Pendant longtemps, nous avions pensé qu’il était possible, en politique de faire preuve de « pédagogie » et de lutter contre les idées, racistes, fascistes et populistes.
Trop de fois, nous les enseignants, avons prendre une part significative dans une telle lutte à partir de beaux discours et de sermons.
L’humanisme qui arrive parfois à trouver des voies pour s’exprimer dans les médias et sur la scène publique et politique, nous a toujours été vendu comme une protection contre les ravages de la destruction du lien social, de la haine et de la discrimination.
Il n’y a pas si longtemps encore, le décès d’Albert Jacquard a été l’occasion de rendre hommage à un homme qui s’est pourtant retrouvé bien seul tout au long de sa « dernière vie », à assumer un militantisme radical (au sens du projet de s’attacher à la racine des choses).
Des témoignages d’un humanisme impuissant, voilà ce que l’on voit souvent, juste avant les matins bruns.
L’élection de Brignolles et le lancement médiatisé du mouvement Racine dans l’Education Nationale, viennent nous rappeler qu’on n’aura pas raison par l’humanisme face à la montée du fascisme dans la sphère sociale.
De même nous assistons ici aux effets désastreux d’un pseudo réalisme politique du côté de la gauche qui assume et reprend sans arrête des thèmes et thèses de droite et d’extrême droite. Si cela était fait, comme on nous le dit « pour limiter les dégâts », et bien il serait urgent d’ouvrir les yeux.
Mais malheureusement ce prétexte de vouloir limiter les dégâts révèle ici son inanité. Il s’agit bien davantage par le fait divers, le populisme, la démagogie de masquer la confiscation de l’espace politique et social et l’impossibilité d’imaginer changer quoi que ce soit au cours des choses et du monde.
Ce que nous vivons aujourd’hui en politique,, comme ailleurs c’est cette injonction que nous recevons à nous adapter à un monde dans lequel nous sommes privés de tout pouvoir d’agir.
Pédagogie d’adaptation, contre pédagogie de transformation, c’est dès l’école bien entendu que s’enseigne le consentement d’adhésion cynique à la violence de l’ordre du monde. Les discours hypocrites et humanistes de mauvaise conscience n’y changent rien, tant qu’ils ne se basent pas sur de véritables ruptures éducatives, pédagogiques et sociales.
L’individualisme, la concurrence de tous contre tous, l’opportunisme, le mimétisme sont directement les fruits d’une éducation au cours de laquelle l’enfant n’a jamais appris qu’il pouvait et devait changer les choses.
A l’instar de ce que décrivait Freinet, la lutte et la résistance des pédagogues et éducateurs conscients et engagés doit pouvoir s’inscrire d’abord dans la transformation de ses propres pratiques éducatives, puis dans la transformation des institutions qui nous sont proches, et de la vie sociale, locale.
Contre l’impuissance, il n’y a pas de discours, il n’est qu’un seul remède : agir.
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Laurent Ott, Association Intermèdes-Robinson
Site : http://assoc.intermedes.free.fr
Blog : http://recherche-action.fr/intermedes/
Vidéos : http://www.dailymotion.com/user/Cultures_Robinson/1
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Je ne vois pas pourquoi vous assimilez systématiquement humanisme avec impuissance et discours hypocrites. Les valeurs de l’humanisme peuvent être une puissante source de motivation à agir et l’anti-humanisme me semble plutôt conduire à la résignation, à l’individualisme et au cynisme. Il me semble parfaitement compatible avec les idées du Front National
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Bonjour
en effet voilà un débat d’importance. L’anti humanisme serait il du fascisme? Je n’ai pas envie de rentrer dans de telles équations. Car ici on n’est pas loin aussi du raisonnement qui dit que toute critique radicale de l’action publique, viendrait renforcer le Front National
Ce que je dis est qu’il y a quelque chose de douloureux dans le discours humaniste qui reste au niveau de l’incantation. Réagir aux discours fascistes (ciomment les appeler autrement) par ce type de discours, vient même conforter la réaction, et parfois la stimule.
Notre travail au jour le jour nous amènent plutôt à privilégier des actions directes, locales et ciblées, qui ont sans doute plus d’impact que ce type de discours.
Nous avons besoin de victoires
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Laurent Ott prend acte de l’échec des discours hypocrites et humanistes de mauvaise conscience. Malheureusement, la solution qu’il nous propose, et qui en fait est déjà largement pratiquée, « la transformation des institutions qui nous sont proches, et de la vie sociale, locale » n’a guère plus de chances de réussir.
La raison est qu’on en est plus au temps de Freinet, où la situation internationale faisait peser une menace sur le pouvoir de la bourgeoisie et nécessitait un minimum de cohésion sociale.
Le pouvoir absolu de la finance nécessite aujourd’hui d’abord de penser en termes globaux avant de réfléchir à leur articulation avec les conditions locales.
Vous pouvez lire davantage à ce sujet ici (ainsi que sur d’autres pages du même site).
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Bonjour,
en effet nous ne sommes pas d’accord. Si je vous suis sur la situation nouvelle y compris sur le plan international, je pense au contraire que nous sommes condamnés à l’action locale, et que celle ci seule peut s’avérer efficace, tellement on nous a confisqué toute expression au delà
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Je suis aussi partisan des actions locales, directes et concrètes et il m’arrive d’y participer. Mais je pense qu’elles doivent se fonder sur des valeurs (pourquoi pas humanistes, comme la justice sociale ou l’égalité entre tous les êtres humains) et s’accompagner de discours qui en donnent le sens dans l’espace public. Sinon elles ne sont qu’activisme sans lendemain et une autre façon de se donner bonne conscience.
Nous ne sommes pas sur terre pour nous adapter… mais pour créer (Tosquelles)
Les actions locales, directes et concrètes, ciblées, restent une façon efficace d’agir. Des fonctionnements en réseaux se substituent de plus en plus aux organisations centralisées, aux directions incontrôlables. Dans leur impuissance, les politiques cherchent plus à se maintenir en place, parfois pitoyablement : – les collectionneurs de mandats électifs ou cooptés défendant leurs cumuls de postes, – les “petite phrases” risibles ou scandaleuses. Nous avons effectivement besoin de victoires, mais nos “leaders” politiques et syndicaux ne nous semblent pas en mesure d’organiser ou soutenir les mobilisations nécessaires.