Conditions de travail dans l’Education nationale :
sans trancher sur le fond, le juge des référés déboute la CGT !
Le combat contre la souffrance au travail et le management
agressif reste plus que jamais d’actualité !
Mercredi 4 janvier se déroulait l’audience du juge des référés au tribunal administratif de Rouen. La CGT éduc’action de Seine-Maritime avait en effet décidé de saisir la justice pour non respect des prérogatives du CHSCT départemental après la tentative de suicide au lycée Val de Seine le 31 août 2016. Le jugement qui vient d’être connu n’est malheureusement pas favorable à la CGT et aux travailleurs de l’éducation. Pour autant, cette décision est tout à fait incompréhensible.
Le juge des référés a en effet considéré que « la cause de danger grave et imminent avait disparu » à la date du signalement du Danger Grave et Imminent le 12 septembre 2016 et en a tiré comme conséquences que la condition d’urgence n’est pas réunie et que le juge des référés n’est pas compétent. Cette décision est grave dans le sens où le juge des référés prend une décision sur l’existence ou non d’une cause de danger grave et imminent postérieurement à la tentative de suicide en absence de tout élément justificatif permettant d’écarter que la cause ayant pu pousser au passage à l’acte du collègue persiste encore. Rien ne permet de dire que les questions d’organisations du travail et de dialogue social dégradé ne perdurent pas et que d’autres collègues ne soient pas en situation de souffrance au travail.
L’utilisation du droit d’alerte pour danger grave et imminent par un représentant CGT du CHSCT le 12 septembre 2016, suite à la tentative d’immolation au lycée Val de Seine, devait obliger l’administration à diligenter sur le champ une enquête du CHSCT afin d’analyser en profondeur les conditions de travail et de mettre en œuvre les mesures supprimant les risques.
Cette décision pose un vrai problème. Si on écoute les responsables de l’administration il n’y a jamais de danger grave en l’absence de victime d’accident et donc les enquêtes à visées préventives sont refusées. Si on écoute le juge, une fois qu’un collègue est passé à l’acte, la cause du danger grave a disparu et il n’y a donc pas d’enquête du CHSCT.
Pour notre part, nous considérons que le seul fait que l’administration ne respecte pas les obligations réglementaires relatives au fonctionnement du CHSCT aurait dû amener le juge des référés à prendre des décisions contraignantes.
Sur le rejet concernant le refus d’enquête pour accident de service (article 53 du décret de 1982), le juge des référés a considéré que l’administration avait deux mois pour donner sa réponse suite au vote d’une enquête en séance du CHSCT le 1er décembre, tandis que le représentant de l’éducation nationale soutenait à l’audience qu’une tentative de suicide ne constituait pas un accident du travail. La CGT rejette cette analyse et réaffirme la nécessité de faire des enquêtes le plus tôt après la survenance des accidents. Néanmoins, la CGT éduc’action considère qu’il était parfaitement légitime d’exiger la tenue de ces deux enquêtes paritaires réglementaires. La CGT éduc’action considère également qu’une enquête administrative menée uniquement par le rectorat – en excluant les organisations syndicales qui siègent au CHSCT – n’a rien d’objectif et est systématiquement en défaveur des salariés et au profit de la hiérarchie. C’est la raison pour laquelle il est indispensable d’obtenir des enquêtes du CHSCT menées aussi par les représentants syndicaux et la CGT éduc’action exige que ce droit soit respecté. Mais depuis la mise en place des CHSCT en 2012, le rectorat de Rouen a systématiquement refusé de procéder à ces enquêtes paritaires, malgré d’autres tentatives de suicide, malgré des accidents du travail graves, malgré de très nombreuses situations de violence au travail, malgré de nombreux conflits avec la hiérarchie, malgré le management agressif qui se répand et malgré sept autres droits d’alerte déposés par la CGT. Pourquoi le rectorat de Rouen continuerait-il impunément à refuser ces enquêtes, alors que dans les entreprises privées, les CHSCT ont l’habitude de mener ce genre d’enquêtes?
Par ailleurs, la CGT et les syndicats qui siègent en CHSCT font le constat que les CHSCT fonctionnent particulièrement mal dans l’éducation nationale, ce que prouvent par exemple le récent refus de réunir un CHSCT extraordinaire malgré des situations de violence au travail avérées au lycée Lavoisier et à l’école Condorcet ; l’absence de règlement intérieur valide du CHSCT ; la rétention d’informations à l’égard des membres des CHSCT, dont la liste des accidents du travail; les délais de transmission de documents de travail qui ne sont quasiment jamais respectés ; le refus d’aborder des situations de travail dangereuses en séance ; le refus de suivre les avis votés en séance par les représentants syndicaux, etc.
Surtout, la réalité de la souffrance au travail et des risques psycho-sociaux est systématiquement sous-estimée et méprisée par le rectorat, et ce malgré l’évidence. Les personnels qui souffrent au travail sont pourtant légion, les militants syndicaux le constatent tous les jours. Partout, dans les écoles, les collèges, les lycées et les services administratifs de l’académie, nous constatons l’impact délétère des nouvelles organisations du travail issues du privé et du management agressif, sur la santé des personnels.
La CGT éduc’action reste donc entièrement déterminée à continuer le travail militant pour alerter sur la dégradation des conditions de travail, pour faire respecter les droits des personnels et pour soutenir sur le terrain les personnels en lutte pour leur santé au travail. Elle examine d’ores et déjà les recours juridiques possibles pour contester les décisions du tribunal administratif.
En tout état de cause, ces décisions du juge des référés ne préjugent pas des décisions qui devront être prises au fond par ce même tribunal, qui ne pourra que faire droit aux demandes légitimes de notre syndicat.
Pour ne pas perdre sa vie à la gagner !
Rouen, le 9 janvier 2017
cgteduc.acrouen[AT]gmail.com
Communiqué de presse de la CGT éduc’action de Seine-Maritime