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Une méthode de lecture ministérielle pas anodine…

Depuis l’arrivée de Jean-Michel Blanquer, la méthode syllabique a tous les honneurs et il cherche le « bon manuel ».
A l’automne 2020, discrètement, un manuel de lecture est distribué à 10 000 élèves dans 350 classes de dix départements. La méthode sera évaluée par un laboratoire de recherche. Les résultats devront paraître en 2021.
Ce nouveau manuel sera-t-il estampillé « Éducation nationale » ? Sera-t-il fortement conseillé par les inspecteurs ?
Imposer une méthode d’apprentissage est déjà en soi un déni d’éducation, réduisant l’acte d’enseigner à un simple geste d’exécution, à une somme de techniques et de recettes.
Mais en plus, lorsque la méthode demandée enferme l’enfant dans le répétitif, la passivité, au détriment de son désir d’apprendre, de sa curiosité, de son enthousiasme… on peut penser que l’idéologie politique n’est pas loin.
En effet, préférer une méthode d’apprentissage de lecture où l’enfant est exécutant à une méthode où l’enfant est chercheur est un choix politique, celui d’empêcher de penser, d’ôter le désir de questionner, de comprendre, de savoir, d’imposer l’obéissance passive en contenant l’enfant dans des exercices répétitifs et mimétiques qui réduisent d’autant les temps de création et d’expression.
Ce n’est pas grave, ces temps ne sont-ils pas accessibles hors de l’école ?
Oui, bien sûr, mais ce sont les enfants des milieux favorisés qui sont gavés d’activités culturelles, artistiques, de visites au musée, de monuments… et qui peuvent articuler ce qu’ils apprennent à l’école avec le monde qu’ils visitent.
Et ceux qui n’ont que l’école pour comprendre le monde ?
Ils sont nombreux les enfants qui n’ont pas accès à toutes les activités payantes sur le territoire. Même dans les villes qui proposent des activités à des tarifs proportionnels aux revenus, certaines familles ne s’autorisent pas, ne se sentent pas légitimes… et les enfants restent à la maison ou jouent dans la rue. Quant aux musées, monuments… ils sont encore moins accessibles (transports inexistants ou trop coûteux).
Qu’importe ! Ce qui compte pour le ministre, c’est que tous les enfants des milieux populaires déchiffrent et qu’ils se repèrent dans les textes utilitaires comme les programmes de télévision, la publicité et autres messages utiles à la consommation. Pour eux quelques textes simples et quelques textes littéraires distribués au compte-goutte.
Pour les autres enfants, pas de soucis, les bibliothèques familiales feront le reste !
Seuls ceux qui mériteront, qui auront de très bons résultats pourront rejoindre les lycées généraux et pourquoi pas les classes préparatoires aux grandes écoles…
Si dans les classes, les enfants sont réunis, sans mixité sociale, ce que peuvent rapporter et échanger les enfants de leur lecture du monde, de leurs expériences de vie sera très réduit.
Les enfants des CP des quartiers populaires déchiffreront, ceux des écoles de centre-ville liront !
Du coup, au sein de l’école publique cohabiteront encore plus deux jeunesses : une qui déchiffre le monde et une qui le lit.
La méthode syllabique rassure sans doute l’opinion publique, la plus connue par les parents, elle existe depuis si longtemps…

Pourtant d’autres méthodes existent…
Apprendre à lire en lisant et en écrivant pour s’exprimer, pour communiquer, pour comprendre… tout en s’appropriant le code, les outils (syllabes, orthographe, grammaire…), c’est possible !
Cette méthode s’appuie sur les besoins naturels de l’enfant : désir d’apprendre, communication, expression, compréhension… elle se nomme « méthode naturelle de lecture-écriture » (MNLE) et a été expérimentée par Célestin Freinet depuis plus de 60 ans.
Et ce n’est pas la méthode globale… qui n’a jamais été utilisée en France !
Et avec la MNLE, dans les classes Freinet qu’elles soient dans les quartiers populaires ou pas, les enfants apprennent à lire et ne se limitent pas au déchiffrage, ils lisent !
C’est pourquoi il est important de poursuivre cette œuvre de pédagogie émancipatrice, de la renforcer et d’avancer dans ce chemin, qui a fait ses preuves.

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