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Que valent encore nos droits? KroniKs des Robinsons 532 du 5 Novembre et Graines d Orties

De plus en plus, nous allons douter de l’universalité (inconditionnalité) des droits fondamentaux en général, des droits de l’enfant, en particulier, dans un environnement économique, social, politique dont la violence s’étend indéfiniment.

Qu’en reste t il ? La notion de Droit appliquée aux plus faibles, a-t-elle seulement encore quelque pertinence ?

Il fut un temps où on distinguait justement la question du Droit théorique, et celle de son accès.; nous , les acteurs sociaux, nous savions combien les droits effectifs étaient souvent difficiles d’accès pour les handicapés, les pauvres et précaires, notamment.

Mais il semble bien que nous n’en soyons plus là et que nous ayons affaire à une autre logique: il y aurait en ce monde deux catégories de personnes , celles qui auraient des droits et celles qui n’en auraient pas . Il est évidemment possible de déchoir d’une catégorie à une autre.

Il n’y aurait ainsi plus « de droit au Droit », dans son sens inconditionnel, pour le « barbare », le « sauvageon », « le rrom », le précaire. Plus de Droit pour le resquilleur potentiel des allocations chômage, des prestations, pour le sans papier, le mineur isolé, le jeune majeur sans famille, le délinquant ou le suspecté tel…

L’évolution du droit connaîtrait ainsi une courbe inversée et il semblerait que la seule chose que pourrait nous promettre l’avenir serait la réduction … du droit des autres. Certains croient consolider leurs propres droits en laissant s’éroder celui des autres. D ‘où le succès des partis dont ce genre de promesses est le fond de commerce.

Ainsi, nous avons à réfléchir sur les effets d’un progrès à l’envers. Dans notre pays (comme de la plupart), le sens du temps ne mène décidément pas vers plus d’ouverture internationale, d’interculturalité, de communication et de bonnes relations adultes/enfants. C’est presque le contraire.

Que reste t il alors au pédagogue, à l’éducateur pour agir et éduquer dans un tel contexte? Où va t il trouver la justification et le sens de son action? Peut il sans se renier, se contenter de faire « son » travail et d’ignorer un contexte si fort? Se contenter de favoriser l’accès à des droits qui se dérobent? Ignorer l’inefficacité de sa propre action? Croire avoir fait son travail quand rien n’en ressort de concret?

En Pédagogie sociale, nous observons ces contraintes et ces limites et nous reconnaissons que nous ne pourrons pas avec nos seules forces, les bouger et changer l’ordre de la violence en cours .

Par contre, nous pouvons sans doute quelque chose pour ouvrir de nouveaux espaces de liberté chez les enfants, les groupes et les publics : espaces mentaux, communautaires, économiques et sociaux. Des interstices pour penser et vivre autrement, même à l’ombre des structures

Face à des institutions qui échouent à donner corps aux droits les plus élémentaires comme le droit à l’éducation, la participation sociale, il nous reste à investir et explorer l’espace de « l’éducation non formelle »; dans une période de repli de l’école sur un travail minimum et marqué par la recherche de la performance et de la réussite individuelle, c’est dans l’éducation non formelle qu’il faut rechercher les bases d’une véritable éducation dont les enfants et le monde ont besoin.

Dans de nombreux pays, les acteurs engagés dans des entreprises d’éducation non formelle, plaident auprès des parents pour que ceux ci reconnaissent l’importance essentielle des disciplines de la sensibilité, de l’art, de la culture en général.

Tout le monde ne rejoindra pas la caste des gagnants et que restera t il aux enfants des pauvres et précaires, s’ils n’ont même pas la richesse de leur propre culture, de leur propre expérience, de leur imaginaire et de leur sensibilité?

Telle est l’entreprise de la Pédagogie sociale: sortir de raisonnements binaires qui n’ont plus lieu d’être.

La question, aujourd’hui, n’est plus d’être scolarisé ou non scolarisé, mais d’avoir un rapport , une relation vivante et durable avec les apprentissages qu’on se donne, dans une histoire institutionnelle qui est faite de pleins et de déliés.

La question n’est pas d’avoir accès ou pas à à des droits fondamentaux qui de toute façon seront remis en cause six mois plus tard; l’essentiel est de redonner du sens , du contenu, de la relation à tous ces droits à partir de notre réalité première. Faire reconnaître l’universalité du droit contre son émiettement, faire reconnaître la réalité des privations contre les droits théoriques , savoir que le droit ne naît pas spontanément mais s’obtient quelques fois par l’affirmation et l’exigence.

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