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Hébergement : l’urgence des familles

Tribune parue dans Libération

En Ile-de-France, l’hôtellerie dite «sociale» affiche complet. Avec un flux de 45 nouvelles demandes de personnes en famille chaque jour au 115 de Paris, cet hiver, ce sont plusieurs centaines d’enfants qui dormiront dans les rues. Faudra-t-il se contenter de l’ouverture de gymnases, consacrant une gestion saisonnière de court terme de l’urgence ? Devrons-nous accepter d’abaisser le standard déjà peu élevé des hôtels dans lesquels sont hébergées les familles ? Ces solutions, nous les refusons collectivement.

D’après les résultats d’une enquête menée par l’Observatoire du Samu social de Paris, dans les familles hébergées en Ile-de-France, 41% des enfants sont contraints de dormir dans le même lit que leurs parents, près de 8 familles sur 10 et 2 enfants sur 3 sont en insécurité alimentaire, 29% des mères souffrent de dépression, et l’on observe une prévalence de l’obésité bien supérieure à la population générale. Médecins du monde, dans son dernier rapport annuel, fait aussi le constat de patients qui ont faim dans les mêmes proportions, et qui, de surcroît, accusent un retard de recours aux soins dans 36% des cas. L’hôtel, en dix ans, est devenu un cache-misère où s’entassent des familles reléguées de plus en plus loin du centre de Paris. De solution provisoire pour une mise à l’abri, l’hôtel s’est installé comme la salle d’attente d’une très hypothétique sortie vers le logement.

En Ile-de-France, 545 familles attendent ainsi à l’hôtel depuis plus de cinq ans. En dépit d’une dénonciation régulière par les acteurs du champ de l’exclusion, l’hébergement en hôtel a continué d’être la solution privilégiée par l’Etat pour les familles. En 2015, l’Etat prévoit à nouveau une hausse des fonds dédiés à l’urgence, et notamment à l’hôtel, au détriment des solutions plus pérennes. Pourtant, d’autres solutions sont possibles. Elles permettraient de réorienter la dépense hôtelière, qui atteindra 175 millions d’euros en 2014, vers des solutions plus adaptées et proches du logement.

Accroître le nombre de places dans des dispositifs spécifiques d’accueil pour les familles demandeuses d’asile, développer l’hébergement en appartements partagés, créer une offre de résidences d’accueil gérées par les bailleurs sociaux ou les acteurs associatifs : autant de propositions en attente d’une impulsion politique. Avec la crise qui dure et l’amplification des zones de conflit, il serait vain d’imaginer que le flux de familles en situation d’exclusion se tarira. Des solutions structurées doivent donc être mises en œuvre. C’est pourquoi nous appelons à une conférence de consensus pour ouvrir un débat national sur les politiques d’hébergement et d’accompagnement des familles en grande précarité.

Louis GALLOIS Président de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars), Etienne PINTE Président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, Eric PLIEZ Président du Samu social de Paris, Thierry BRIGAUD Président de Médecins du monde, RESF RÉSEAU EDUCATION SANS FRONTIÈRES et Secours Catholique -CARITAS FRANCE

http://www.liberation.fr/societe/2014/10/23/hebergement-l-urgence-des-familles_1128122

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