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La solidarité, ça (s’)apprend! (extrait)

Je n’ai jamais su enseigner sans engagement, je n’ai jamais pu être engagé sans apprendre – dans la double acceptation que la langue française donne à ce mot : apprendre à et apprendre de… c’est là, peut-être, le cœur de ce combat social et pédagogique que je mène depuis plus de quarante ans.

Alors oui, « cent fois sur le métier… », la formule est presque éculée quand on évoque ce double engagement. Elle l’est aussi quand il s’agit de l’activité avec et pour les élèves ou les parents étrangers privés de droits.

La solidarité, un métier ? Si l’impulsion éthique et la morale raisonnée sont à la base de notre action, elles ne sont qu’un point de départ. Comment va-t-on faire pour ressouder les liens, voire les créer car ils n’ont jamais beaucoup existé malgré le slogan « Français, immigrés, même patron, même combat », entre les catégories populaires ?

Et l’école, quel rôle peut-elle jouer ?

À mon avis, un rôle immense. Et cet ouvrage entend en esquisser les nombreuses facettes, à la lumière d’une expérience à la fois singulière et universelle.

La réussite exceptionnelle de cette artiste de théâtre, Claire Audhuy, qui fait se rencontrer au printemps 2017, à Hénin-Beaumont, des collégiens, enfants de migrants et ou d’électeurs frontistes1, montre que c’est possible. Il faut « simplement » le faire, en s’appuyant sur cette connaissance infinie (sans frontières !) de la matière humaine, du terrain social, où l’on avance de surprise en surprise. Cela demande une certaine souplesse : il n’y a pas de programme fixé à l’avance, pas de « progression », pour reprendre le jargon scolaire. Mais beaucoup de préparation quand même, du matériau « sous la main » et dans les neurones. Il faut connaître la loi sans prétendre devenir juriste, pouvoir donner un coup de pouce scolaire ou savoir à qui passer le relais, quêter inlassablement les avis de celles et ceux aux côtés desquels on agit. Cela permet de passer de cette « compassion » que nous reprochent avec mépris ceux qui voient sans s’émouvoir des familles et des enfants dormir sur le trottoir, à cette empathie outillée que permettent l’action quotidienne et la réflexion collective.

Oui, la solidarité est un métier, avec ce que cela signifie de lassitude à certains moments, d’erreurs, mais aussi de ténacité pour réaliser de la belle ouvrage.

Pour en savoir plus, Jean-Pierre Fournier, Apprendre, solidaire, aux côtés des élèves migrants, Hors série de la revue N’autre école, automne 2019.

Les migrants, l’école?

Hier les parents d’enfants scolarisés, aujourd’hui les jeunes isolés. Les premiers risquaient l’expulsion, les seconds ne sont pas toujours admis à l’école. Dans les deux cas l’école est au centre, comme premier ancrage, comme espoir, comme terrain d’appui aussi.
Ce sont ces aspects, où fraternité et apprentissages se mêlent, qui sont évoqués ici. car si on sait l’importance de la migration et son caractère difficile voire dramatique, on connaît moins les coulisses de la solidarité ; et la défense collective, comme l’accompagnement, avec toutes les questions qui vont avec, méritent d’être connus, pour comprendre et agir plus efficacement.
L’auteur en témoigne par son parcours: enseignant en collège, il a découvert qu’on pouvait agir en faveur des élèves étrangers. Aujourd’hui comme hier, avec ceux qui défendent les droits humains dans la modestie du quotidien, il accompagne, enseigne – et apprend.

N’Autre école, qui ne sépare pas réflexion et compte rendu de pratiques, publie ce document affirmant que l’égalité ne connaît pas de frontières.

Un hors-série à commander sur notre librairie

1Non sans réactions de la mairie d’extrême-droite !

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