches, remettant en cause le roman national, qui pourraient expliquer la mort du professeur d’histoire Yitzhak Litvak, en 1987, puis celles d’autres protagonistes, sur une période de 25 ans ; militants et militantes de la gauche israélienne, universitaires critiques, etc. sont ainsi réduits au silence de manière expéditive dans ce qui pourrait être une série d’assassinat politiques. C’est ce que devra en tout cas découvrir le commissaire Morkus, arabe et chrétien, en charge de l’enquête.
Shlomo Sand transcrit, dans un univers réaliste mais fictionnel, les enjeux politiques de ses recherches, à commencer par l’effacement par les institutions universitaires et scolaires d’un pan de l’histoire du judaïsme qui, jusque dans les années 60, était largement enseigné, mais qui aujourd’hui est devenu un sujet explosif. Une lecture agréable et vivante qui permet d’aborder sous un autre angle, une réflexion historique qui a fait date et polémique dans le débat d’idées de cette dernière décennie.
Shlomo Sand, La Mort du Khazar rouge, Seuil (coll. Romans étrangers), 2019, 384 p., 21 €.
– Michel Bilis, trad.