Note de lecture :
Nous sommes en 1917 dans une usine de munitions anglaise, les hommes sont au front et 11 femmes décident de jouer au football en tapant dans un prototype de bombe légère…
Stefano Massini revient sur les Munitionnettes, déjà largement mentionnées par Mickaël Correia dans Histoire populaire du football (La Découverte 2018). Le football, il y a 100 ans (est-ce totalement différent aujourd’hui?), était un bastion masculin, mais le patronat permet aux femmes de s’en emparer en absence des hommes. Des équipes féminines avaient déjà existé. Ainsi, dès 1894, un « British Ladies’ Football Club » est formé pour réaffirmer que « les femmes ne sont pas ces créatures ornementales et inutiles que les hommes imaginent ». Mais cette aventure explicitement féministe, dans une société où la domination masculine est prégnante, restera sans véritable suite.
Le livre de Stefano Massini prend donc l’exemple de cette petite période faste pour le football féminin, où par exemple les célèbres « Kerr Ladies », l’équipe féminine la plus célèbre de l’époque, entamèrent une petite tournée mondiale brutalement stoppée lorsque le 5 décembre 1921, avec un rappel brutal à l’ordre masculin, la Fédération anglaise de football interdit à ses clubs affiliés de prêter leur terrain à des équipes féminines.
Le livre de Stefano Massini ne fait pas que raconter ce moment de l’histoire, il nous le fait vivre. Par sa prose proche de la poésie, avec ces femmes, toutes différentes, qui s’émancipent avec leur corps. Il nous montre comment à partir d’une petite fenêtre d’émancipation, des femmes ont repris en main, provisoirement, leur corps. Il montre aussi comment ces petites graines d’émancipation sont très rapidement écrasées lorsque l’ordre masculin reprend ses droits. Mais, et c’est là aussi sa force : il nous montre que même écrasées, ces graines repoussent…
M. B.
Le Ladies Football Club, Stefano Massin, traduit de l’italien par Nathalie Bauer, Globe, 2021, 192 p., 20 €.