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Ouvrir sa bouche c’est révéler ses différences: KroniKs des Robinsons du 8 Mai 2014 et Graines d ‘Orties 329

Nous connaissons bien dans nos associations, nos classes , nos quartiers, nos rues, ces enfants arrivés en France après errances, exils et parcours de précarité en tous genres et qui se réfugient dans un silence vertigineux.

Ce mutisme n’est pas que d’exil; il est celui de toutes les solitudes et de tous les différents. Il est le mutisme de la vie moderne, le fruit des violences sociales, économiques, politiques et administratives

Et il n’a rien à voir avec un autisme : ce n’est pas un silence de refus du monde , de la vie ou de la relation. C’est un silence, une retenue, une discrétion… de précaution.

C’est que les violences sociales ont fait de nous des « tout-autres », des « différents », des « sans pareils » et on sait, on craint tout ce qui peut advenir aujourd’hui de discriminations, et des exclusions.

Alors on se tait, ou sinon on crie, ou sinon on chante et on danse… comme font les Robinsons dans la rue, sur les ateliers, dans leurs petits clips, ou au cours de leurs soirées rituelles.

Car si nous ouvrons notre bouche, c’est pour nous exprimer dans une langue qui nous est propre ; pas cette langue obligée que nous impose l’école quand on est de milieu populaire ; pas de cette langue obligée que nous imposent les institutions, quand on est acteur social. Si nous ouvrons notre bouche c’est pour dire nos maux avec nos mots, comme ils doivent se dire et s’exprimer.

Nous parlons une langue familière. Les langues plus institutionnelles nous dénaturent quand elles nous obligent à parler avec le langage de l’autre ; seules les langues maternelles nous expriment.

Alors on ouvre sa bouche, on ouvre toutes nos bouches et on exprime tout : une immense faim, un appétit d’ogre plus grand que le monde ; un besoin de crier tout à coup , de faire la fête, de vivre la vie comme elle vient, au jour le jour, sans projet, sans contrat.

Nous assumons le brouhaha , le bruit, les cris, les joies et les larmes, car nous ne confondons pas le bruit et le trouble, la vie et le désordre.

Quand on revient d’un grand désastre que celui ci soit personnel familial, national, ou mondial, on a autre chose à faire que des projets, que des calculs, que des plans , que des programmes ; on a juste à célébrer le fait d’être là ensemble et maintenant.

Nos ateliers, nos jardins sont pleins de ces temps là , sans projets où on célèbre juste le temps qui passe et le temps qu’il fait , avec les enfants et les adultes.

Et dans ces instants, on voit des enfants qui ne parlaient pas ou ne parlaient plus, se mettre à s’affirmer, à prendre de l’importance, à révéler une personnalité hors du commun. Dans ces moments là, nous voyons ceux qui s’agitaient toujours se poser et se concentrer, se passionner pour une tâche, un travail un ouvrage.

Et le silence quand il arrive n’est plus un silence de vide ou de peur, mais de travail et de transformation.

Nous voyons des adultes redevenir enfants et des enfants devenir graves. Nous voyons ceux que l’on n’a pas conviés, prendre la parole.

Car, par la pratique de toutes les formes d’expression et de prise de parole, la Pédagogie Sociale fait des enfants, des personnes, et des adultes, …des personnages.

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