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A quoi sert d’insérer dans une société qui n’en est plus une? KroniKs des Robinsons 527 du 3 Octobre et Graines d’Orties

Pendant les 30 glorieuses il était apparu que le travail social, mais aussi le but de l’éducation (et de la scolarité au passage) pouvaient se limiter à insérer un individu dans la société. La société ferait le reste. Il était admis que l’enfant , orienté vers la « vie active », en aurait une de vie, et « active en plus »… De même les grandes institutions expérimentaient qu’il suffisait d’appartements en ville pour leurs bénéficiaires pour que ceux ci se socialisent, créent des liens, « s’intègrent ».

Basaglia en Italie, Manonni en France, pouvaient expérimenter que les fous pouvaient aussi s’intégrer et quitter le statut infamant du traitement psychiatrique en trouvant à s’intégrer dans un milieu de travail. Partout on sectorisait, on créait des « antennes », des « appartements », on « désenclavait ». Les institutions avaient fait une découverte fondamentale, il suffisait qu’elles cessent de dé-socialiser pour que la société re-socialise.

Aujourd’hui nous vivons dans la période décrite par Robert Castel comme celle de « l’individu noir ». L’individu moderne est doublement dé-socialisé, dans son propre milieu, sa propre famille, son propre réseau d’une part qui se rétrécit au risque de ne plus pouvoir le « tenir », au même moment où la société elle même desserre ses filets de protection sociale, et que toutes les sécurités qui y avaient cours, tombent, une à une. En bref « l’insécurité » sociale a remplacé la sécurité sociale (augmentant au passage la demande et le besoin de la compensation du « sécuritaire »).

On a eu beau imaginer une suprême astuce, à savoir qu’il ne fallait plus prodiguer l’insertion, mais l’inclusion, on ne fait qu’inverser le sens d’un problème qui demeure le même. Que l’on inverse le sens de l’effort, que l’on dise que c’est à la société elle même qu’il revient aujourd’hui la charge d’inclure celui qui est en situation de handicap ou en danger d’exclusion, ne change rien au problème. A quoi cela peut donc bien servir si c’est la société elle même qui n’en est plus une, qui ne fait plus société?

La Pédagogie Sociale ne se contente pas d’idéaliser la société. Elle ne borne pas son action à sa lisière , à sa frontière. C’est une pédagogie qui est basée sur le constat qu’il ne suffit pas d’être au coeur de la société pour être socialisé; nous savons la solitude d’appartement, de chambre d’hôtel. Nous connaissons la solitude dans la famille, dans la ville, le quartier; la solitude du travailleur pauvre, du précaire, du parent, …

Elle est basée sur la certitude qu’il ne suffit pas de mettre ensemble familles et personnes pour constituer un milieu social. Etre côte à côte ne crée aucune relation véritable si on n’y ajoute pas une vie et un travail en commun.

De là, naissent tant de déconvenues. Il ne suffit pas de faire se côtoyer les cultures pour vaincre le racisme, de faire se côtoyer les sexes pour vaincre le sexisme, ni les âges pour venir à bout de l’âgisme. L’idéal laïc, républicain, mixte a prouvé ses limites.

Non, en Pédagogie Sociale, il revient au coeur du travail des pédagogues de mettre en chantier et créer le milieu lui même. Le « faire société » commence par un « faire communauté » dans le cadre d’un travail de transformation et d’amélioration de l’environnement social, économique, éducatif , démocratique, … inconditionnel, local et immédiat.

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