Menu Fermer

Ne plus passer pour des illuminés !

« (…) Quand l’environnement proche (les collègues) tend à nous marginaliser davantage on se pose des questions sur ce qu’il faudrait réformer. Il faut que l’institution mette en avant nos pratiques pour que l’on ne passe pas pour de simples illuminés… »

Cyriaque Bessard (1)

Voilà un sujet recouvert d’une chape de plomb : les rapports entre les enseignants traditionnels et les enseignants engagés dans des pédagogies différentes. Officiellement, tout baigne : la sacro-sainte liberté pédagogique.

On peut comprendre la perplexité des parents quand ils se trouvent confrontés à laisser leurs enfants dans une classe où la pédagogie est radicalement différente de ce qui se fait partout ailleurs. Qui croire ? Qui croire quand dans la même école, manifestement la présence d’un « illuminé » dérange l’ensemble ?

Parce que cette présence dérange, presque nécessairement. Elle crée une rupture dans la chaîne tayloriste scolaire qui nécessite l’uniformité des pratiques, elle crée une rupture des habitus des objets de cette chaîne (les élèves), habitus tout aussi nécessaires à son fonctionnement. Et surtout elle va devenir dangereuse si les parents se mettent à l’apprécier parce qu’alors l’appréciation risque de signifier désapprobation des autres pratiques.

Dans toutes les « affaires » (2) que j’ai suivies et décortiquées, sans aucune exception, il y a l’ingrédient d’un ou plusieurs collègues qui ont savonné la planche quand ce n’était pas jeter de l’huile sur le feu. Pas ouvertement, bien sûr. Par les petites phrases « votre enfant est en retard mais il n’a pas fait le programme l’an passé », par les silences qui en disent long, les « je ne peux rien dire, c’est un collègue », les sous-entendus innocents, et parfois plus ostensiblement dans les conversations privées avec les parents contestataires allant jusqu’aux « conseils » bien intentionnés « Ecrivez à l’inspecteur mais ne dites pas que c’est moi ». C’est encore plus accentué dans les RPI (Regroupements Pédagogiques Intercommunaux) où il est plus facile de se dédouaner sur le collègue précédent de l’autre village et où il n’y a aucun risque de le côtoyer à la récré ou dans la salle des profs (3). Ceci est un fait… soigneusement occulté.

Mais, paradoxalement, je comprends ces attitudes. Comprendre n’est pas excuser. Pratiquement tous les enseignants sont de plus en plus fragilisés. Les certitudes sur lesquelles ils s’assoyaient s’effritent, les demandes de l’Institution ou des parents deviennent plus pressantes, souvent contradictoires. Les fameux « résultats » et leur culte ne remontent pas plus que ne diminue la courbe du chômage. Faire bloc dans l’uniformité des pratiques, c’est aussi s’auto-protéger individuellement. La pédagogie ? Il n’y en a qu’une et c’est la même pour tous, ce qui procure une relative tranquillité, les causes de l’échec de l’école pouvant être externalisées.

Il est rarissime, dans la cour de récré, dans les salles de profs et même dans les réunions, que les enseignants parlent entre eux de pédagogie, de leur pédagogie. C’est dire quelles craintes cela suscite. Bonjour les équipes éducatives ! Que chacun se débrouille et ne fasse pas de vagues qui gêneraient les autres. A l’époque où il y avait des classes de perfectionnement ou de transition, il était courant que les inspecteurs pour débarrasser une école d’un trublion l’incitent très fortement à demander ces classes : « Là, vous ne gênerez personne ! ». C’est encore le cas avec les SEGPA.

Alors ? Alors, au moins dans l’immédiat, il serait temps que l’Institution elle-même admette officiellement et publiquement, même sans trancher, qu’il y a bien deux approches différentes, voire opposées, de l’acte éducatif. Il serait temps que ces deux approches fassent l’objet d’analyses dans la formation, deviennent même le point central de cette formation. Admettons qu’elles puissent encore se discuter (mais cela ne pourra se faire ad vitam eternam) et déterminer un choix professionnel. Il serait temps alors que les projets d’école deviennent des projets éducatifs permettant la constitution d’équipes éducatives basées sur des conceptions pédagogiques clairement affirmées et que ces projets puissent être pérennes, c’est-à-dire que l’obtention d’un poste dans une école soit impérativement liée à son acceptation.

Oui ! Mais ! Oui, mais simultanément il faudra bien que les parents aient alors eux aussi le choix. Pour l’avoir, d’une part il faudra que tout établissement explicite sa conception pédagogique et sa mise en œuvre, d’autre part… qu’il y ait les deux propositions tant qu’il y a encore divergence d’opinions. De la carte scolaire (qui est aussi celle des territoires socioculturels), on passerait à la carte scolaire des pédagogies dans un territoire (4).

Aïe ! Vous allez me dire « concurrence ! », « surtout pas dans le public !», « vous faites le jeu des libéraux ! ». Je ne pense pas qu’il s’agisse de concurrence au sens habituel des résultats. Depuis longtemps il est bien apparu que les parents qui font le choix des pédagogies différentes ne le font pas dans leur grande majorité pour des « résultats » mais essentiellement pour l’épanouissement de leurs enfants. Il s’agit alors d’un choix délibérément citoyen.
Ce n’est pas encore l’école du peuple ? D’accord, mais le peuple, pour une fois, pourra, devra s’interroger, penser.

Bernard COLLOT

(1) Extrait d’un commentaire du billet « un jour, peut-être la révolution »

(2) Les « affaires N » (voir dans questionsdeclasses) se multiplient, pratiquement identiques, avec les mêmes ingrédients, les mêmes potentats de l’administration.

(3) Dans les travaux de Françoise Oeuvrard sur les résultats scolaires (1990) si les classes uniques se trouvaient dans la partie supérieure de la fourchette nationale, les RPI, eux, se retrouvaient dans la partie inférieure. Cette partie du rapport avait été censurée sur l’ordre du ministère d’alors.

(4) La ville de Gand (Belgique) a une partie de ses écoles communales officiellement en pédagogie Freinet. Il est vrai qu’il y a des listes d’attente pour y mettre son enfant et que ce n’est pas pour cela que la ville en augmente le nombre, mais cette restriction est alors un choix politique (municipalité progressiste lors de cette instauration – 1986 -, de droite par la suite) A lire (http://www.gent.be/docs/Departement%20Onderwijs%20en%20Opvoeding/Pedagogische%20Begeleidingsdienst/DOO%20Livre%20du%20colloque%2025%20ans%20enseignement%20Freinet%20%C3%A0%20Gand%20ebook%20pdf%20mail.pdf)

27 Comments

  1. Paul Noël

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Voilà bien un non-dit de l’école. Je peux témoigner comme parent de l’ambiance exécrable créée dans la communauté éducative par ce que vous dites et du rôle qu’y jouent les enseignants majoritaires. Les clans qui se forment ainsi déstabilsant même le village, jusqu’à casser des amitiés. Je ne parle pas des incidences politico-locales ! Notre instit trublion est parti, de guerre lasse. Frustration et amertume pour ceux dont je fais partie qui appréciaient ce qu’il apportait pour mes enfants. Et je ne parle pas de la réaction de mes enfants qui se sont mis çà détester l’école… et ses maîtres. Jusqu’à créer aussi des clans entre enfants comme au temps de l’école confessionnelles ou de la guerre des boutons. Vous les comprenez ces enseignants qui savonnent les planches ? Pas moi !

  2. Philippe RUELEN

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Complètement d’accord. Il faut laisser le choix aux parents ! Ainsi, ils seraient co-responsables et on sortirait de l’ambiance “c’est à cause de …..” (parents/école). On pourrait alors réellement parler de communauté éducative.

  3. Laurence*

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Que les parents puissent avoir le choix ? Mais vous n’y pensez pas ? Les enfants ont le droit d’être protéger de l’influence (forcément néfaste…) de leurs parents ! D’ailleurs, c’est pour ça qu’il y a l’école et que les parents trublions qui osent user de leur droit d’instruire eux-mêmes leurs enfants sont toujours soupçonnés du pire par presque tout le monde, non ?! Alors dans une société, dans un environnement où le micro-choix existant d’opter pour un établissement privé (où les parents, comme c’est bizarre, sont UN PEU plus entendus…) est déjà voué aux pires calomnies, envisagez qu’ils puissent avoir à faire un vrai choix, éclairé en plus, sur le sort de leur progéniture en dehors de leur foyer, c’est juste impossible parce qu’impensable, parce que tout simplement nocif……… pour une immense majorité, des enseignants sans aucun doute, mais aussi des parents, car ne nous y trompons pas : on a (presque !) tous été formés à la même école, non ?!

  4. Chloé Martin

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Il est assez incroyable que les deux grandes types de pédagogie (la traditionnelle et les pédagogies actives) donnent lieu à des guerres même larvées de la part de la majorité traditionnelle. Il est vrai que les Finkielkrault ou autres Brighelli se livrent eux, à la télé, dans les médias à un matraquage tel qu’on se croirait revenu sous l’occupation.
    Je suis d’ailleurs énervée par le tabac que le ministre fait en ce moment pour “les enseignants innovants”. Tous ceux de la pédagogie Freinet et autres ne sont pas des innovants ! Il faudra donc qu’ils aient un label pour être officuiellement innovants… et qu’on leur fiche la paix ? Et qui va leur donner ce label ? L’innovation, elle est à toutes les sauces que ce soit sous la droite ou la gauche. Innovez pouer être plus performants, pour ne pas être délocalisés, pour garder votre boulot et faire grimper le chiffre des actionnaires !
    Ceci dit la solution provisoire que vous proposez (carte des pédagogies) me parait simple à réaliser ! Qu’est-ce qui l’empêche vraiment ?

  5. Fred

    Ne plus passer pour des illuminés !
    D’accord avec le constat : dans les écoles, ce sont plus souvent les collègues qui font obstacle aux pratiques pédagogiques différentes que les parents eux-mêmes.

    Par contre, je ne partage pas l’idée du libre-choix des parents au sein des écoles publiques.
    Pourquoi ?
    1 – Il me semble qu’il n’y a pas “deux” approches différentes de la pédagogie mais une multitudes d’approches et de nuances dans les pratiques pédagogiques des enseignants et que de nombreux autres paramètres peuvent influer le choix des familles. Du coup, le choix devient plus complexe et l’on prend le risque de tomber dans des dérives clientélistes et consuméristes : je mets mon enfant dans l’école A cette année parce que cet instit a des pratiques qui correspondent à mes attentes, l’an prochain je le mets dans l’école B car même si les pratiques sont semblables, l’instit m’est désagréable (et j’ai eu des échos négatifs sur lui !), dans deux ans je le mettrai dans l’école C car ils partent tous les ans en classe de mer, dans trois ans, à l’approche de la 6ème, il y a un instit très traditionnel qui prépare bien les élèves au collège (nombreux devoirs, notation, moyennes…)… Bref, une école à la carte ! (qui ne serait d’ailleurs pas sans poser des problèmes importants en cas de fermeture ou d’ouvertures fluctuantes au gré des envies des familles…

    2 – L’école publique et la multiplicité des pratiques pédagogiques qui y sont proposées est une richesse (en supposant tout de même que les enseignants ne se dénigrent pas trop entre eux et que chacun y a sa place). Elle permet aux enfants de se confronter à des situations différentes et à se déterminer ensuite en fonction de ce qu’ils ont vécu et pas uniquement en fonction des choix faits par leurs parents.

    3 – Aller à l’école, c’est pour les enfants l’occasion de se confronter à d’autres modèles d’éducation que ceux des parents. Il serait dommage de réserver les écoles/classes différentes aux parents qui ont conscience de l’intérêt de celles-ci pour l’épanouissement de leur enfant. On peut imaginer que ces enfants bénéficient déjà à la maison de nombreuses sollicitations émancipatrices.
    A l’inverse, on réserverait les écoles traditionnelles aux enfants dont les parents accordent la priorité aux apprentissages purement scolaires, basés sur des outils et techniques qu’ils ont vécu (subi ?).
    Quitte à distinguer deux écoles publiques, je serais alors plus favorable à proposer l’école la plus éloignée des attentes des familles (bon, je provoque là !)

    L’intérêt de cette proposition pourrait être de permettre à certains enseignants de ne plus être marginalisés et de travailler en équipe, mener un projet collectif, aller plus loin dans leurs pratiques et innovations, avoir la paix pour bosser. Très bien mais…
    …elle dispenserait alors chacun des enseignants et parents des “deux approches de l’école”, de se remettre en cause dans leurs conceptions éducatives et pratiques pédagogiques. Elle enfermerait et conforterait chacun dans ses positions…

    Alors que faire ? Tout dépend…
    …soit on considère que seules les pratiques différentes sont réellement émancipatrices, épanouissantes pour les enfants auquel cas il faut se battre pour que tous puissent en bénéficier et pas uniquement les enfants des convaincus ! Oui mais comment ? 😉

    … soit on considère que la multiplicité des pratiques pédagogiques est une richesse et un ferment à des innovations, recherches, expérimentation auquel cas on essaye de trouver les moyens pour que chaque enseignant et parent ait sa place, sa part de vérité, une écoute, une reconnaissance. Oui mais comment ? 😉

    Bon, pas de réponse à ces questions sinon que la conviction (je peux me tromper) que cette proposition semble effectivement “impensable et nocive” 😉

    Fred

    • Chloé Martin

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Fred, je trouve vos arguments un peu spécieux (amicalement !)
      “Réserver les écoles traditionnelles aux uns, les autres à d’autres…” et vous sous-entendez que pour les autres, ils seraient suffisamment privilégiés à la maison pour pouvoir subir n’importe quoi à l’école. Vous sous-entendez aussi qu’ainsi il n’y aurait qu’une certaine catégorie de parents (en gros les “bobos”) capables de faire un choix. Auriez-vous peu de considération pour les capacités de réflexion de vos concitoyens ? Mais il est vrai que s’ils étaient informés comme le dit BC cela leur serait plus facile de réfléchir et de prendre des risques. Parce que c’est eux plus que vous qui le prendraient alors, qu’ils seraient même obligés de prendre. Il y a bien de tout temps en France cette peur de la réflexion du peuple.
      Si les deux apprioches ne sont pas officiellement admises, l’école restera ce qu’elle est, même avec des innovations. Est-ce que de dire alors que bonne ou mauvaise, tant puis ce sera la même pour tous, c’est l’égalité républicaine ?
      Je comprends le billet de BC comme un appel à admettre enfin qu’il existe deux façons de concevoir l’école et ses finalités. Je sais bien ce qu’il défend, lui, mais comment avancer si cela n’est pas dit, connu, aussi bien des enseignants que des parents ?

  6. Amélie

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Je suis d’accord avec Chloé Martin, Freinet, ce n’est pas innovant (ça fait 80 ans que ça existe) c’est différent.

    Ce qu’il faudrait vraiment c’est davantage de “parents innovants”, c’est à dire des parents qui osent se tourner vers ces pédagogies différentes qu’ils n’ont pas connus eux-même, qui osent clamer haut et fort leur désir de changement et exigent le droit au choix du type d’enseignement qu’ils souhaitent pour leurs enfants mais pour cela il faudrait aussi davantage de “personnels académiques innovants” qui soutiennent leurs enseignants dans leurs démarches, qui communiquent avec eux et les parents, qui cessent d’être hypocrites (“Vous avez la liberté de péda mais si vous sortez des clous, on va trouver un moyen de vous rappeler que ce n’est pas comme ça qu’il faut faire!!!”)

    Le fait qu’il puisse exister des écoles différentes reconnues en tant que telle par l’EN (et pourquoi pas labellisées effectivement peut être par une fédération de parents) ne remettrait pas forcément en cause le rôle des autres écoles. Si les parents ont le choix de l’école, ils ne vont pas changer leurs enfants tous les ans, puisqu’ils l’auront choisie pour la pédagogie, mais il faut des écoles qui proposent tous les cycles et pourquoi pas même en classe unique!!!!

  7. Paul Noël

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Fred, il y a quand même un problème démocratique : les enseignants peuvent choisir, sans avoir à l’expliquer et le justifier une pédagogie traditionnelle ou une pédagogie complètement différente, mais nous parents sommes dans l’obligation de la faire subir à nos enfants. Autrement dit, vous avez le choix et le droit de nous l’imposer. Trouvez-vous cela normal ?
    Je trouve que Bernard Collot pose bien le problème et suggère une solution tant qu’il y aura encore des doutes.

  8. bernard_collot

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Il y a bien deux seules grandes approches pédagogiques : la traditionnelle dont l’origine remonte à Ignace de Loyola, et les pédagogies actives et coopératives. Dans chacune de ces approches, il y a effectivement pas mal de nuances de variétés dans les mises en oeuvre, mais cela n’empêche qu’il n’y a que deux seules conception de l’école et de ce qui doit s’y faire. Non seulement elles concernent la construction des apprentissages mais aussi la socialisation des enfants. Je prends l’exemple de cette “innovation” médiatisée récemment de la “pédagogie inversée”. un prof de science ou de géo fait travailler les enfants chez eux sur un sujet, puis fait en quelque sorte son cours a posteriori à partir des questions soulevées. Cela se situe bien dans la première approche et dans la structure de l’école traditionnelle. J’ai d’ailleurs bien été amusé par la réaction de ses collègues qui ne pouvaient envisager comment eux pourraient faire la même chose en math par exemple ! Et pour cause ! Ce d’autant que ce prof ne pouvait le faire qu’avec des enfants… sachant lire. Oui, on peut bien innover un peu dans l’approche traditionnelle de l’école, mais cela ne peut jamais aller bien loin. Il y a bien deux conceptions radicalement différente de l’école (je ne dis même plus des pédagogies !)

    • Adrien Mascarille

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Me voilà à nouveau surpris par les propos tenus, billet d’envoi et réactions.
      Tout le monde semble admettre que deux tendances se partageraient le marché éducatif : la pédagogie traditionnelle et la pédagogie différente.
      Pour ce qui est de la pédagogie traditionnelle force est de constater que c’est lui rendre beaucoup d’honneur… qu’elle a perdu. Pour l’avoir vécue et le vivre, par enfant interposé, on peut tout à fait dire que tout ça, excusez du mot, est un joyeux foutoir. Ce qui caractérise la “vilaine” école traditionnelle c’est que justement elle n’existe plus, qu’elle n’est plus qu’un ramassis d’incohérences et de chacun pour soi. Pour les parents, c’est une loterie, un coup bien, une année pas bien, il faut s’y faire, c’est comme ça, espérons, etc.
      Si messieurs Brighelli et Finkielkraut renâclent c’est peut-être à regret, c’est certainement de la nostalgie de quelque chose qu’ils ont cru connaître. Je ne crois pas qu’en faire des épouvantails (bien utiles) dispensent les tenants d’une autre pédagogie de s’interroger sur le côté “singulier” et statique de leur proposition. Car là aussi, on ne trouve guère de cohérence, et en tout cas, pas grand chose de pluriel, de collectif. Je lis : “le trublion parti, de guerre lasse…”. Une question vient aussitôt : mais pour aller où ? Un peu plus loin ? Refaire une guerre délassante ? Toujours trublion isolé ? Vieillir ainsi ? Ou fuir autre part ? Encore ? Se “spécialiser” pour ne plus faire classe ?
      On se dit, benoîtement, que font-ils donc à souffrir ainsi ou à se gargariser de leurs idées en butte aux méchants collègues médisants, et qu’il conviendrait simplement de les mettre en relation, ces pauvres trublions isolés, qu’ils se regroupent peut-être ou tentent de le faire. Le veulent-ils ?
      Et pourtant, je lis encore, ailleurs : “Dès 1936, L’Éducateur prolétarien, revue du mouvement Freinet, consacre un numéro spécial sur le projet du ministre de l’Éducation nationale, Jean Zay : « Nouveau plan d’étude français ». Célestin Freinet y propose un grand nombre de réformes portant sur l’organisation de la classe, de l’école et la création d’écoles expérimentales.”
      Je lis aussi : ” Mais ça n’existe pas, les écoles, en France ! Il y a des classes, c’est tout. D’ailleurs, l’administration ne s’y trompe pas, elle appelle ça : classe administrative, c’est-à-dire que toute la gestion de l’éducation nationale est basée sur des classes administratives au niveau élémentaire. Il ne faut pas qu’on nous raconte des histoires sur « les écoles ». À Paris, évidemment, on les a regroupées parce qu’il y a une urbanisation telle qu’on fait rentrer tous les enfants dans une école, dans un lieu avec 10 personnes qui s’en occupent. C’est tout. C’est une organisation. Les écoles, ça n’existe pas, en France. Quand on dit « école », c’est-à-dire un lieu collectif visible, c’est un mensonge. Ce n’est pas vrai. Ça n’existe pas. Nous, on essaye de le faire vivre, cet idéal, mais ce n’est pas l’école, c’est quelque chose, une société apprenante, un lieu apprenant, un espace géré par des adultes, des enfants, un extérieur, un intérieur, avec une porosité là-dedans.”

      Adrien Mascarille

      (1) http://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/33718
      (2) http://www.ecolevitruve.fr/lesarchives/entretien18052010.html

      • Chloé Martin

        Ne plus passer pour des illuminés !
        Je vous fais remarquer Adrien que Bernard Collot dans ses ouvrages ne parle jamais de classes mais d’école. Il me semble bien d’ailleurs qu’il se situe dans le prolongement du mouvement Freinet.
        Je ne comprends pas comment vous pouvez trouver que dans le billet et ses réactions il s’agirait de “se partager un marché éducatif”. J’aimerais que vous m’expliquiez.

        • Adrien Mascarille

          Ne plus passer pour des illuminés !
          Désolé madame Martin. Si le mot “marché” ne convient pas, essayez “panier” ou “monde” ou “guerre” (vous l’employez vous-même ainsi “qu’Occupation”, ce qui semble très exagéré et contre-productif concernant les auteurs que vous citez).
          Je voulais, peut-être, juste exprimer mon ressenti sur l’incohérence que je découvre en vivant, en tant que parent, la réalité des “écoles”. Je laissais libre cours à mon interrogation étonnée sur cet adversaire trop évident : l’école traditionnelle. Qui ne semble pas vraiment exister en tant qu’entité collective et cohérente, de nos jours.
          Cependant je ne crois pas, par ailleurs, qu’il faille se contenter d’un trublionisme permanent et isolé pour rendre possible une autre réalité éducative. Mais qu’il faudrait penser et passer à autre chose de plus “collectif” de plus “urbain” (dans toute l’acceptation du vocable) si l’on a réellement l’envie de faire changer les choses.
          Sinon, cela tient de la posture.
          Je ne remets pas en cause qui que ce soit. Je suis très admiratif des propos tenus et des auteurs rencontrés ou des expériences relatées. Je lis plutôt. Je me documente et tente juste de comprendre, le plus précisément possible, les propositions qui sont faites ici ou là. Je suis en questionnement pas en acquiescement.

          • Chloé Martin

            Ne plus passer pour des illuminés !
            Mon cher Adrien je suis d’accord avec vous sur le terme « incohérence ». Je ne perçois pas non plus de cohérence dans ce que propose Peillon. Mais pour qu’une cohérence s’instaure, il faut bien que des cohérences soient proposées. Collot explique dans ses ouvrages que la logique du système éducatif actuel est faite pour une approche traditionnelle et que de ce fait les approches différentes ont des difficultés pour s’y insérer. Elles « troublent nécessairement » et les autres enseignants, et les parents. Lorsque nous discutons d’école et de nos enfants avec mes amis, nous avons tous des opinions différentes en dehors que partout il y a le prof que l’on apprécie ou celui qu’on n’apprécie pas, question de chance. Mais nous n’avons que des opinions ou des convictions ! Celles et ceux qui avec moi voudraient une école différente n’avons pas de concret sur lequel nous appuyer puisqu’il n’y en a pas dans notre proximité donc où nos enfants poureraient aller!
            BC dans son billet (dans ce que j’en comprends) propose que, dans l’immédiat, des écoles dans une autre approche puissent devenir cohérentes, exister, être choisies. Ce qui répond à ce que vous dites « je ne crois pas, par ailleurs, qu’il faille se contenter d’un trublionisme permanent et isolé pour rendre possible une autre réalité éducative ». Cela ne rendrait pas bien sûr le système éducatif cohérent puisqu’il ne peut être bâti sur deux logiques, mais le serait-il moins que maintenant ? Il y aurait au moins un premier pas de fait. S’il n’est pas fait, l’incohérence risque de durer et de s’accentuer.
            Je comprends mieux la pertinence des questions du premier billet de BC et le fait que nous n’y avons pas répondu vraiment en ne sachant pas trop « comment envisager… ».
            « Cet adversaire trop évident : l’école traditionnelle ». Je crois que c’est pour l’instant plutôt le l’inverse, ceux qui sont traités d’adversaires (trublions) ne sont pas dans l’école traditionnelle, même rénovée et encore plus incohérente comme vous le dites. Mais j’avais cru comprendre que ce site était consacré à la réflexion et à la réalisation d’une autre école, donc qui n’aurait plus rien à voir avec l’école telle elle est. C’est pour cela que je le lis… et que j’y passe beaucoup de temps ! Tu es encore sur internet me dit ma fille !

  9. Laurence*

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Fred, je passe sur l’ensemble du message qui illustre si bien le mien… !

    Mais je reviens sur ça : “Bref, une école à la carte ! (qui ne serait d’ailleurs pas sans poser des problèmes importants en cas de fermeture ou d’ouvertures fluctuantes au gré des envies des familles…” Comment croyez-vous que vivent donc tous ces professeurs d’activités extra-scolaires, culturelles, musicales, sportives, etc. ???? Ils adaptent leur(s) activité(s) en fonction de leur capacité à “attirer” et à “conserver” l’intérêt de leurs élèves… Est-il vraiment aussi scandaleux que ça d’attendre la même chose de la part des enseignants de l’école publique ?

    Paul Noël a raison : il y a un sacré problème même ! On vous finance et on a seulement le droit de la fermer ?!

  10. Fred

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Chloé, mon message peut te sembler spécieux surtout si tu en fais une telle interprétation 😉
    J’ai une grande considération des capacités de réflexion de mes concitoyens pour peu qu’on leur permette d’exercer justement cette réflexion et que celle-ci puisse être alimentée par d’autres vecteurs que les grands médias et déclarations ministérielles.
    Faire un choix à priori d’école, de pratique pédagogique peut justement dispenser les parents de cette réflexion et c’est cela que je trouve regrettable.
    Dans ma petite école rurale, j’ai des parents qui déscolarisent leurs enfants dès qu’ils arrivent dans ma classe, mes pratiques différentes leur faisant peur. Je regrette qu’ils fassent ce choix sans même avoir pris la peine de me rencontrer ou de me confier leur enfant. Certains parents sont sceptiques, ont besoin d’être rassurés, sont inquiets : soit ils cèdent à la facilité et vont ailleurs, soit ils partagent avec moi leurs inquiétudes, désaccords et nous essayons de trouver ensemble des solutions pour que tout se passe au mieux.
    Enfin, est-ce avoir peu de considération pour les parents que d’affirmer que certains sont plus à l’aise pour rencontrer l’instit et lui dire de façon constructive ce qui ne convient pas ? que certains sont plus impliqués et pointus sur cette question de l’école ?

    Paul, tu écris : « les enseignants peuvent choisir, sans avoir à l’expliquer et le justifier une pédagogie traditionnelle ou une pédagogie complètement différente, mais nous parents sommes dans l’obligation de la faire subir à nos enfants ».
    Es-tu certain que les enseignants font le choix de la pédagogie traditionnelle ? Pour moi, c’est plutôt un non choix lié à la difficulté pour eux de concevoir autrement l’école, plutôt qu’un véritable engouement pour un modèle à l’ancienne.
    Encore une fois, si nous sommes convaincus que l’approche traditionnelle est nocive, ne lui laissons pas continuer d’exister en abandonnant enseignants et parents qui auraient fait ce choix ou non choix… Travaillons ensemble, construisons….

    Laurence, tu écris : « On vous finance et on a seulement le droit de la fermer ? ». C’est qui ce ON ? Rassure-moi ce ne sont pas les parents ? ça c’est le cas uniquement pour certaines écoles privées mais pas pour l’école publique ! Le financement n’est pas assuré uniquement par les utilisateurs mais par l’ensemble des citoyens. L’école n’appartient donc pas plus aux enseignants qu’aux parents non ?
    C’est un outil au service de la société. Si cet outil fonctionne mal, changeons-le…
    A mon sens, une école à la carte ne sera pas en mesure de porter une transformation réelle. Au mieux elle permettra (plus qu’actuellement ?) des expérimentations mais ne risque-t-on pas de s’en satisfaire et de laisser l’école traditionnelle perdurer…

    • Paul Noël

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Tu dis Fred “Es-tu certain que les enseignants font le choix de la pédagogie traditionnelle ? Pour moi, c’est plutôt un non choix lié à la difficulté pour eux de concevoir autrement l’école”, cela rejoint ce que dit Adrien un peu plus haut, “du n’importe quoi” ! En somme ils ne seraient pas convaincus de grand chose ! Si c’est exact, je ne vois pas tellement quoi attendre du “travaillons ensemble” ! Je rejoins Chloé, nous voudrions bien pouvoir faire aller nos enfants dans quelque chose de cohérent, et dont nous pourrions juger de la cohérence, choisir ! Paut-être est-ce parce que nous ne sommes pas enseignants !
      En même temps, tu dis bien à quel point tu ne peux pas toi-même appliquer une pédagogie différente si tu n’as pas des parents qui veulent travailler avec toi. J’apprécie le fait que cette pédagogie se fait avec les parents. Est-ce alors parce que tu te complairais dans cette difficulté que tu ne peux pas envisager qu’il y ait la possibilité de choisir ? Je me doute bien que non ! Si deux propositions pouvaient être offertes aux parents et aux enseignants, le non-choix deviendrait plus difficile même si ce n’est pas à coup,sûr le bon choix ! Le non-choix, c’est la plaie de notre société.

    • Laurence*

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Fred, ce ON, ce sont les citoyens, oui, certes… dans leur grande majorité parents (futurs, actifs ou “retraités”)…… et qui n’ont donc jamais leur mot à dire…

      L’école au service de la société ? Bah, le voilà le loup… Je pensais qu’elle était au service des enfants… vous savez, dans le cadre de ce fameux “Droit”…. qui se transforme donc en devoir, en obligation….. Hop ! La belle entourloupe ! Parents…. et enfants privés de parole et de choix…

      Quant à ce non-choix dont tu parles, je suis toujours super étonnée… On recrute des gens à bac +3, +4, +5, et ce sont des gens qui ne savent pas faire de choix ? Des gens qui n’ont pas la curiosité intellectuelle de creuser ce que d’autres ont dit, ont fait, font, pour tenter de VRAIMENT résoudre les problèmes auxquels ils sont tous confrontés (“échec scolaire”) ? Non, je n’y crois pas. C’est bien un choix qu’ils font… Celui du “pas de vague”… Il se comprend, mais il faut quand même l’assumer en tant que tel !

  11. Fred

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Je pense que ces collègues ne sont pas perdus. Le “tous capable mais pas tous au même moment” s’applique à tous, enfants comme adultes.
    C’est bien par le travailler ensemble que ces collègues pourront faire évoluer leurs pratiques qui d’ailleurs sont de plus en plus difficiles à mettre en oeuvre.
    S’ils ne transforment pas leur pédagogie par choix, ils le feront par nécessité, faut-il encore qu’il aient connaissance des autres possibles et cela passe notamment par la formation…

    Pour mon cas perso, je ne me complais pas dans la difficulté et l’affrontement. C’est à mon sens contre-productif de bosser avec les parents contre soi (il m’a fallu l’expérimenter pour l’affirmer)…
    J’ai lâché pas mal des pratiques qui inquiétaient les parents et du coup j’ai retrouvé ces 3-4 dernières années une paix.
    L’esprit est resté le même mais les pratiques sont plus traditionnelles et rassurantes pour les familles.
    Après, en fonction des années, des groupes d’enfants et de parents, je vais plus ou moins loin dans la mise en oeuvre. Bref, j’essaye de prendre parents/enfants où ils en sont et de les mener doucement ailleurs.
    C’est plus confortable et efficace pour moi mais également très frustrant car les évolutions sont très (trop) lentes…

  12. Chloé Martin

    Ne plus passer pour des illuminés !
    « J’ai une grande considérations des capacités de réflexion de mes concitoyens pour peu qu’on leur permette d’exercer justement cette réflexion … ». Mais c’est ce qu’on demande justement !
    « Faire un choix a priori d’école, de pratiques pédagogiques peut justement dispenser les parents de cette réflexion ». Alors là vous m’époustouflez ! On peut faire des choix sans réfléchir, sans s’informer ? Et quand on a fait un choix on ne réfléchirait plus ? On se désintéresserait ? On ne serait plus capable de critiquer ? A moins que la critique ne soit plus alors acceptée une fois le choix fait !
    Mais je conviens que rien ne soit évident et facile. Bernard Collot a le chic pour poser les problèmes !

  13. bernard_collot

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Ce qui est simple n’est jamais évident. On confond souvent complication et complexité. La complication c’est vouloir mettre la complexité dans des cases. A l’inverse, la simplexité (Alain Berthoz) consiste à arriver à un objectif par des chemins détournés et tâtonnés.
    Lorsque l’on modifie une donnée du problème, le contexte suivant n’est plus le même et d’autres possibilités apparaissent. On appelle aussi cela une praxis.
    La transformation de l’école est éminemment complexe, tant il y a de paramètres, tant il y a d’opinions. Vouloir tous les prendre en compte d’un bloc est un défi impossible.

    Si l’analyse systémique consiste à situer un problème dans tout le contexte dont il dépend (complexité), l’action systémique consiste à introduire une petite modification dans le système qui provoquera une autre auto-organisation dudit système (ou ne la provoquera pas, il faut alors en imaginer une autre, c’est la simplexité). L’anticipation sur les effets attendus relève toujours de l’hypothèse. La simplexité admet l’incertitude comme une nécessité dynamique.

    Ce que je propose dans le billet n’est pas très compliqué, même si dans l’immédiat cela n’est pas réalisable partout (l’information, elle, peut être immédiate et générale). Mais on peut faire l’hypothèse que c’est à partir de cela que peuvent apparaître des modifications des opinions, que peuvent naître ou s’étendre des aspirations, des demandes différentes, que ce soit du côté des parents ou des enseignants. On modifie légèrement le contexte. En même temps on rend possible et cohérent ce qui existe depuis un siècle. L’infime poignée d’établissements qualifiés “d’expérimentaux” (pour éviter d’avoir à les généraliser !) démontrent bien l’efficience de la cohérence et que ce n’est pas parce qu’elle est différente qu’elle est inadmissible. J’aime beaucoup l’idée de cohérence exprimée par Adrien. Avant que l’on arrive à un système éducatif cohérent, il faudrait que chaque morceaux du système aient leur propre cohérence et surtout l’explicitent, l’affichent. Ce qui n’est que le projet d’école mais qui ne se contente pas de contenir quelques petits trucs annexes qui ne mangent pas de pain.

    Il est évident que bien d’autres actions simplexes peuvent être réalisées. Imaginez !

    • Adrien Mascarille

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Il est à peu près sûr que l’impressionnisme éducatif a de beaux jours en perspective. C’est à coup sûr par petites touches (dominos ou boules de neige…) que le gros du système bougera. Il faudrait donc chercher à décrire, à se faire expliquer, à découvrir, à relater les petites choses qui permettraient une évolution (étant bien d’accord qu’une évolution est une révolution qui n’en a pas l’R).
      Par exemple :
      1/ expliciter ce qui serait applicable, essayable, faisable, puisque déjà réalisé, de la classe unique à l’école unique (à 4, 5, 10 classes). Non pas “dans” la classe mais précisément dans les interstices, dans les intervalles, dans les marges du lieu “classe”. Dans l’école donc. Couloirs, récréations, accès aux cabinets, repas, entrées, sorties, déplacements… L’école globale, unifiée, cohérente étant bien l’objectif. J’ai bien compris que la classe unique c’est l’école réalisée en tant qu’entité collective réelle. Ce qu’il faut donc arriver à démontrer, c’est que c’est bien la même logique qui doit être à l’oeuvre pour ce qui concerne les lieux d’enseignement plus densifiés. Reste à répertorier les situations au sein desquelles enseignants, parents et enfants peuvent se trouver à même de vivre ensemble (et faire vivre) ce lieu pour le bien-être de tous.
      2/ On peut imaginer même de réclamer l’usage étendu des espaces éducatifs, au-delà du temps scolaire, pour des activités ouvertes à la population.
      3/ J’ai aussi remarqué comment l’accueil physique des parents par les enseignants (tous ou beaucoup d’enseignants en tout cas), le matin, est important. Cela doit avoir à voir avec une sorte “d’envisagement” des individus entre eux, je veux dire : je peux être en empathie plus facilement avec quelqu’un dont je croise le regard, partage un sourire, un mot. Cela doit pouvoir faciliter l’échange présent et futur.
      4/ En farfouillant sur le net, j’ai également trouvé cet encart intéressant, notamment l’article 34 sur l’expérimentation. Il serait utile à diffuser me semble-t-il.
      http://www.education.gouv.fr/bo/2005/18/MENX0400282L.htm

      • bernard_collot

        Ne plus passer pour des illuminés !
        Vous avez raison (de mon point de vue !) sur tout.
        – l’explicitation dont vous parlez a bien été faite et j’en ai fait ma petite part. Mais
        * elle dépasse rarement les cercles d’initiés
        * elle est systématiquement marginalisée, y compris par les initiés : Oui ! Mais ! c’est parce que c’est une classe unique ! c’est parce que c’est à la campagne ! c’est parce qu’il y avait des parents différents ! c’est parce que…. On ne peut pas faire comme en Finlande parce qu’eux n’ont pas notre masse… d’immigrés !
        * elle est disparate. Elle demande du temps à ceux qui sont le nez sur le guidon.
        * elle n’est pas estampillée par les “docteurs”, reproduite par ceux qui ont les moyens de la diffusion.
        * finalement elle n’est même pas contestée, elle est ignorée.
        Il n’empêche que des enseignants travaillent et échangent depuis longtemps à partir de ce que des classes uniques ont fait émerger en sortant du cercle réduit d’une “méthode” et de l’unité classe. Ce qu’ils mettent à leur tour en exergue, c’est que oui les logiques sont bien valides mais aussi quelles sont les conditions pour qu’elles puissent être mise en oeuvre. Ces enseignants devraient être sollicités. Par qui ? Pas par l’Education nationale puisqu’ils troublent la logique du système et les positions de chacun dans ce système. Par vous donc !
        Les agriculteurs biologiques ont mis des années pour ne plus passer pour des illuminés (leurs démarches, leurs tâtonnements, les principes sur lesquels ils s’appuyaient, leurs difficultés sont identiques à ce qui a fait la pédagogie Freinet par exemple). Mais qui a contribué à cette validation ? Certainement pas le ministère de l’agriculture, les multinationales de la consommation, les multinationales de produits phytosanitaires ou d’engrais, même pas au début les scientifiques ! Ce sont les consommateurs ! Jusqu’à, pour une infime partie, à travailler conjointement avec eux dans par exemple Nature et Progrès. C’est peut-être une leçon.(1)

        “On peut imaginer même de réclamer l’usage étendu des espaces éducatifs…” Oui, cela a été fait ! Sans aucun problème y compris pendant le temps scolaire. Mais cela demande une transformation radicale des relations école-population. Donc une transformation aussi des postures des enseignants. Vous avez raison : ce qui peut modifier les postures peut aussi engager d’autres processus de transformation.

        “J’ai aussi remarqué comment l’accueil physique des parents par les enseignants …” (dans la classe, dans l’école). Oui encore ! Ce d’autant que les raisons de cette nécessité sont encore plus nombreuses (voir “ouverture de l’école aux parents” dans “l’école de la simplexité”). Ce peut être un levier important, peut-être même le premier, ne serait-ce que parce que l’école quoique l’on dise ou veuille, ce ne peut être que de l’humain.

        Il y a donc pas mal d’ingrédients simples sur lesquels on pourrait agir, même dans l’immédiat, et vous en trouverez beaucoup d’autres.

        (1) Quoiqu’une fois la valeur de l’AB reconnue, elle est actuellement en partie vidée de son essence et de ce qu’elle portait en transformations, y compris sociales, dès que l’économie de profits s’en empare.

  14. Mélodie

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Une illuminée! Oui parfois j’ai ce sentiment.
    Je l’ai surtout parce que je cherche, j’expérimente, je change ma pratique petit à petit et mon plaisir d’aller à l’école est immense!
    C’est surtout ce plaisir qui fait de moi une illuminée car à l’école j’entends beaucoup de soupirs, de doléances.

    Mélodie

    http://journaldeclasse1.canalblog.com/

  15. bernard_collot

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Un débat auquel je viens de participer confirme bien ce que je soulevais dans le billet : les enseignants en grande majorité refusent d’aborder la pédagogie, encore plus quand c’est publiquement. Il y a un blocage énorme, et même s’il s’explique psychologiquement, il faudra bien qu’il soit rompu, au plus vite.

  16. isabelle

    Ne plus passer pour des illuminés !
    Je viens de lire attentivement le débat. J’ai également connu une mise à l’écart voire remise en question en conseil des maîtres mais dans une grosse école de banlieue. Lassée par mon impossibilité à changer les pratiques, je me suis dirigée vers l’éducation spécialisée et je suis actuellement “maître E”, ce qui me favorise une marginalisation institutionnelle. Evidemment l’institution en question fait tout pour supprimer ce métier. J’ai modifié mon approche de mes collègues, j’essaye un questionnement différent : Qu’est-ce qui te gênes dans l’école ? Quel est ton objectif prioritaire pour l’ensemble de ta classe ? Penses-tu que les enfants sont heureux dans ta classe ? Crois-tu que tu enseignes mieux qu’avant ? Quels sont tes critères pour en juger ? Naturellement , je pose toutes ces questions dans le cadre d’échanges cordiaux en salle des maîtres et je laisse à chacun le loisirs de parler ou non. Je tente simplement d’aider des collègues à prendre conscience de ce qu’elles ou ils représentent pour les enfants et leurs parents. J’espère toujours que certains d’entre eux se poseront pour réfléchir. La semaine dernière une collègue m’a demandé de lui envoyer le patit documentaire sur l’école Freinet qui était passé à la télé ! Depuis 10 ans que je travaille vec elle, c’est la première fois qu’elle semble s’intéresser à une pédagogie active ! Gardons espoir !
    Isabelle

    • Bernard Collot

      Ne plus passer pour des illuminés !
      Vous avez raison : gardons espoir ! Je garde moi-même espoir chaque fois que je lis une réaction comme la vôtre, chaque fois que je vois ou lis et découvre partout (donc aussi sur questionsdeclasses.com) qu’il y a quand même un nombre qui commence à devenir significatif de personnes, parents, enseignants et autres impliqués dans d’autres regards, dans d’autres pratiques. Plus ils seront visibles, plus vous serez visibles, plus il y aura de chances de voir les lignes bouger. Ce qui est difficile, c’est… le temps ! Vous le soulignez fort justement. Comment accélérer le temps ?
      Au passage je vous signale une proposition de Hubert Montagner que j’ai publiée dans questionsdeclasses avec son autorisation : http://www.questionsdeclasses.org/?Vacances-scolaires-une-proposition ou sur mon blog http://education3.canalblog.com

    • Laurent Lançon

      Ne plus passer pour des illuminés !
      On n’imagine pas, plus, l’influence du monde dans lequel nous vivons et qui formate les esprits. Que c’est difficile de faire bouger les lignes. Ca prend du temps. Ceci nous éclaire sur le caractère hautement alternatif de notre démarche de transformation de l’école qui va bien à l’encontre de la pensée commune et qui peut entrainer des réactions violentes mais naturelles. Le chantier est immense. Ca on le savait. Il n’y a que des vérités. Chaque protagoniste a sa vérité. Des vérités qui cohabitent,qui s’opposent sans qu’il y ait possibilité de médiation pour faire bouger les lignes et avancer. Se comprendre. Bataille de tranchées. Verdun.

      Il faut avoir conscience de cela. Nos pratiques doivent à mon sens être construites progressivement avec les parents et les enseignants pour qu’elles puissent montrer leur pertinence et leurs forces sur la durée. Le temps joue pour nous. Il faut construire progressivement la structure pas à pas en tenant compte du milieu. Sans ça, on se heurte à une opposition violente et frontale, bien légitime car les parents n’ont alors plus de branches pour s’accrocher et comprendre la classe. Ce sont leurs enfants avant tout et ils réagissent ainsi par inquiétude et angoisse. Rien ne peut arrêter ce sentiment naturel d’instinct de “survie” et de protection. On peut bien faire tout ce que l’on voudra, on n’ira pas loin si on n’implique pas les parents dans la transformation de l’école. On y arrivera ensemble.

      A mon avis, l’important ce n’est pas l’état de la classe mais bien là où on veut arriver. L’important, c’est la démarche qui prend appui sur l’environnement, le milieu pour proposer une adaptation temporaire à celui-ci et qui évoluera petit à petit par petites touches tel le chercheur qui isole les variables et joue avec pour analyser les effets de ses expérimentations. C’est là qu’il faut être “rusé” pour naviguer en douceur et transformer le milieu tranquillement. Ce qui n’empêche pas “les coups de grisou” par moment. Alors on réduit la voilure pour passer au mieux le grain. C’est alors temporaire.

      Il faut savoir se mettre en sécurité, ne pas s’isoler, quand les conditions ne sont plus réunies, ce qui n’empêchera pas de repartir de plus belle ensuite 😉 Il faut se savoir “se laisser le temps”.

      C’est mon analyse à partir de mon vécu.

      Laurent

Répondre à Adrien Mascarille Annuler la réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *