Aux sources de la pédagogie antifasciste, deuxième épisode de notre exploration de la pédagogie antifasciste
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Penser l’actualité d’une pédagogie antifasciste nécessite une certaine connaissance des cadres institutionnels dans lequel elle entend s’inscrire. Notre système scolaire, comme le champ de l’Éducation populaire, ont été façonnés par toute une histoire politique et sont traversés par des conflits et des luttes entre des pratiques et des imaginaires éducatifs et pédagogiques diamétralement opposés et inconciliables. « C’est, relève Noëlle de Smet, en prenant parti dans ce conflit, sur le plan personnel et collectif, que l’éducation se définit. » (Au front des classes). En effet, si les pédagogies émancipatrice et les pédagogies réactionnaires se disputent les mêmes terrains d’intervention, elles s’inscrivent en revanche dans des héritages radicalement différents.
Dès ses origines, l’institution scolaire est marquée par son projet religieux – puis nationaliste –, son autoritarisme et son culte de l’obéissance. Très tôt, les forces réactionnaires considèrent l’éducation du peuple comme un instrument de domination et de soumission. Au concile de Trente (1630), l’Église catholique énonce sans détours son programme : « Normaliser le comportement social par l’intériorisation d’une morale pratique aux règles simples : respecter ses parents, obéir aux maîtres, avoir des mœurs pures, fuir le mal. »
La Révolution française aurait pu marquer une rupture, mais, en dépit de ses différents projets de réforme de l’enseignement, rien ne se concrétise vraiment. Aussi, lorsque, sous la pression démographique et économique, les différents régimes qui se succèdent au xixe siècle sont contraints de développer l’instruction du peuple, ils veillent moins à en limiter l’accès qu’à en désamorcer le potentiel subversif en y faisant primer l’obéissance sur la connaissance.
En Allemagne, cette conception a été poussé à son paroxysme, non sans conséquences sur l’histoire de ce pays et du reste du monde… Dès le xviiie siècle, s’y développe en effet ce que la pédagogue Katharina Rutschky a appelé une Schwarze Pädagogik (« pédagogie noire »). Celle-ci se propose de dresser les enfants, de les rendre le plus docile possible au prix de méthodes répressives, de châtiments corporels, de violences psychologiques et de manipulations mentales. « Toute l’éducation n’est rien d’autre que l’apprentissage de l’obéissance […] L’obéissance consiste à ce que les enfants 1) fassent de bon gré ce qui leur est ordonné, 2) renoncent à ce qui leur est interdit et 3) s’estiment satisfaits des prescriptions qui leur sont faites.1 » Le modèle fait aussi des émules en France. En 1872, dans La Revue de l’enseignement chrétien2 le père Vincent de Paul Bailly s’extasie devant ce système : « C’est en Allemagne, où le maître est surveillé et dirigé soit par le curé, soit par le ministre, qu’il vous fallait prendre les règlements de vos Écoles normales ; c’est en Allemagne enfin, où l’école enseigne l’obéissance et non la révolution qu’il vous fallait chercher le secret des victoires… » Pour la psychanalyste Alice Miller, autrice de C’est pour ton bien, Racines de la violence dans l’éducation de l’enfant, cette pédagogie noire serait à la fois une des matrices qui a rendu possible la soumission d’une partie de la population au régime hitlérien, mais aussi le cadre éducatif dans lequel de nombreux dirigeants du parti nazi ont été élevés.
À rebours de cette pédagogie noire, une pédagogie « rouge » s’invente et se perfectionne. Dès lors qu’ils et elles s’organisent, les dominé·es s’intéressent en effet à la question éducative, mais dans une toute autre perspective, celle de leur émancipation. Les premier·es socialistes dits « utopiques » prônent une autodidaxie de classe : à l’ombre des barricades de 1830 et de 1848, s’élabore une « éducation nouvelle » fondée sur la mixité, la liberté, l’égalité, l’abolition des châtiments, des examens et de l’opposition entre travail manuel et travail intellectuel. Ce sera un des piliers du projet de la Commune de Paris qui s’essaye à un autre modèle scolaire et pédagogique – l’enseignement intégral –, inspiré du programme de l’Association internationale des travailleurs.
Avec son écrasement, c’est aussi l’idée d’une éducation anti-autoritaire et égalitaire tout comme l’accès à la culture pour tous et toutes qui est défaite. C’est le triomphe de la France rurale, catholique et réactionnaire qui échoue de peu à restaurer la monarchie. La classe dominante, qui se rallie progressivement à la République, à condition que celle-ci soit la garante de l’ordre moral, voit dans l’école un rempart pour défendre le système économique et social : le plus sûr moyen, selon Jules Ferry, de « clore l’ère des révolutions ». « Dans les écoles confessionnelles, avertit le père de l’École républicaine, les jeunes reçoivent un enseignement dirigé tout entier contre les institutions modernes. On y exalte l’Ancien Régime et les anciennes structures sociales. Si cet état de chose se perpétue, il est à craindre que d’autres écoles se constituent, ouvertes aux fils d’ouvriers et de paysans, où l’on enseignera des principes diamétralement opposés, inspirés peut-être d’un idéal socialiste ou communiste emprunté à des temps plus récents, par exemple à cette époque violente et sinistre comprise entre le 18 mars et le 28 mai 1871 [la Commune de Paris, Ndlr]. Le remède qui consiste à opposer aux menées de l’Internationale Noire celle de l’Internationale Rouge n’en est pas un. Ce serait la liberté de la guerre civile.3 »
Nationaliste, militariste, autoritaire et inégalitaire, l’école de la IIIe République est cependant traversée par des tensions et des contestations. Aussi n’est-elle pas épargnée par la crise de régime que constitue l’Affaire Dreyfus. Dans 10 questions sur l’antifascisme, les militant·es de La Horde qui rappellent que le combat antifasciste précède la naissance du fascisme lui-même, voient dans le bouillonnement de l’Affaire Dreyfus un de ses actes de naissance. Face aux menées de la réaction, à son antisémitisme et à son nationalisme, la résistance s’organise, à travers notamment d’éphémères Universités populaires qui se développent sur tout le territoire. Conférences verticales, sans participation directe des auditeurs et auditrices, savoirs académiques déconnectés des aspirations du peuple, élitisme, paternalisme… malgré l’élan populaire initiale, l’expérience tourne court, excepté là où ces initiatives sont portées par les organisations ouvrières au sein des toutes jeunes Bourses du travail. De fait, la nécessité d’une éducation par et pour les ouvrier·es (la démopédie de Proudhon) est au cœur du projet du syndicalisme révolutionnaire naissant. Cours du soir, bibliothèques cercles d’études, etc. s’installent dans les Bourses du travail où s’échafaude un mouvement d’éducation d’autodéfense intellectuelle contre les forces réactionnaires, cléricales ou patronales.
De l’aveu même de ses initiateurs et initiatrices, le syndicalisme enseignant puise ses racines dans l’affaire Dreyfus. Comme d’autres institutions (armée, justice) qui devaient incarner un renouveau républicain, l’École a trahi ses idéaux. De jeunes instituteurs et institutrices décident de s’organiser et de braver l’interdiction qui leur est faite de créer leurs syndicats. Un peu plus tard, ils et elles rejoindront la CGT. Leur programme est tout autant social et professionnel (pour leurs conditions de travail et contre leur hiérarchie) que pédagogique. À l’instar d’Albert Thierry, ce syndicalisme enseignant se revendique d’une « pédagogie d’action directe », débarrassée des programmes et des injonctions hiérarchiques. Leur manifeste syndicaliste de 1905 acte leur volonté de se rapprocher de la classe ouvrière : « C’est au milieu des Syndicats ouvriers que nous prendrons connaissance des besoins intellectuels et moraux du peuple. C’est à leur contact et avec leur collaboration que nous établirons nos programmes et nos méthodes. » En prônant un enseignement internationaliste, antimilitariste et pacifiste au cœur même d’une institution scolaire jugée par trop conservatrice, ces syndicalistes entendent la subvertir de l’intérieur, au grand désespoir des réactionnaires qui déplorent l’irruption à l’école « de la lutte des classes » et d’un enseignement sans dieu ni patrie.
La boucherie de la Première Guerre mondiale marque une rupture. Le système éducatif tout entier est mobilisé au service d’une propagande débridée mais il est à noter que la seule fédération syndicale à ne pas céder aux sirène de l’Union sacrée est la Fédération de l’enseignement. Nombre de ses militant·es, refusant l’embrigadement militariste, seront en proie à une féroce répression.
Dans l’entre-deux guerres, le mouvement de l’Éducation nouvelle entend refonder l’éducation pour éviter un nouveau massacre et former des individus capables de s’y opposer… Cette éducation à la paix, qui se construit à travers un réseau international, veut repenser la pédagogie et en finir avec les nationalismes guerriers. Ce qui n’empêche pas certaines de ses figures, telle Maria Montessori et ses disciples, de s’accommoder, pendant une décennie, du régime fasciste de Mussolini.
D’autres, en revanche, comme Élise et Célestin Freinet, affrontent la violence – verbale et physique – de l’extrême droite. En octobre 1934, alors que prospère le fascisme en Europe, et qu’il est lui même victime d’une violente campagne de l’Action française, Célestin Freinet publie un texte intitulé « Contre le fascisme à l’école » (L’Éducateur prolétarien, octobre 1934). Cet article est particulièrement intéressant en ce qu’il aborde la question du fascisme sous l’angle du matérialisme scolaire. Dans l’esprit des Freinet, le matérialisme scolaire s’oppose au « verbalisme » et considère que c’est par l’organisation pratique du travail, et non par des déclarations générales et des postures idéologiques qu’adviendra la révolution à/de l’école. Malgré ses discours sur la régénération de la jeunesse et de la nation par l’Éducation, le fascisme n’apporte aucune réponse concrète aux conditions d’enseignement (effectifs pléthoriques, locaux vétustes, matériel pédagogique défaillant ou absent, etc.). L’antifascisme pédagogique, pour les Freinet, c’est au contraire lutter concrètement contre cette situation matérielle : « Si les locaux sont exigus, mal aérés, sans soleil ; si l’éclairage y est défectueux ; si les enfants sont mal nourris, faute de cantine convenable au cours des interclasses ; si les élèves sont trop nombreux dans les classes, rendant impossible tout mouvement, toute manifestation naturelle de l’activité enfantine, le travail pédagogique est également profondément déficitaire ; toute pédagogie libératrice devient impossible et tous les efforts des éducateurs sont, d’avance, voués à l’insuccès. » (Contre le fascisme à l’école). Il y a une convergence de fait entre la volonté de maintenir l’école dans un état de délabrement avancé et la mise au pas de la jeunesse et des personnels : « L’asservissement physiologique et matériel des enfants serait couronné, par l’asservissement idéologique, par l’obligation faite aux instituteurs d’enseigner les dogmes d’État au détriment de la vérité et de redonner à la religion l’ascendant d’obscurantisme, gage de renforcement des pouvoirs réactionnaires. » (Contre le fascisme à l’école)
Pour les « éducateurs prolétariens » conséquents, il ne suffit pas d’être des « non-fascistes », il est vital d’être des antifascistes militant·es convaincu·es et actif·ves politiquement et pédagogiquement : « Nous ne comprendrions pas que des camarades fassent de la pédagogie nouvelle sans se soucier des parties décisives qui se jouent à la porte de l’école ; mais nous ne comprenons pas davantage les éducateurs qui se passionnent, activement ou plus souvent passivement, hélas ! pour l’action militante, et restent dans leur classe de paisibles conservateurs, craignant la vie et l’élan, redoutant l’apparent désordre de la construction et de l’effort. » (« Les éducateurs prolétariens sont anti-fascistes », L’Éducateur prolétarien, mai 1934). Alors que triomphent à nouveau les idées fascistes, l’héritage que nous lèguent les Freinet est bien celui de la cohérence entre nos engagements militants et nos pratiques pédagogiques.
L’un des collaborateurs de l’école de Vence, fondée par les Freinet après leur rupture avec l’Éducation nationale, s’engagera dans les milices antifascistes qui combattent en Espagne. Les forces du Frente popular luttent en effet les armes à la main mais considèrent également que le combat contre le vieux monde se joue dans les écoles. Les héritier·es du pédagogue libertaire Francisco Ferrer, fondateur de l’École moderne rationaliste4, fusillé après une parodie de procès en 1909 par la clique réactionnaire au pouvoir, sont en première ligne. Le combat antifasciste se mène tout autant sur le front pédagogique que sur les fronts d’Aragon ou de Madrid. Pas plus qu’ailleurs, le fascisme ne doit avoir sa place à l’école ou dans les foyers : « En Espagne, parents et enfants sont maintenant unis dans la lutte contre l’esprit tyrannisant du fascisme ecclésiastique et militaire qui, jusqu’à aujourd’hui, a fondé son règne sur la crainte des enfants et des adultes. […] Parents, pour la Révolution et pour l’esprit libertaire, éliminez de vos foyers, de vos familles et de l’éducation de vos enfants, la crainte, la punition et la menace. Faites d’eux des hommes courageux, des hommes sans peur, des hommes libres.5 » « Les internats, les maisons de correction et les casernes scolaires disparaissent ; l’idée d’éducation se substitue à celle du châtiment. L’école nouvelle est l’expression d’un idéal social et d’une pédagogie détachée des traditions autoritaires6. »
C’est dans ces mêmes années, annonciatrices des désastres à venir, que l’Éducation populaire va se renouveler et, elle aussi, devenir un terrain d’intervention où s’affrontent fascistes et antifascistes. Avec la semaine de quarante heures, les congés payés et la création d’un sous-secrétariat d’État à la jeunesse et aux loisirs, le Front populaire engage la bataille du temps libéré avec l’idée que celui-ci pourrait contribuer à l’émancipation du peuple.
Mais c’est la Révolution nationale vichyste et sa volonté d’embrigader la jeunesse qui va donner un cadre institutionnel à cette éducation hors temps scolaire. L’ordonnance du 2 octobre 1943 crée l’agrément « Jeunesse et éducation populaire ». Sont également mis en place les chantiers de jeunesse, les maisons des jeunes et des écoles de cadres. C’est dans l’une de ces écoles, située dans le château d’Uriage, que s’écrit une page décisive de l’histoire de l’Éducation populaire. À l’origine, il s’agit d’y former les futures élites de l’État français. Mais les animateurs et animatrices de l’école vont finir par suivre une autre voie. Ils et elles se rapprochent de la Résistance et, lorsque l’école est dissoute en 1942, rejoignent le maquis. Tout en combattant l’occupant nazi et les partisans de la Collaboration, ils et elles diffusent et perfectionnent les outils pédagogiques mis en place à Uriage avec l’objectif de développer « une éducation politique de masse conçue comme une pédagogie de la démocratie, de manière à prévenir les tentations totalitaires. » (« Histoire de l’Éducation populaire », Adeline de Lépinay). Ce basculement du pétainisme à la Résistance interroge. S’agit-il d’une prise de pouvoir de ceux qui, dès le départ, étaient en réalité hostile à Vichy comme Joffre Dumazedier ? Ou est-ce les méthodes pédagogiques mises en œuvre, dont le fameux « entraînement mental », qui ont eu raison de la propagande collaborationniste et ouvert les yeux aux futurs cadres que voulait former l’école ?
Les Francas tout comme le mouvement Peuple et Culture, tous deux issus de la résistance à l’occupant nazi, entendent poursuivre leur combat après la Libération. La direction des mouvements de jeunesse et de l’Éducation populaire rattachée au ministère de l’Éducation nationale voit le jour en 1944. En févier 1945, ce sera la création des Comités d’entreprise, porteurs, à l’origine, d’une ambition culturelle et éducative. Une nouvelle dynamique est lancée, que ce soit à l’échelle nationale ou municipale, particulièrement dans les banlieues rouges.
Pendant et après la guerre, les mouvements d’Éducation populaire se sont constitués et développés, de nouvelles pratiques pédagogiques ont vu le jour. Dans les quartiers et les entreprises, le maillage s’est renforcé contribuant à diffuser, avec les partis de gauche et les syndicats, une culture militante, permettant de résister collectivement à l’air du temps et aux dominations.
Cette dynamique est brisée avec l’institutionnalisation de l’Éducation populaire dans les années 80. Une trop grande proximité avec un pouvoir devenu « de gauche » a raison du potentiel contestataire des structures d’Éducation populaire. Elles se retrouvent impuissantes face au tournant de la rigueur qui prépare les esprit à une marchandisation du secteur. Ce n’est qu’au début des années 2000 qu’émerge une nouvelle génération portée par les luttes altermondialistes et une volonté de réagir à l’affaiblissement du mouvement social, à la progression du néo-libéralisme, et à son corollaire, la montée de l’extrême droite.
En ce qui concerne l’école, la trajectoire est assez similaire. Après avoir ralliée à elle le mouvement syndical et pédagogique, la gauche, une fois arrivée au pouvoir, les intègre au gouvernement de manière à désamorcer toute subversion. Les critiques sociologiques et pédagogiques, qui auraient pu transformer la massification scolaire en véritable démocratisation du système, se retrouvent marginalisées. Les ambitions émancipatrices sont abandonnées au profit d’une gestion néo-libérale de l’école mais c’est le « fourvoiement » pédagogique et sociologique qui est pointé du doigt comme la cause de tous les maux. Avec Chevènement, en 1984, c’est la fin de la récréation : à l’horizon socialiste se substitue une rhétorique réac-républicaine visant à « restaurer l’École de la République » : retour de La Marseillaise et de l’instruction civique, éloge du roman national, réhabilitation de l’ordre et de l’autorité. « Redonner », « retrouver », rappeler », « restaurer », « tradition », etc., c’est le vocabulaire de la restauration qui s’impose tout en s’accommodant sans problème du credo néo-libéral de l’innovation. Le livre programmatique du nouveau ministre s’intitule Apprendre pour entreprendre…
Alors que le FN remporte ses premières batailles électorales et n’a de cesse de déplorer l’effondrement scolaire et la décadence du système, la gauche au pouvoir est incapable d’enrayer la dégradation des conditions d’enseignement et la persistance de cette école à 2 vitesses contre laquelle se mobilisent les jeunes des lycées de banlieues (1991). De retour aux affaires avec Jospin, elle pousse encore plus loin sa logique néolibérale (Allègre) et sécuritaire (la lutte contre les « sauvageons » avec Chevènement). Quant au quinquennat Hollande, il se place dès ses premières heures sous la figure tutélaire de Jules Ferry et, tournant la page de 68, acte le retour des cours de morale. Face à ces renoncements et au ralliement à la rhétorique réacpublicaine, la droite et l’extrême droite peuvent dérouler leur programme rivalisant de démagogie : mise au pas de la jeunesse (SNU), des personnels (Article 1 de la loi Blanquer prônant un devoir de loyauté des personnels et répression tous azimuts, traque des « islamo-gauchistes » et des « wokistes »), des contenus (manuels « certifiés » par le ministère), remise en question du collège unique, etc. Le député RN Roger Chudeau se permet d’exiger des syndicats enseignants de « baisser d’un ton » alors que Marine Le Pen prend acte, avec la politique scolaire de Jean-Michel Blanquer, d’une « victoire idéologique » du Rassemblement national et « même maintenant [d’une] victoire politique ».
Sombre bilan… qui surprend certain·es tant la menace que fait peser l’extrême droite sur l’école a trop longtemps été sous-estimée. Pourtant, dans un contexte de montée du vote d’extrême droite chez les personnels, on assiste, dans notre secteur, à une prise de conscience et à des mobilisation intersyndicales qui pourraient enrayer cette dynamique. Parallèlement, sur les deux dernières décennies, de nouveaux questionnements ont émergé dans le sillage des pédagogies critiques : pédagogies antiracistes, queer, écologiques, décoloniales, etc. nouveaux questionnements pédagogiques (critique, antiraciste, écologique, etc.). De quoi espérer, peut-être, que le pire n’est pas à venir…
à suivre…
Grégory Chambat
1 Extrait de J. Sulzer, «Versuch von der Erziehung und Unterweisung der Kinder», 1748, cité d’après Katharina Rutschky, Schwarze Pädagogik, p.173 et sq.
2 Janvier 1872.
3 Discours de Jules Ferry (1879) devant le Conseil général des Vosges cité par Foucambert Jean, L’École de Jules Ferry, un mythe qui a la vie dure, AFL, réd. 2004, p. 72.
4 Francisco Ferrer (1859-1909). Accusé d’être l’instigateur de l’insurrection de 1909 à Barcelone, il est fusillé. Sa mort cause une vive émotion dans le monde entier et entraîne la chute du gouvernement espagnol. Fondateur de l’École moderne et d’une maison d’édition de manuels, son influence dépasse largement les frontières. Sa revue L’École rénovée, accueillit et inspira les instituteurs syndicalistes de la CGT française.
5 Florentina, « Enfants », Mujeres Libres, n° 12, mai 1938.
6 Article de Juan Puig Elias dans L’Espagne antifasciste, 26 août 1936.
Merci pour cette vaste perspective qui nous fait saisir les dérives et les possibles d’une éducation <> pour peu qu’on pose clairement les finalités de l’éducation et qu’on mette ou non en pratique la liberté d’apprendre et non d’obéir (pour les élèves comme pour leurs enseignants)
Astride B