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Alternative et syndicale ? une expérience de formation

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Un article du nouveau numéro de la revue N’Autre école Pédagogies alternatives : pour qui ? pour quoi faire ? qui éclaire de l’intérieur la réalité des stages de formation syndicale, loin des fantasmes médiatico-réactionnaires…

Alternative et syndicale ? une expérience de formation

Les deux mots peuvent sembler jurer ensemble. On sait que la moindre réformette déclenche des hourvaris dans le monde syndical, que les formateurs sont mis dans la catégorie honnie de la « hiérarchie intermédiaire », bref le changement des pratiques n’a à première vue pas bonne presse chez les syndicats (je parle des syndicats de gauche ; pour FO et le Snalc, la pédagogie, c’est l’ennemi).

Bien sûr, histoire de, on explique que le lendemain du Grand Soir, ou plus modestement quand il y aura de « vraies réformes », concept commode mais pas formidablement précis, il en sera autrement. Mais, en attendant…

Alors ma surprise a été grande de participer à des formations sur les pédagogies alternatives à l’invitation de syndicats de Sud Éducation* durant l’année scolaire 2016-2017 : à Auxerre, Bourges, et Béziers, ainsi qu’à Paris sur le plan national.

Surprise de voir des collègues demandeurs de pratiques différentes, curieux de connaître, demandant des précisions, prenant la documentation disponible (achetant même N’Autre école et les livres de la collection !). Critiques bien sûr – et heureusement ! –, notamment sur le délicat pas-de-deux entre ce que qui est proposé par le versant gauche de la hiérarchie, les aspirations des collègues, les réticences de certains, la question du temps bénévole (très lourd dans un premier temps, même si le « retour sur » est payant). Comment porter deux casquettes, comment s’engager, comment faire avec les parents… bref des questions de professionnels, des vraies questions. Et, au contraire des formations officielles, ni ces discours convenus ni cette opposition du fond de la salle des réfractaires bêtes et méchants. Franchise et cordia­lité vont très bien ensemble, l’interrogation, voire le désaccord, permettent d’avan­cer plus que l’indifférence polie ou l’op­position butée.

L’alternatif, c’est aujourd’hui

Ne transformons pas ces stages en paradis : si ces moments de travail ont permis à plus d’un de voir que l’alternatif c’est aujourd’hui dans ma classe et demain dans ton école, c’est parce qu’ils ont été bien préparés, dans un esprit ouvert (pas facile d’entendre des propos dissonants sur les grèves ou sur les compétences), et parce que l’inter-degrés a positivement pesé : il est incontestable que la présence conjointe d’enseignants du premier et du second degré joue en faveur de pédagogies alternatives : les collègues du second degré, souvent plus conservateurs (ne fût-ce qu’à cause du cadre disciplinaire et de toute une tradition bourgeoise napoléonienne), sont amenés à écouter les enseignants de l’élémentaire et de la maternelle (à Bourges, précieuse présence d’Atsem) qu’ils ont peu l’occasion de fréquenter en dehors du cycle 3 et des conseils école-collège et qu’ils rencontrent là dans un cadre porteur, celui de la fraternité militante. Ainsi ce prof de philo, parti dans une diatribe sur le grand complot libéral contre les savoirs mais qui entend les envies de ses collègues du premier degré de faire des ateliers-philo ; il n’aurait certainement pas prêté l’oreille de la même façon à un texte ou aux seuls arguments du formateur. Dans ce cadre syndical, il rencontre un autre prof de philo comme lui, récemment venu au syndicalisme par attrait pour les pédagogies alternatives, ça le fait visiblement réfléchir (me pardonnera-t-on cette parenthèse ironique mais pas méchante : même les profs de philo peuvent réfléchir sur l’appren­tis­sage de la philosophie).

Alors, passe-moi le sel…

On se plaît à rêver : si le syndicalisme enseignant pouvait mixer les catégories pour enseigner différemment, et rendre du coup plus fondé et plus légitime l’indispensable registre revendicatif… Car ce que j’ai vécu est différent des cycles de conférences, d’une grande qualité par ailleurs, qu’organise telle ou telle structure syndicale (là encore, surtout dans le premier degré) : dans ces stages de Sud Éducation, on était dans un mélange de « passe-moi le sel » (détails pratiques de mise en place) et de grand espoir émancipateur pour demain – demain matin ou la rentrée prochaine, pas pour des lendemains qui chantent trop loin pour être audibles ! ■

Jean-Pierre Fournier, collectif Q2C

* ainsi que la CNT pour Béziers.

q2c_no7_version_2017_10_10-2.jpg N’Autre école Numéro 7 (5 € + 2,84 € de frais de port)





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