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Stagiaire impossible

Edito de la revue l’Émancipation syndicale et pédagogique

Stagiaire impossible

C’est avec cet intitulé très parlant et très juste que s’étaient formés il y a quelques années, lors de la mise en place de la “masteriation”, des collectifs de personnels stagiaires (enseignantEs, CPE…). Ce slogan pourrait être repris tel quel aujourd’hui.
Il y a bien entendu des conditions d’affectation déplorables, avec un temps de service et un salaire variables selon les “catégories” de stagiaires et leur modalité d’obtention du concours. Mais il y a aussi un autoritarisme et des pressions hiérarchiques inadmissibles qui tournent parfois au chantage à la titularisation. Ainsi, comme le concours s’obtient en fin de master 1, “on” exige de ces nouveaux personnels, de remplir à la fois les impératifs liés à une formation initiale (stage en responsabilité devant les classes de 9h pour les enseignantEs, suivi de formations…) ET la préparation du fameux master 2 dit MEEF (Métiers de l’Éducation et de la Formation)… y compris quand les personnes concernées ont déjà ce diplôme ! “On” – les nouveaux ÉSPÉ – va encore plus loin que le ministère lui-même, qui se borne à indiquer que si le suivi d’une formation est nécessaire, l’obtention du fameux diplôme ne l’est pas.

Cette situation a entraîné des mobilisations dans certains ÉSPÉ, avec des AG d’étudiantEs qui ont formulé des revendications (Livry-Gargan, Bonneuil, Aix-en-Provence). Ou encore un début de mobilisation intersyndicale (pétition unitaire) sur Créteil.

Autant de premières initiatives qui constituent la voie à suivre. Il s’agit aussi d’aller à la racine du problème : nous sommes devant les conséquences ultimes de la “masterisation”, processus initié par Sarkozy il y a quelques années. Processus qui s’articule aussi avec les contre-réformes de l’enseignement supérieur. Il combine réduction des moyens et casse des diplômes nationaux. Son pendant en est une formation à géométrie variable selon le bon vouloir de chaque ÉSPÉ, et une maltraitance des jeunes collègues soumisES à l’autoritarisme des potentats locaux des ÉSPÉ… en attendant que ce soit le caractère national même du statut des personnels qui soit mis à mal.

Nous n’attendions pas de ce pouvoir qu’il mène une politique anticapitaliste, dans ce domaine comme dans d’autres. Une formation initiale allongée, à temps réduit sous statut d’élève-professeurE, permettant de libérer les pratiques pédagogiques, de sensibiliser les collègues à leur variété, de dépasser les cloisonnements catégoriels dans l’approche du système éducatif… n’est pensable que dans le cadre d’une rupture globale avec cette société, qui n’est pas le projet du gouvernement. En revanche, il était au moins parfaitement possible pour ce pouvoir, immédiatement, d’abroger la “masterisation”. De revenir à un recrutement au niveau licence, de rétablir les moyens de formation et un temps de service réduit. Il s’y est refusé, préférant au contraire continuer dans la logique du gouvernement précédent, à l’exception d’une diminution du temps de service. On en voit aussi les conséquences ultimes aujourd’hui, avec une “désorganisation” qui est au fond la résultante logique (et voulue ?) de ce processus.

C’est pourquoi, en partant des mobilisations existantes chez nos collègues, qu’il s’agit d’étendre dans l’unité syndicale, il est temps d’entrer dans l’action contre ce gouvernement et cette politique. Sur ce sujet comme sur d’autres.

Quentin Dauphiné

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