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Plutôt la vie ! Le cri de la vie qui ne veut pas devenir survie

Plutôt la vie !

Le cri de la vie qui ne veut pas devenir survie

Quel qu’en soit la fin, le mouvement de contestation contre l’entreprise de démolition sociale que constitue le projet du gouvernement sur les retraites montre que les capacités de mobilisation collective existent encore. Le peuple, comme subjectivité politique autonome, irruption soudaine sur la scène politique de ceux et celles qui n’ont pas habituellement la parole et à qui les classes dominantes refusent une expression propre au nom de leur ignorance, peut encore signifier quelque chose. Bien sûr, cette force est fragile et mal assurée, tant elle doit tâtonner au milieu des ruines de ses propres illusions et avec tout le poids de ses défaites récentes. Mais nous sommes là tous ensemble à nous soutenir et nous unir, à débattre du sombre avenir que l’on nous promet. Plus la contestation s’enracine et plus il devient clair pour toutes et tous que, au-delà de la complexité de la réforme des retraites, c’est bien, si l’on a en tête que la pension de retraite est un salaire continué, la possibilité de vivre décemment de son travail qui est en jeu. Cette réforme représente en fait une baisse générale sans précédent des salaires ; c’est le moyen que les classes dirigeantes ont trouvé pour réduire les salaires et augmenter d’autant les profits. C’est ce que tout le monde a compris, surtout depuis les révélations des liens de Delevoye avec les milieux intéressés par la réforme des retraites, le monde des assurances privées en particulier. Vivre dignement de son travail, tel est l’enjeu central. En ce sens, on peut dire que la mobilisation sociale présente est le cri de la vie qui ne veut pas devenir survie. Pour les classes moyennes en tout cas, car le mouvement des gilets jaunes a montré qu’une fraction importante de la population des petites villes ou de la ruralité était déjà dans la survie.

Le gouvernement voudrait faire de l’opposition à sa “réforme” un face à face avec les cheminot.es ou les travailleur-euses de la RATP, mais les assemblées générales qui prennent forme montrent une toute autre réalité. Aujourd’hui 16 décembre, dans la salle de la mairie 18e arrondissement de Paris, il y avait des enseignant-es, des délégué.es de la RATP, de la SNCF, de La Poste, de l’énergie, du secteur de la culture. La BNF et la Bibliothèque Publique d’Information ( Centre Pompidou) connaissent des mouvements de grève reconductible, l’Opéra de Paris est en grève et les spectacles sont annulés. Au cours de l’AG, tout l’argumentaire du gouvernement a été démonté : le régime universel de retraite ne signifie pas système plus juste, mais alignement par la bas de toutes les pensions. Des féministes ont pris la parole pour dire combien la “réforme” était défavorable aux femmes. Un soutien aux migrant.es a dit elle aussi combien la question d’un accueil digne mettait en jeu le partage des richesses. Et que dire de la stratégie voulant opposer les générations ? Comment accepter que l’on condamne les plus jeunes à un monde sans horizon, enfermés dans la cage de fer de l’austérité éternelle ?

Justement, elle tente de s’organiser la jeunesse. Dès le 4 décembre, les élèves ont fait un barrage filtrant dans mon lycée… sous la menace de flics particulièrement agressifs. Aujourd’hui, veille de la grande manifestation du 17 décembre, les lycéen-ennes se sont à nouveau mobilisé.es sous la menace de la police, laquelle patrouille dans tout Paris pour empêcher que la contestation se structure. De même, la fermeture administrative de plusieurs universités a été décidée pour éviter le développement de la révolte.

Défaire le néolibéralisme

A la faveur d’une grande mobilisation, nous prenons pleinement conscience du caractère autoritaire du néolibéralisme et du recul dramatique de la démocratie qui, pour subsister dans sa forme, n’en est pas moins vidée de son contenu.

De plus en plus, c’est la question du travail et de son sens qui est en jeu. Un travail au service du rendement et du profit au détriment de la création de richesse et de sa répartition dans le but de répondre aux besoins sociaux de base : accès à une éducation de qualité pour toutes et tous, accès aux soins, à un logement décent, à la culture, etc. Plutôt que de perdre sa vie à la gagner, c’est la vie belle et pas seulement bonne qui fait battre nos cœurs !

A force de sanctifier le marché, on a oublié qu’un système économique pouvait faire son temps. Puisque le capitalisme néolibéral nous déteste et dévaste la planète, il faut le défaire avant qu’il ne détruise complètement la vie.

On dira que le 20e siècle a été celui du massacre des grandes espérances. Mais que faut-il condamner ? Les rêves collectifs de libération ou les idéologies qui s’en sont réclamées pour les anéantir ensuite ? Le capitalisme n’est plus simplement le pire des systèmes à l’exception de tous les autres, il est devenu un mode de destruction. Le socialisme, quant à lui, est porteur de promesses non advenues. Dans notre présent, ce passé subsiste et peut rendre pensable un autre futur. A condition de le définir comme le régime de l’égale liberté, de la coopération et des relations équilibrées avec la nature, il reste d’actualité. C’est alors que le questionnement relatif à l’appropriation collective du travail et à la socialisation de l’économie, s’approche de nous et nous de lui. Et c’est une belle manière de rouvrir l’horizon et de rallumer tous les soleils.

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