C’est ici, à l’ouest de la Guyane, en face du Suriname :
Ça ressemble à ça :
Léon Bertrand, maire de Saint Laurent du Maroni (SLM), vient de demander au conseil municipal de supprimer les petites sections dans sa ville :
Considérant l’augmentation exponentielle de la population scolaire sur le territoire de la ville,
Considérant les chiffres prévisionnels pour la rentrée scolaire 2018, qui traduisent une augmentation de 1189 demandes d’inscription nouvelle soit 14.71% par rapport à la rentrée précédente,
Considérant l’augmentation constante des dépenses de fonctionnement due à la location de bungalows, à l’entretien des écoles et le gardiennage des établissement scolaires,
Considérant l’avis défavorable de l’Etat à la mise en place de la double vacation,
Considérant que l’obligation scolaire est fixée à 6 ans,
Il est demandé que le conseil municipal approuve la suppression des classes de petites sections à partir de la rentrée 2018.
Il faudrait peut-être aussi considérer que la majorité des enfants de SLM n’ont pas le français pour langue maternelle : de 1986 à 1992, il y a eu une guerre civile au Surinam, juste de l’autre côté du fleuve Maroni frontalier. Les Ndjuka de la Cottica (qui parlent une langue bushinenge, créole à base anglaise surtout) sont venus massivement se réfugier de ce côté de la frontière pendant la guerre civile qui les a opposés au gouvernement de Paramaribo. Au nombre de 6000 environ et officiellement désignés comme « personnes provisoirement déplacées du Surinam », plus couramment dits alors PPDS, ou encore « réfugiés », ils ont été répartis dans des camps relevant des communes de Saint-Laurent et de Mana. Ces camps ont fermé à la fin de la guerre, en 1992, et pour convaincre les « réfugiés » de rentrer au pays, le gouvernement français a proposé une indemnité de retour à tous ceux qui se portaient volontaires. Il y a eu quelques départs, mais plus nombreux ont été ceux qui ont préféré rester. Ils pensaient en avoir le droit, puisqu’ils refusaient l’indemnité de départ, mais ils se sont retrouvés de facto en situation irrégulière, susceptibles d’être à tout moment reconduits à la frontière. (source IRD)
À cela il faut ajouter une forte natalité : la Guyane a connu une croissance démographique de près de 4% par an entre 1999 et 2006, soit plus de 50000 personnes supplémentaires. Les 2/3 de cette croissance sont dus aux naissances largement excédentaires sur les décès (Insee, 2009). Sur cette période, la population guyanaise a augmenté 6 fois plus vite que la population métropolitaine. L’indice conjoncturel de fécondité de la Guyane explicite la situation ; 3,81 enfants par femme en 2006, contre 1,99 à la même date pour la métropole. (…) En 2006, la Guyane était la région française qui comptait la part d’immigrés la plus importante, environ 30% de la population régionale (Insee, 2009). Un tiers de ces immigrés vivaient dans la zone Maroni où ils représentaient 36% de la population locale. Ce flux migratoire explique une part de l’accroissement de la population, mais c’est surtout la féminisation de cette migration qui permet de comprendre l’incroyable dynamisme de l’indice conjoncturel de fécondité. Cette féminisation ne cesse de s’accentuer depuis les années 1990, passant de 46% de femmes dans la population immigrée en 1990 à 51% en 1999 et 52% 2006 (Insee, 2009). Cette sur-féminisation impacte logiquement le solde naturel. En 2003, 58,8% des naissances annuelles en Guyane provenaient de femmes étrangères. (source ENS Lyon)
**Bref, on l’aura compris, on va va pas dépenser pour des Bushinenge (nègres de la forêt) qui ne parlent pas français et n’ont pas de papiers.
Heureusement, d’autres pensent autrement. Pour vous réjouir le cœur, regardez ce témoignage sur le travail de Sophie Vezzoli à Gotali en maternelle, avec les mamans, à quelques kilomètres de là.
La Guyane est une terre de contrastes.