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Égalité des droits !

L’édito de l’Émancipation syndicale et pédagogique n°7, mars 2020

En déplacement à Mulhouse, dans une région marquée par le maintien du Concordat accordant des bénéfices exorbitants à l’Église catholique, Macron a sonné l’hallali contre… le “séparatisme islamiste”. Soit dit en passant, l’islamisme est une idéologie réactionnaire – et aussi avec des diversités internes – mais c’est loin d’être la seule dans ce pays et il a le droit d’exister même si nous le combattons idéologiquement. Et si “séparatisme” il y a dans la jeunesse, n’est-ce pas avant tout celui engendré par l’enseignement confessionnel catholique, qu’il soit sous contrat ou hors contrat ?

Alors bien entendu, ces déclarations ont pour fonction évidente de diviser les travailleuses et les travailleurs, dans un contexte où depuis un an et demi la révolte sociale l’affaiblit. Le rejet de ce pouvoir est sans précédent, la lutte pour le retrait de la contre-réforme des retraites accentuant encore ce rejet et la fragilisation qui l’accompagne : même avec une majorité très nette de godillots sans état d’âme, il en est réduit à envisager le 49-3 concernant son projet de loi ! Les prochaines municipales risquant d’approfondir encore davantage cette défiance, pour faire oublier ces difficultés quoi de mieux que d’aller sur un terrain aussi diviseur ? Par ailleurs – là aussi diviser est toujours bénéfique – cibler le culte musulman permet au gouvernement de remettre en selle son projet de contourner d’une façon ou d’une autre la loi de Séparation de 1905, sous couvert de lui permettre de “s’organiser” dans une logique concordataire, paternaliste et in fine néo-coloniale.

Mais ces déclarations n’ont pas qu’une fonction tactique. Car de nouveau, nous avons affaire à la même équation idéologique nauséabonde qui est celle de la plupart des gouvernements capitalistes occidentaux, à savoir “immigré•e = musulman•ne = islamiste = terroriste”. Les résultats de cette campagne idéologique prennent un tour sinistre quand on voit à quoi elle mène de l’autre côté du Rhin avec les attentats terroristes de l’extrême droite. Y compris un politicien conservateur mais manifestant un peu d’empathie pour les réfugié•es peut voir sa vie menacée.

Dans cette situation des initiatives du mouvement ouvrier et démocratique, dont la forme et le contenu sont à débattre, seraient justifiées. Il y avait eu des controverses autour de la manifestation antiraciste du 10 novembre. L’auteur de ces lignes y était favorable car il était légitime d’impulser une manifestation antiraciste d’ampleur après l’attentat raciste (et heureusement raté) de Bayonne, mais l’unité aurait pu être plus large. Quoi qu’il en soit, le meilleur moyen d’éviter ce type de controverses serait que le mouvement social – syndicats et associations – prenne l’initiative dans ce domaine : après tout, c’est de sa responsabilité. Et ce ne sont pas les bases d’une plateforme unifiante qui manquent, par exemple :
– abrogation des lois xénophobes et contre les migrant•es (loi Collomb), régularisation des sans-papier, fermeture des centres de rétention ;
– arrêt des discriminations au quotidien (école, logement, embauche, contrôles au facies,…), des violences policières, égalité des droits dans tous les domaines…

Quentin Dauphiné, 26/02/2020

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