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Défendre le Lycée autogéré de Paris (LAP)

Par l’équipe du lycée autogéré de Paris.

Invitation à une réunion publique le mardi 7 novembre à 19h dans les locaux du LAP 393 rue de Vaugirard – 75015 Paris (un projet du lycée proposera de quoi manger)

Depuis 1982, le lycée autogéré de Paris (LAP) est un ovni dans le paysage scolaire public français. Il accueille, sans tenir compte des origines géographiques ni des décisions d’orientation, des élèves auxquels il propose une approche originale de l’éducation. Cette approche c’est l’autogestion qui recouvre à la fois implication de tout le collectif dans le fonctionnement administratif ou technique de l’établissement ainsi qu’une participation démocratique aux prises de décision. A cela s’ajoute l’absence de notation (le professeur évalue, conseille mais n’inscrit pas des performances chiffrées dans un dossier) et la libre fréquentation (la participation devant relever du choix de l’élève et non de la crainte de sanctions). La pérennité d’un tel fonctionnement suppose une équipe éducative soudée, convaincue du bien fondé de la démarche et acceptant des contraintes horaires plus importantes (25 heures par semaine d’activité sur l’établissement, plus si besoin) ainsi que des tâches (entretien, administration, délibération collective…) ne relevant pas de la définition classique du métier d’enseignant. Pour composer une telle équipe, le LAP a recours, depuis sa création, à la cooptation.

Né ainsi que trois autres établissement (le lycée expérimentale de Saint Nazaire, le lycée collège expérimental d’Hérouville-Saint-Clair et le Centre expérimental pédagogique maritime en Oléron), pendant l’épisode politique sans lendemain des années 1981-1983, l’existence du LAP a toujours été précaire. Elle repose très largement sur le fait accompli et sur un certain nombre d’accords tacites faciles à remettre en cause et, de fait, fréquemment contestés. Si il a pu résister si longtemps aux pressions d’une administration généralement hostile c’est que, aussi peu apprécié qu’il soit, il n’était pas inutile. Pendant quarante ans le LAP a servi de contre exemple à brandir chaque fois qu’était dénoncé l’autoritarisme, le conservatisme ou l’élitisme du système éducatif public. D’autre part, il offrait un débouché à des élèves dont les établissements classique ne savaient que faire, voire desquelles ils étaient bien contents de se débarrasser. Enfin, le LAP a toujours bénéficié d’une aura dépassant très largement son importance en terme d’effectif. En s’y attaquant on était assuré d’être confronté non seulement à une forte résistance interne mais aussi à la mobilisation d’importants soutiens extérieurs. Cette perspective aidait les autorité à se souvenir que le LAP n’était jamais qu’une goutte d’eau dans l’océan éducatif et que le jeu n’en valait décidément pas la chandelle.

Tout change avec le tournant que représente l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République qui remet en question le LAP : Le LAP alibi d’ouverture et de diversité de l’enseignement public ? A quoi bon lorsque les éléments de langage permettent de faire du plus banal des conservatismes une innovation révolutionnaire. Le LAP dernier refuge pour des jeunes inadaptés au système scolaire et non, frein à de juteuses perspectives de marché pour l’enseignement privé pour les plus fortunés ou nouvelle exemple du « pognon de dingue » versé dans les services publics.

La première attaque importante a été indirecte. C’est une conséquence de la réforme du bac menée par Jean-Michel Blanquer. Philosophiquement, tout oppose les convictions du LAP pour lequel chaque élève est unique au rêve technocratique d’un ministre pensant pouvoir traduire chaque individualité en une série de données chiffrées, prétendue objective et transformable en un clic en statistique. Concrètement cela oblige l’équipe éducative du LAP à faire ce à quoi elle s’est toujours refusée : noter les élèves. Le résultat de la surveillance permanente… Pardon, du contrôle continu au LAP a scandalisé le ministère. Tous capables, tous performant, les enseignants avaient clairement pris le parti des élèves au détriment des divers sélectionneurs et recruteurs pour lesquels la réforme avait été conçue. La sanction n’a pas tardé, face à l’examen le LAP s’est retrouvé assimilé au privé hors contrat et ses élèves contraint à passer le bac en candidats libres.

L’attaque actuelle, la plus grave, a pour origine une crise interne. Au cours de l’année 2022-2023, un groupe d’élèves a accusé un enseignant du LAP de harcèlement sexuel. La perception de la nature des faits reprochés, de leur gravité et de la réponse à y apporter a gravement divisé les enseignants et les élèves. Cette crise conjoncturelle a été perçue, par le rectorat, comme le prétexte idéal pour lancer une attaque structurelle contre l’établissement, comme le moyen d’en finir une bonne fois pour toute avec l’autogestion, la libre fréquentation, la cooptation, l’absence de note…

Dès la rentrée 2023-2024, la cooptation a été suspendue. Le rectorat a imposé aux nouveaux enseignants choisis par l’équipe un entretien avec l’inspection disciplinaire dans le but de valider ou non leur candidature. Certains ont été validés, d’autres non, dans la plus grande opacité et sans que les intéressés ou le lycée ne reçoive la moindre information sur les motifs des choix opérés. Pour remplacer les enseignants rejetés par l’inspection, des profs ont été nommés, parfois en un coup de fil, et se sont présentés à la fois non cooptés et non avertis des particularités du LAP.

Le rectorat s’est, par ailleurs, refusé à réviser, comme il le faisait habituellement, la répartition des heures de service des enseignants. Le résultat est que quatre de nos collègues sont considérés comme effectuant un temps partiel alors que leur présence au LAP leur impose de travailler six heures de plus que ne le prévoit leur statut. Pour toute réponse, le rectorat nous explique que personne ne nous oblige à travailler plus que nous sommes payés ce qui revient à dire que personne ne nous oblige à vouloir un établissement autogéré et offrant des opportunités d’apprentissage riches et variées à ses élèves… Laissez tomber l’autogestion et « montez en gamme ».

Enfin, le ministère de l’éducation nationale a diligenté une enquête administrative à l’encontre du LAP. Enseignants actuels et anciens, direction du lycée de rattachement (Jean Lurçat), parents, élèves… En tout pas moins de soixante dix personnes ont été ou seront entendu par trois inspecteurs généraux. La procédure ne prévoie pas que les personnes entendues soient informées de ce qu’on pourrait leur reprocher, ce sont les inspecteurs qui posent les questions. Quoi qu’il en soit, il ressort des entretiens déjà effectués, qu’au delà de la crise de l’année dernière, justification officielle de l’enquête, c’est l’ensemble du fonctionnement de l’établissement que vise le ministère. Pourquoi ? Avec quel objectif ? Ce sont les inspecteurs qui posent les questions. Quant ils auront fini, ils rédigeront un rapport qu’il remettront au ministre et… Gabriel Attal décidera.

Le Lycée autogéré de Paris est en danger, aussi…

Vous avez de la sympathie pour l’expérience que nous menons depuis plus quarante ans, vous êtes inquiet de l’appauvrissement que représenterait pour le service public la disparition d’un de ses très rares établissements proposant une approche alternative de l’éducation nous vous appelons à nous soutenir.

Vous êtes favorables aux expériences autogestionnaire, opposé à la seule alternative qui nous est proposée, l’arbitraire bureaucratique, nous vous appelons à nous soutenir.

Vous êtes sensibles à l’expérience de liberté et de démocratie que nous proposons aux lycéens, préoccupés par le sort des jeunes qui ne supportent plus le système traditionnel, nous vous appelons à nous soutenir.

Invitation à une réunion publique le mardi 7 novembre à 19h dans les locaux du LAP 393 rue de Vaugirard – 75015 Paris

L’équipe du lycée autogéré de Paris

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