Via le blog Mediapart de Jadran Svrdlin

Lors de l’élection présidentielle nous avons choisi de rester allongés paisiblement sur le grill. Il nous reste une dernière chose à régler : le thermostat. A qui va-t-on laisser le soin d’accomplir cette manœuvre? Quelle est la situation réelle des enseignants et quel rôle peuvent-ils jouer dans cette situation où on nous dit que tout est déjà plié?

Les élection législatives désigneront les maitres du thermostat. Si nous laissons le contrôle des commandes à nos actuels gestionnaires, nous finirons bien sûr grillés, et ils pourront nous gérer à loisir tels des pions que nous serons devenus. Car nous ne le sommes pas encore, des pions. Notre puissance actuelle n’est pas nulle. Loin de là. Seulement, sa potentialité reste inaperçue par la plupart de ses possesseurs. Chez les enseignants pas moins qu’ailleurs. 

Si nous ne nous emparons pas de la politique, c’est à dire de l’organisation concrète de notre quotidien, que ce soit au travail ou en dehors de celui-ci, d’autres le feront à notre place. D’ailleurs ils le font déjà. Mais chez nous, pour le coup, beaucoup moins qu’ailleurs. Pour le moment! Nous sommes malgré tout ce que l’on pense, toujours détenteurs d’une souveraineté extraordinaire sur notre travail. Cette souveraineté est composée de plusieurs choses dont la principale est bien sûr la liberté pédagogique. 

Cette liberté-là est le cœur de notre métier. Nous avons, en tant qu’enseignants, des programmes à respecter, mais le choix des chemins que nous emprunterons et ferons emprunter à nos élèves pour atteindre les objectifs fixés sont de notre responsabilité. Par là, c’est notre qualité d’expert qui est reconnue. Cette liberté pédagogique est effective parce que plusieurs autres dispositifs l’assurent. Il s’agit entre autres de règles communes et transparentes concernant les promotions et les mutations des enseignants. En effet, si pour bénéficier d’une augmentation de salaire ou bien d’une possibilité de changer d’établissement d’exercice nous dépendions de la volonté et du jugement d’un ou plusieurs supérieurs hiérarchiques, notre liberté pédagogique, même en étant inscrite sur le papier comme intouchable, ne serait plus que chimère. 

On sait ce qui nous attend au cours de ce nouveau quinquennat de M Macron : la dépossession totale de notre expertise. Il l’a annoncé, martelé sur tous les tons, et il n’y a plus que quelques éditorialistes et syndicalistes de cour qui feignent de ne pas comprendre. Si ce n’était tragique on en rirait. Le président déclare vouloir orienter les élèves dès la 5ème et sur les plateaux on s’indigne de l’indignation provoqué par ces propos que l’on aurait (forcément) mal compris. Le président annonce qu’il ne revalorisera pas les enseignants qui refuseront de faire plus d’efforts et sur les ondes privées comme publiques on nous explique que ce n’est pas vraiment ce qu’il a dit. 

Ce qui nous attend donc n’est pas une remise en cause frontale de notre liberté pédagogique mais la destruction pure et simple de ce qui garantit celle-ci. Sous couvert d’autonomie (maître mot du management néolibéral) il n’y aura plus de règles communes ni transparentes concernant les promotions ni les mutations. En effet, chaque établissement, pour qu’il puisse œuvrer plus efficacement à la “libération des énergies”, pourra recruter lui-même ses enseignants et fixer à terme lui-même le niveau des rémunérations. 

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