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La rage contre le règne de l’argent, John Holloway

[**Tout ce qui nous reste : la rage*]

Dans un livre précédent, J. Holloway, politologue proche des zapatistes, entendait penser la révolution à partir des cris de révolte (1). Dans ce petit essai aussi clair que percutant, il part de la rage contre le temps présent, ce monde qui nous ne ressemble pas.

Mais quel est ce monde au juste ? C’est celui du règne de l’argent qui nous déshumanise et dévaste la planète.

L’argent étend toujours davantage son emprise en se nourrissant du travail dont il tire sa substance. Aussi est-il essentiellement question d’un rapport social basé sur la destruction des relations humaines. D’un processus historique qui s’est autonomisé et s’est retourné contre l’humain et non d’une simple affaire de personnes qui domineraient le monde et dont il s’agirait de se débarrasser.

J. Holloway insiste bien sur le point que nous sommes face à un phénomène historique. Des sociétés humaines ignorent d’ailleurs ce type de relations sociales et s’organisent selon une toute autre logique. Puisque qu’il est spécifique à nos sociétés et historiquement produit, cela signifie donc qu’il est possible de s’en libérer à mesure que l’on prend conscience de ce qui nous menace. Si notre rage gagne en force, si la colère grandit et se fait de plus en plus précise, c’est parce que nous reconnaissons toujours plus nettement que notre époque est celle de la généralisation universelle de la marchandise. Des secteurs autrefois épargnés par les relations marchandes sont maintenant en effet rattrapés par l’empire de l’argent : la santé, l’éducation, la culture.

[**Nous sommes la crise*]

Du mouvement des places à Occupy Wall Street, des gilets jaunes à l’insurrection chilienne, la rage claque sur les pavés. Mais l’auteur nous met en garde. Elle est en effet à double tranchant. Chant de liberté, elle peut néanmoins alimenter les passions tristes.

Il n’y a qu’une seule issue : l’abolition de l’argent et la communisation, l’appropriation d’autres espaces et d’autres temps. Sans doute est-il question dans ces lignes de rompre avec l’imaginaire de la marchandise pour habiter autrement le monde. Mais nous ne sommes pas désarmés. J. Holloway aborde les luttes du XXe siècle comme autant d’actions dirigées contre le règne de l’argent. Les services publics étaient ainsi autant de protections érigées contre ce fléau. C’est avec cette histoire qu’il propose de renouer, en la poussant jusqu’à ses dernières conséquences. Maintenant que L’État est devenu la chose du capital et qu’il nous fait la guerre, il ne suffit plus de s’en prémunir, il faut le détruire.

[**Communisons !*]

John Holloway, La rage contre le règne de l’argent, Libertalia (Poche), 2019, 73 p., 5 €.

Note : Changer le monde sans prendre le pouvoir : le sens de la révolution aujourd’hui, éditions Syllepse/Lux, 2008.

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