Enquête Talis : en France, les conditions de travail des enseignant·es sont alarmantes !
Ce communiqué a été publié le 13/11/2025
Les résultats de la dernière enquête internationale TALIS (Teaching And Learning International Survey), menée par l’OCDE notamment sur les enseignant·es des écoles élémentaires et des collèges, viennent d’être publiés. Cette enquête compare les systèmes éducatifs dans différents pays d’Europe et leurs évolutions dans le temps. Elle vient confirmer des alertes que SUD éducation lance depuis de nombreuses années. Le ministère, lui, commence par évoquer que « neuf enseignants sur dix déclarent se sentir souvent heureux lorsqu’ils enseignent ». Ce décalage entre la perception ministérielle et notre analyse, basée sur le vécu des collègues, n’a toutefois rien d’étonnant : l’étude pointe que moins de 5 % des enseignant·es interrogé·es estiment que leur opinion est valorisée par les décideurs politiques.
Nous sommes particulièrement alarmé·es par le décrochage de la satisfaction liée au métier d’enseignant·e : elle est la plus faible de l’Union Européenne, et continue de diminuer, avec la baisse la plus importante au niveau international (-10 points entre 2018 et 2024). En miroir, le pourcentage d’enseignant·es qui indiquent regretter d’avoir choisi ce métier ne cesse d’augmenter, ce qui est confirmé par la nette hausse des démissions ces dernières années.
L’enquête montre en effet que la souffrance au travail vécue par les enseignant·es est intense. Un·e enseignant·e sur deux estime ressentir du stress au travail ; un·e enseignant·e sur quatre estime que son travail a un impact négatif sur sa santé physique et/ou mentale. L’enquête identifie comme principale source de stress les changements incessants que l’institution impose sans donner aux équipes les moyens nécessaires pour les mettre en œuvre : ceci confirme des constats que nous faisons au quotidien dans l’accompagnement syndical de nos collègues.
Le ministère se gargarise du fait que l’impact du travail sur la santé des agent·es ait diminué entre 2018 et 2024, mais pour SUD éducation, c’est en réalité la perception de cet impact par les collègues qui a diminué ! En effet, l’atomisation des collectifs de travail orchestrée par la hiérarchie, ainsi que la progression de l’idée que la santé et le bien-être au travail dépendent de chaque individu, ont des conséquences tangibles. L’employeur et l’organisation du travail ne sont plus considérés comme responsables de notre souffrance au travail… Elles le sont pourtant dans les faits : par exemple, parce que les enseignant·es sont enjoint·es à mettre en œuvre des consignes hiérarchiques contradictoires avec leurs valeurs. Elles en sont aussi responsables légalement : la loi rappelle en effet qu’il revient à l’employeur d’« assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». L’organisation du travail imposée par la hiérarchie est génératrice de fatigue, de stress et de mal-être, accroissant les risques psycho-sociaux.
Pour finir, plusieurs choix méthodologiques nous interrogent, notamment la délimitation du périmètre de l’enquête. L’OCDE a choisi de ne s’intéresser qu’aux enseignant·es, aux directeur·ices d’école et aux chef·fes d’établissement. Les autres personnels sont donc ignorés, à l’instar des AESH qui constituent pourtant le deuxième corps de métier de l’Éducation nationale avec 134 800 agent·es. De plus, en France, les territoires ultramarins ont arbitrairement été exclus ! Ces partis pris nous interpellent, car ils ont pour conséquence d’améliorer artificiellement les résultats français en écartant des territoires et des personnels avec des conditions de travail notoirement plus difficiles. La prise en compte de tous·tes les agent·es et de tous les espaces aurait donné des résultats bien plus alarmants. Par ailleurs, cette mise à l’écart résonne avec la déconsidération subie par ces travailleur·euses et ces territoires. Ces choix ne sont toutefois pas étonnants lorsqu’on sait que cette enquête a été conduite par l’OCDE, une organisation internationale qui fait la promotion du libéralisme économique et qui encourage le développement du secteur privé au détriment des services publics.
L’absence de reconnaissance, les salaires insuffisants, la formation inadaptée, l’augmentation du temps de travail au détriment de la santé et de la vie personnelle, le manque criant de moyens humains et financiers… autant de sujets traités dans l’enquête TALIS qui mettent en exergue le mal-être enseignant.
Face à cela, SUD éducation revendique :
- de la stabilité dans nos conditions de travail (emploi du temps, lieu de travail, élèves, programmes, organisation…) ;
- la diminution significative du temps de travail hebdomadaire, sans perte de salaire, à 32h pour commencer, intégrant du temps de concertation pour reconstruire des collectifs de travail ;
- l’augmentation des salaires pour tous les personnels, l’intégration des primes et indemnités aux salaires, la réduction des inégalités salariales ;
un statut de fonctionnaire pour tou·tes les agent·es ; - une véritable formation initiale et un plan de formation continue cohérent et ambitieux, sur temps de travail et adapté aux besoins réels des personnels ;
- une véritable prise en compte par la hiérarchie des personnels, sur les lieux de travail et dans les instances, pour aller vers une organisation du travail plus saine ;
- un budget de l’Éducation nationale différencié, avec des orientations plus favorables pour l’enseignement public, pour les femmes, pour les personnels en situation de handicap, et pour l’éducation prioritaire.
