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Affirmer une capacité d’agir ensemble

Les Soulèvements de la terre, Premières secousses, Editions La Fabrique, 2024, 289 p., 15 €

Dans Premières secousses, Les Soulèvements de la terre adoptent un point de vue stratégique. Il faut le souligner parce que c’est une démarche pas si courante dans nos milieux alors même que c’est bien de là qu’il faudrait repartir : une critique écologique du capitalisme depuis des luttes sociales partagées. D’où le choix de chapitres qui alternent récits de mobilisation et d’action et passages plus réflexifs.

Les Soulèvements de la terre n’entendent pas faire de l’écologie la contradiction principale à privilégier. Si c’est le terrain sur lequel elles et ils se sont engagé-es, cela ne les empêche nullement de s’associer à d’autres combats, contre le racisme ou les politiques sécuritaires notamment. Pourtant, il est clair que les enjeux écologiques pèsent lourds, l’effondrement de la vie sur Terre faisant figure de catastrophe globale.

Les Soulèvement de la terre reconnaissent que leurs actions ont souvent une dimension symbolique et qu’elles ne remettent pas pour l’instant dans les faits et de manière significative la bétonisation du monde ; elles ne menacent pas non plus directement le complexe agro-industriel. Mais leur objectif est ailleurs puisqu’il concerne davantage l’expérimentation sociale et politique : la recomposition d’une praxis au sens marxiste du terme, autrement dit un ensemble de pratiques collectives capables de transformer un rapport de force et de fonder un nouveau rapport au monde et aux autres. C’est la raison pour laquelle elles et ils favorisent l’association et la coopération avec des groupes engagés dans des luttes locales, contre les mégabassines ou l’A 69 par exemple.

Le collectif ne cache pas les difficultés rencontrées dans l’élaboration pas à pas d’un « faire ensemble » quand des cultures politiques différentes se confrontent, comme en témoigne les débats au sujet de l’utilisation de la violence. Il n’esquive pas davantage les erreurs stratégiques, en particulier la deuxième action contre la mégabassine de Sainte-Soline qui s’est terminée dans la confusion et une effroyable répression.

La deuxième partie de l’ouvrage, consacrée à la construction d’une organisation à partir de luttes locales pour s’étendre à la suite de ralliements massifs, est particulièrement intéressante. Le choix est celui de l’auto-organisation par hybridation. Aussi, ce n’est pas l’efficacité organisationnelle qui est primordiale mais une « éthique de la décision ». Méditant sur l’autonomie italienne des années 1960 et 1970, le néozapatisme ou l’expérience communaliste kurde du Rojava, les Soulèvements de la terre tentent de créer des espaces politiques oppositionnels tournés vers la pratique, tout en ayant conscience que la question de l’enracinement dans l’espace et le temps d’un contre-pouvoir anticapitaliste relève encore de l’horizon des possibles.

Les Soulèvements de la terre, Premières secousses, Editions La Fabrique, 2024, 289 p., 15 €

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