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Le monde éducatif dit : “Non à l’islamophobie”

Le collectif Questions de classe(s) est signataire de cette pétition. Nous vous invitons à la faire circuler et à nous y rejoindre…

« Jean-Michel Blanquer ne parle pas en notre nom ». Au lendemain du débat au Sénat sur le port du voile pour les mères accompagnatrices de sorties scolaires, un large collectif d’enseignants déplore un « climat de suspicion et de délation ». Ils appellent leurs collègues et l’ensemble de la société à « entrer en résistance » en manifestant « leur refus du racisme, de l’islamophobie et de toute forme de discrimination ».

Ces dernières semaines, une ligne rouge a été franchie. En tant que femmes et hommes, citoyennes et citoyens, et en tant qu’enseignantes, enseignants, et personnels de l’Éducation Nationale, nous pensons qu’il est de notre devoir de prendre position. L’appel à une « société de vigilance » par le président Macron le 8 octobre, suivi par le Ministre de l’Intérieur faisant la liste des « signes qui doivent être relevés » pour repérer une « radicalisation », font entrer la société française dans un climat de suspicion et de délation qui met en danger les musulmanes et les musulmans de notre pays. Déjà, les effets de ces déclarations, qui libèrent des discours et des actes inacceptables, se manifestent :

Le 14 octobre, l’Université de Cergy-Pontoise envoie à ses enseignant.e.s une liste de « signaux faibles de radicalisation » pour qu’ils puissent surveiller leurs étudiant.e.s et leurs collègues. Devant le tollé provoqué par cette fiche qui rappelle les pires heures de notre histoire, cette dernière est retirée, l’Université présente ses excuses.

Le 11 octobre, lors d’une séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, un élu du Rassemblement National malmène une mère d’élève qui accompagne son fils en sortie scolaire et qui porte un voile, comme la loi le permet. L’enfant éclate en sanglots, se réfugie dans les bras de sa mère, celle-ci quitte l’assemblée.

Réagissant aux événements du 11 octobre, le Ministre de l’Education Nationale, Jean-Michel Blanquer, plutôt que de jouer le rôle qui devrait être le sien et de condamner clairement ces propos qui vont à l’encontre de la loi, décide de relancer un débat sur le voile : « Vous avez d’une part ce que dit la loi – elle n’interdit pas aux femmes voilées d’accompagner les enfants – mais c’est certain nous n’avons pas envie d’encourager ce phénomène. » (BFMTV, 13 octobre). Le positionnement de Jean-Michel Blanquer et sa manière d’instrumentaliser le sujet ne sont pas nouveaux :

En février 2019, lors des débats parlementaires sur le projet de loi « pour une école de la confiance », il soutient l’amendement porté par Eric Ciotti visant à interdire « le port de signes ou tenues par lesquels les parents d’élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse » lors de sorties scolaires, avant d’être désavoué par son propre camp.

Le 31 août, il déclare : « Aujourd’hui, il y a plus de petites filles que de petits garçons qui ne vont pas à l’école maternelle pour des raisons sociétales. Et puis appelons un chat un chat, le fondamentalisme islamiste dans certains territoires a fait que certaines petites filles vont à l’école le plus tard possible […]. », au mépris de la réalité même des faits établis par les statistiques ministérielles.

Le 24 septembre, il accuse la FCPE de « flatter le communautarisme » pour avoir proposé une affiche parmi d’autres représentant une mère d’élève portant un voile et accompagnant son enfant à une sortie scolaire. En outre, il ne condamne pas le tweet de Laurent Bouvet, membre du Conseil des sages de la laïcité, qui, sous prétexte d’un détournement satirique de cette affiche, remplace la mère voilée par deux djihadistes armés.

Le 13 octobre, Jean-Michel Blanquer donne son interprétation de la « société de vigilance » en appelant les enseignant.e.s à surveiller de près un petit garçon qui refuserait de tenir la main d’une petite fille.

Nous dénonçons fermement tous les racismes et tous les fanatismes. Cependant, il est bien évident que la question n’est plus ici celle du fanatisme religieux, mais celle de l’instrumentalisation médiatique et politique de ce phénomène. En tant qu’enseignant.e.s et personnels de l’éducation, nous nous inquiétons tout particulièrement de cette instrumentalisation et de ses conséquences sur l’école :

Tout d’abord, nous nous opposons à la manière dont la laïcité est systématiquement détournée pour stigmatiser l’islam. Nous rappelons à notre Ministre que la laïcité garantit pour chacun.e la liberté de croire ou de ne pas croire. Elle impose à l’Etat la neutralité, c’est-à-dire l’absence d’intervention dans ce domaine, devoir de neutralité que Jean-Michel Blanquer transgresse. L’utilisation discriminante de la laïcité ne peut que produire, dans la société et donc dans l’école, une défiance à l’égard de ce principe fondamental.

Nous pensons que le discours de suspicion généralisée est destructeur de la relation pédagogique que nous cherchons à construire avec nos élèves et qui ne peut se fonder que sur la confiance. Pour nous occuper de nos élèves, discuter avec eux, les aider et les accompagner dans leur formation, ce n’est pas d’une liste de « signes de radicalisation » que nous avons besoin : c’est de temps, de moyens, de conditions sereines d’enseignement.

Nous craignons que les discours de nos gouvernant.e.s n’amènent une partie de nos élèves et de leurs parents à se sentir rejeté.e.s par le service public d’éducation. Or, cela risque de détruire tout ce que nous cherchons à construire dans notre travail avec nos élèves.

Enfin, nous nous inquiétons de la violence factuelle et symbolique produite par ces discours, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans un mépris plus large et toujours plus assumé de nos gouvernant.e.s à l’égard des plus vulnérables. Cette violence sociale a des conséquences graves auxquelles nous sommes confronté.e.s quotidiennement et devant lesquelles nous sommes de plus en plus démuni.e.s.

Nous ne sommes pas dupes : comme toujours, en temps de crise économique et sociale, les pratiques religieuses d’une partie de la société sont utilisées à des fins politiciennes pour faire diversion. Au moment même où l’action du Ministre Blanquer est fortement remise en question et où le gouvernement prépare une réforme des retraites très contestée, l’obsession islamophobe est de retour.

Nous affirmons donc que Jean-Michel Blanquer ne parle pas en notre nom. Non, nous ne pouvons pas en même temps respecter, défendre, protéger nos élèves et nous associer aux déclarations de ce gouvernement. Nous ne voulons pas arriver au point de non-retour où des blessures irréparables menaceront définitivement la capacité de la société française à vivre ensemble. Nous disons aux parents de nos élèves qu’ils sont les bienvenu.e.s dans la vie de l’école, quelles que soient ou ne soient pas leurs croyances. Nous remercions tous les parents qui nous accompagnent dans nos actions culturelles et nos sorties, et en particulier toutes les mères d’élèves, qu’elles portent un voile ou non.

La violence qui est faite à nos élèves et à leurs familles est faite à chacun.e d’entre nous. Nous exigeons de nos gouvernant.e.s respect pour les principes républicains et responsabilité. Nous appelons nos collègues et l’ensemble de la société à entrer en résistance et à manifester leur refus du racisme, de l’islamophobie et de toute forme de discrimination.

Voir liste de signataires et lien vers la pétition ici

2 Comments

  1. jmj

    De quoi l’islamophobie est-elle le nom?
    Islamophobie ?!

    L’islamophobie est un terme très à la mode mais qui, finalement, ne veux pas dire grand-chose ou, plus exactement, totalement autre chose que ce que l’étymologie nous enseigne.
    L’islamophobie ce serait donc la haine de l’Islam et par extension, des musulmans.
    Dans la réalité l’islamophobie est surtout une expression qui permet de renouveler le racisme et la xénophobie « à la papa » de la droite et de l’extrême droite, en se réfugiant derrière le paravent de la laïcité pour mieux accabler le « bougnoule » de deuxième ou troisième génération…

    A l’autre bout de l’échiquier politique l’islamophobie arrange bien des personnes et des groupes aux visées peu amènes, souvent franchement islamistes et/ou communautaristes, lesquels se servent, à leur tour, de la laïcité (que, pourtant, ils détestent plus que tout), pour faire avancer leurs idées rétrogrades…tout en embrigadant des gauchistes complaisants.

    En bref le mot islamophobie est un piège à cons que les pouvoirs ultralibéraux utilisent, tel un chiffon rouge devant un taureau, pour lancer des vagues de débats puants et stériles pendant qu’ils font passer par décret le massacre de l’assurance chômage, la poursuite des négociations sur le ceta, le massacre des retraites et bien d’autres saletés encore.

    Arrêtons donc de nous laisser balader alors que l’essentiel est bien la répartition des richesses et la justice sociale qui, seules, feront reculer, naturellement et sans heurts, toutes les formes d’extrémismes, qu’il s’agisse des néo pétainistes ou des salafistes qui, tous deux, prospèrent sur le fumier de la pensée.

    • valérie44

      De quoi l’islamophobie est-elle le nom?
      Islamophobie veut dire, sur le plan éthymologique, peur de l’Islam. Le mot exact pour dire haine de l’Islam, un concept pas plus acceptable, est mysislamie.

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