On se lance dans un petit projet de contributions à une histoire subversive et populaire de l’école en France… Pour débuter, retour sur la lutte des instituteurs et institutrices syndicalistes contre l’Union sacrée et la 1ère GM… Épisode 1 avant 14, la marche vers la guerre
On ne peut comprendre ce qui se passe en 1914 sans remonter à l'instauration par J. Ferry de l'école de la IIIe République – école de la revanche après la défaite de 1870. Pour bcp, cette débâcle est d’abord celle "de l'instituteur français sur l'instituteur prussien"… pic.twitter.com/9qudBWNTdz
— QuestionsdeClasse(s) (@Questions2C) 10 novembre 2018
« Nous voulons pour l'école des fusils ! Oui le fusil, le petit fusil que l'enfant peut manier dès l'école ; dont l'usage deviendra pour lui chose instructive ; qu'il n'oubliera plus, et qu'il n'aura plus besoin d'apprendre plus tard. pic.twitter.com/ynG3ddzxSf
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Car ce petit enfant, souvenez-vous en, c'est le citoyen de l'avenir, et dans tout citoyen, il doit y avoir un soldat toujours prêt » (discours aux instituteurs,18 septembre 1881).
Les bataillons tombent petit à petit en désuétude et deviennent des cours d'éducation physique pic.twitter.com/0ttbFlbHwl— QuestionsdeClasse(s) (@Questions2C) 10 novembre 2018
La devise de la Ligue de l'enseignement, fondée par Jean Macé et qui a milité dès 1866 pour une instruction gratuite est "Pour la patrie, par la plume et par l'épée". Macé rédigera un manuel pour les bataillons scolaires mis en place dans les écoles pour préparer la revanche pic.twitter.com/YvbaoTX5xk
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Quant aux instituteurs et institutrices, eux/elles mêmes formé.e.s de manière quasi militaire dans les écoles normales, ils et elles sont globalement fières de participer à cet enseignement nationaliste… jusqu'à… pic.twitter.com/irlMezeSEL
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… l'Affaire Dreyfus, de l'aveu mêmes des premiers militants enseignants syndicalistes, c'est là que s'opère le tournant. L'affaire décrédibilise les institutions : l'armée, la justice mais aussi la République et son école… pic.twitter.com/jDFa20TDdw
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Quelques institutrices et instituteurs se rapprochent de la CGT. Celle-ci se définit surtout par son antimilitarisme (l'armée sert à réprimer ls grèves) et son internationalisme, mais aussi sa critique de l'école, comme sous la plume de Fernand Pelloutier, animateur des Bourses : pic.twitter.com/jIF3au1L0U
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« Il faut reconnaître que, sous notre Troisième République, l'enseignement populaire n'a subi, au point de vue moral, que quelques transformations anodines, en comparaison avec celui auquel il succédait. […] Les rois y sont également portés sur le pavois du triomphe
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et des chants d'allégresse accompagnent de même leurs exploits belliqueux, préparant ainsi les jeunes cervelles à l'enthousiasme national et à l'esprit de conquête, qui peuvent être funestes aux destinées d'un pays. La patrie est placée au-dessus de tout :
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au-dessus de la justice, au-dessus de la fraternité, au-dessus de l'humanité. La charité y est prônée aux place et lieu de la solidarité réciproque. L'obéissance aveugle, passive, l'automatisme de la brute y sont recommandés ; le respect aux forts et à leur puissance immuable"
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au-dessus de la justice, au-dessus de la fraternité, au-dessus de l'humanité. La charité y est prônée aux place et lieu de la solidarité réciproque. L'obéissance aveugle, passive, l'automatisme de la brute y sont recommandés ; le respect aux forts et à leur puissance immuable"
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Le sous-titre du fameux livre de lecture Le tour de France par deux enfants est d'ailleurs "Devoir et patrie" pic.twitter.com/xCMc5TduVI
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Instituteurs et institutrices commencent cependant à s'émanciper (Émancipations, c'est le nom des premiers regroupements pré-syndicaux) et à se rapprocher de la CGT, non sans mal, la répression s'abat sur les militants et militantes au nom de la fameuse circulaire "Blanquer"
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non "Spuller" ! mais vs allez voir les mots sont les mêmes "L'Autonomie des fonctionnaires a un autre nom, elle s'appelle anarchie, et l'autonomie des sociétés de fonctionnaires, ce serait l'anarchie organisée" ( Blanquer c'est "la liberté pédagogique, ce n'est pas l'anarchie") pic.twitter.com/9Pggbar7kt
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Les émancipations vont faire campagne. Leur programme ? "suppression des "mots archaïques" de "directeurs" et d'adjoints" " et des ouvrages "qui ne s'inspirent pas d'un programme d'enseignement nettement laïque et pacifiste" I
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ils et elles réclament "l'épuration des manuels scolaires, infectés de cléricalisme et de nationalisme" Les bases du syndicalisme révolutionnaires dans l'éducation sont donc jetées (notons aussi la revendication d'égalité de traitement hommes femmes, comme sous la Commune)
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Mais la guerre approche, les ligues nationalistes se déchaînent. Le Zemmour de l'époque s'appelle Edouard Drumont, et on ne lit pas encore Valeurs actuelles mais la Libre parole sous-titré La France aux français pic.twitter.com/tTN9COJSYD
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L'ancêtre des réac-publicains d'aujourd'hui, c'est Emile Bocquillon qui publie un ouvrage intitulé La Crise du Patriotisme à l’École, où il collectera « toutes les preuves » que l’école publique est devenue « l’école sans patrie ». C'est un succès de librairie ! pic.twitter.com/suc5iZgkCo
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En 1904, trois instituteurs parisiens, Comte, Émile Bocquillon et Théodoric Legrand fondent l’Union des Instituteurs Laïques patriotes ((formule très proche du nom du collectif Racine « Les enseignants patriotes »).
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Ils dénoncent « le triomphe de ceux qui prêchent la lutte de classe, la suppression dans l’école de toute autorité et de tout contrôle »
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dénonçant « le triomphe de ceux qui prêchent la lutte de classe, la suppression dans l’école de toute autorité et de tout contrôle » Ce mouvement bénéficie, déjà, d’une large publicité dans la presse nationaliste et cléricale (La Libre Parole, le Gaulois, la Croix…).
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dénonçant « le triomphe de ceux qui prêchent la lutte de classe, la suppression dans l’école de toute autorité et de tout contrôle » Ce mouvement bénéficie, déjà, d’une large publicité dans la presse nationaliste et cléricale (La Libre Parole, le Gaulois, la Croix…).
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Cette Union anti-dreyfusarde lance deux journaux pour propager ses idées L’Avant-garde pédagogique et L’École patriote…
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Mais l'antimilitarisme des syndicats enseignants s'affirment, comme en témoigne l'affaire du Congrès de Chambéry (1912, 16-17 août)
Les congressistes apprennent que la grande presse les accuse de fomenter un complot antimilitariste et antipatriotique— QuestionsdeClasse(s) (@Questions2C) 10 novembre 2018
Cette Union anti-dreyfusarde lance deux journaux pour propager ses idées L’Avant-garde pédagogique et L’École patriote…
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Mais l'antimilitarisme des syndicats enseignants s'affirment, comme en témoigne l'affaire du Congrès de Chambéry (1912, 16-17 août)
Les congressistes apprennent que la grande presse les accuse de fomenter un complot antimilitariste et antipatriotique— QuestionsdeClasse(s) (@Questions2C) 10 novembre 2018
La Croix demande des sanctions énergiques, que le pays "ordonne et attend sur l’heure", et Le Gaulois exige que le gouvernement les révoque pour le crime suprême d’ "antipatriotisme" !
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La Fédé enseignement CGT ajoute 1 article à ses statut "Afin de maintenir ls relations entre ls camarades syndiqués soldats et leur regroupement, il est institué ds chaque syndicat 1 œuvre syndicale, dite"Sou du Soldat", destinée à leur venir en aide moralement et pécuniairement"
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Dès le 23 août 1912, le ministre de l’Instruction publique adresse aux préfets une circulaire leur donnant l’ordre "de mettre immédiatement les syndicats d’instituteurs en demeure de se dissoudre".
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Mais un "manifeste des instituteurs syndiqués" rappelle que le "sou du soldat" est une simple œuvre de solidarité et non la marque d’une manifestation antipatriotique, et se termine par l’expression du pacifisme :
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"(…) Nous croyons tout proche le moment où les conflits internationaux se règleront sans effusion de sang, de par la volonté souveraine des peuples intéressés.
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Et nous ne saurions trop protester contre les excitations chauvines et les manœuvres de politiciens et de financiers qui risquent à chaque instant de provoquer une conflagration générale". (je reprends ici l'excellente synthèse sur le sujet de @CHALOTJF https://t.co/7pR7kTM51J
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La Fédération est défendue par Jaurès à la Chambre des députés : "Le ministre de l’Instruction publique s’est imaginé sans doute qu’il allait sauver le "patriotisme" et la patrie en brisant les syndicats d’instituteurs (…)".
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Mais Jaurès sera assassiné, et le Carnet B utilisé pour arrêter préventivement les subversifs et subversives, dont des instituteurs et institutrices… ce sera la suite de ce petit récit demain : Instituteurs et institutrices dans la guerre
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