L’édito de l’Émancipation syndicale et pédagogique n°7, mars 2021
Agir… maintenant
Les élections se profilent. Et avec le printemps, fleurissent les appels à l’“unité de la gauche”, à “agir” et “se mobiliser”… dans les urnes. Soyons clair•es : ce pouvoir est haïssable, et haï par le monde du travail et la jeunesse, il est légitime de vouloir se débarrasser de Macron et de la Ve République y compris par le vote. Mais ce qu’il faut surtout, c’est en finir avec cette politique de plus en plus liberticide et destructrice : et pour cela, ce qui compte avant tout c’est le rapport de forces dans la société, qui ne peut se créer que par le développement des luttes. C’est d’autant plus vrai qu’il y aurait y compris à redire sur la gauche politique, présentée plus ou moins ouvertement par divers•es responsables syndicaux, comme l’alternative indispensable. Ainsi, concernant la loi sur le “séparatisme” : en première lecture à l’Assemblée, un seul des trois (1) groupes parlementaires de gauche a voté contre le projet gouvernemental…
Prenons deux exemples – parmi beaucoup d’autres – qui nécessitent toute l’implication du mouvement syndical.
Tout d’abord, combattre la politique éducative du pouvoir. Dans un contexte où la jeunesse lycéenne comme étudiante souffre comme jamais : conditions d’études indignes, extrême précarité et files d’attente devant les banques alimentaires, liquidation du bac national pour passer au contrôle continu presque intégral… pour la rentrée 2021, ce sont à nouveau des suppressions de postes, de dédoublements, de classes qui sont au programme alors qu’aujourd’hui un plan d’urgence pour l’école publique serait indispensable.
Face à cela des débuts de résistance s’organisent : grèves des AED et mobilisations des AESH, grèves d’établissements, mise en place d’AG inter-établissements dans certains endroits, etc. Le rôle des syndicats est d’y participer, de les coordonner pour que les résistances ne restent pas isolées.
Ensuite, une question plus globale : aujourd’hui ce n’est même plus la liberté de manifester qui est menacée, mais la liberté tout court. Celle d’aller et venir, de critiquer le pouvoir, de refuser de faire allégeance… La loi “sécurité globale”, celle sur les “principes républicains”, les décrets sur le fichage des militant•es, écornent y compris des conquêtes démocratiques centenaires : ainsi la liberté d’association indépendante de l’État (loi 1901), et la loi de 1905 établissant la laïcité (ni intrusions religieuses, ni Concordat).
Avec l’“état d’urgence sanitaire” (qui ne protège en rien la santé de la population), ce pouvoir entend se donner tous les droits : celui de nous contrôler à chaque instant, de dissoudre toute association qui lui déplairait, de multiplier à loisir mesures de surveillance et d’emprisonnement. Défendre les libertés c’est donc aujourd’hui se battre pour l’abrogation de toutes ces mesures, rassembler les colères et les faire converger contre cette politique, par exemple par une grande manifestation nationale préparée à la base et dans l’unité : tel est le rôle des organisations entendant défendre les intérêts des travailleur•euses.
Alors oui, il s’agit de mener les luttes nécessaires ici et maintenant, car c’est maintenant que cette politique destructrice doit être combattue et défaite.
Quentin Dauphiné
(1) France Insoumise, PS, PCF et apparent•és.