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La coopérative pédagogique #2 : La pédagogie institutionnelle contre l’école caserne

Via les pages “pédagogie” de la Fédération Sud éducation (20/10/2021)

« La pédagogie n’est jamais neutre, je sais que ma pratique sera ce qu’elle est en fonction de choix : préparer les jeunes à occuper leur place dans la société ou les préparer à la transformer en transformant déjà le plus petit et le plus proche. »

Jacques Cornet, Noëlle de Smet

SUD éducation se prononce pour la popularisation et l’usage en classe des pédagogies coopératives. Pour autant, SUD ne prétend pas trancher entre les différents courants existants (pédagogie Freinet, GFEN, pédagogie institutionnelle…) : ces fiches pédagogiques ont pour objectif de les présenter, libre à chacun·e de se les approprier en fonction de ses choix et de sa pratique. Vous trouverez dans cette fiche une présentation de la pédagogie institutionnelle, rédigée par des militant·es pédagogiques syndiqué·es à SUD éducation.

Les origines historiques et théoriques de la pédagogie institutionnelle

Adapter la pédagogie Freinet en milieu urbain

La pédagogie institutionnelle (PI) est née de la volonté d’un groupe d’instituteurs et d’institutrices d’adapter les techniques de la pédagogie Freinet (PF) aux contraintes des « écoles casernes » des grands ensembles urbains qui émergent dans les années 1950. Les écoles sont alors organisées d’une façon très hiérarchique, très martiale et les instituteurs contiennent les élèves à coup de sifflet. Écoles immenses, organisation militaire, humiliation quotidienne, cela évoque rapidement la caserne à ces militant·es pédagogiques qui ont connu la deuxième guerre mondiale. Membres du groupe parisien de l’Icem (institut coopératif de l‘école Moderne) cette équipe d’instituteurs et institutrices cherche des pistes et des fonctionnements pour la pédagogie Freinet dans ce contexte urbain. Le mouvement Freinet à cette époque est majoritairement développé dans les écoles rurales et les techniques comme l’imprimerie, la correspondance, le jardinage, les sorties enquêtes se révèlent parfois difficiles à mettre en place dans le contexte pédagogique et social de la banlieue parisienne. Fernand Oury et Raymond Fonvielle, deux noms importants du groupe parisien de l’Icem vont être à l’origine, avec d’autres, de la pédagogie institutionnelle.

L’influence des sciences sociales

Un deuxième fondement de la PI, à côté de la Pédagogie Freinet, est d’aller chercher des outils théoriques et pratiques dans les sciences sociales notamment la psychologie sociale et la psychanalyse, dans une veine anti-autoritaire. Cela vient de la connivence entre Fernand Oury, l’instituteur, et son frère, Jean Oury, psychiatre et psychanalyste. Jean Oury s’est formé au côté de François Tosquelles à la clinique de Saint Alban en Lozère. Militant anarchiste, républicain ayant fui la dictature de Franco, Tosquelles développe avec son équipe, la psychothérapie institutionnelle basée sur le fait que le soin des patients est intimement dépendant du milieu et de la posture des soignants. À Saint Alban, pas d’uniforme, pas de grille, les patient·es peuvent circuler dans le village et travailler chez les habitant·es, des moments d’assemblées sont prévues pour décider du fonctionnement avec les thérapeutes. Autant de principes qui vont nourrir les discussions entre Jean et Fernand Oury en recherche d’un fonctionnement plus horizontal dans la classe et plus structurant pour les élèves des énormes écoles de banlieue. En s’inspirant de la psychothérapie institutionnelle, des techniques Freinet et de la psychologie sociale, ces instituteurs et institutrices bricolent des dispositifs de classe pour créer des lieux de parole, de décision, de résolution de conflits… C’est d’ailleurs sur une proposition de Jean Oury au congrès du mouvement Freinet en 1958 que la PI est nommée ainsi pour la première fois.

Une pédagogie nourrie du renouveau de la psychanalyse

À la suite de l’écriture d’un article pour la revue de l’Icem, Raymond Fonvielle se fait évincer du mouvement Freinet et Fernand Oury décide alors de quitter le mouvement au début des années 1960. Sans jamais remettre en question les bases théoriques et politiques de la Pédagogie Freinet, ces exclusions et départs actent des différences sur certains points. En effet, les fondateurs et fondatrices de la PI étaient assez critiques d’un certain naturalisme que l’on pouvait trouver en Pédagogie Freinet. De plus, les divergences se font sur la volonté d’intégrer des sciences sociales (sociologie, psychologie, psychanalyse) dans l’analyse et la mise en œuvre des techniques de Pédagogie Freinet. Ainsi des concepts tels que désir, transfert, et identification vont servir de boussole aux pionnier·es de la PI. Suite à cela un nouveau groupe est créé (groupe techniques éducatives – GTE) et l’arrivée de Aïda Vasquez, doctorante en psychologie vénézuélienne et psychanalyste, va être fondamentale pour l’évolution de la PI. Elle va apporter la mise en perspective du quotidien de la classe avec les concepts de la psychanalyse et approfondir les écrits du groupe.

Les premiers groupes «P-Istes» comme on les appelle, se divisent ensuite sur la question de la psychanalyse. Pour Raymond Fonvieille et quelques autres instituteurs et institutrices, il fallait rester sur une pédagogie autogestionnaire et conseilliste (suivant les analyses institutionnelles de Lobrot ou Lapassade) sans la sensibilité psychanalytique. Pour les praticien·nes regroupé·es autour de Fernand Oury et Aïda Vasquez, la PI avait une dimension thérapeutique, et la psychanalyse est un outil central.

La suite est ici : https://www.sudeducation.org/la-cooperative-pedagogique-2-la-pedagogie-institutionnelle-contre-lecole-caserne/

 

 

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