La COP25 s’est terminée le 15 décembre 2019 à Madrid : aucunes « actions urgentes » concrètes et aucuns ministres français présents !
Pour le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres : « La communauté internationale a manqué une opportunité importante de montrer son ambition pour répondre à la crise climatique. »
La France, quand elle prend des mesures, c’est pour 2040 comme l’interdiction des plastiques.
Un mépris des enfants et des générations à venir.
Heureusement dans de nombreux pays, des écoliers, des collégiens et des lycéens ont à cœur de mobiliser les jeunes et les moins jeunes sur l’urgence climatique. En septembre 2019, Greta Thunberg et quinze jeunes, âgés de 8 à 17 ans et issus de douze pays, ont porté « l’inaction climatique » de la France, l’Argentine, le Brésil, la Turquie et l’Allemagne devant le comité des droits de l’enfant de l’ONU.

La Convention internationale des droits de l’enfant devrait être la référence première de toutes les politiques publiques que ce soit au niveau national ou international. Pas une seule réforme, loi, décret, circulaire… ne devraient être adoptés sans prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant. Pour ce faire, l’audition, la consultation, la participation coopérative des enfants en seraient un préalable incontournable.
Tous les droits humains risquent d’être mis à mal par les dérèglements climatiques à venir.
Les États signataires de l’Accord de Paris sont conscients « que les changements climatiques sont un sujet de préoccupation pour l’humanité tout entière et que, lorsqu’elles prennent des mesures face à ces changements, les Parties devraient respecter, promouvoir et prendre en considération leurs obligations respectives concernant les droits de l’Homme, le droit à la santé, les droits des peuples autochtones, des communautés locales, des migrants, des enfants, des personnes handicapées et des personnes en situation vulnérable et le droit au développement, ainsi que l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et l’équité entre les générations. »
Cette année encore, aucun pays ne peut se prévaloir de garantir à chacun une protection et des perspectives égales, ainsi que le plein exercice de ses droits fondamentaux — pas même les pays considérés comme les plus riches et les plus développés.
Même si les enfants et les jeunes d’aujourd’hui sont fortement impactés par les effets du réchauffement liés aux choix politiques et économiques passés et présents, leur intérêt, leur avis, leur opinion ne sont guère pris en compte dans les débats nationaux et internationaux sur le dérèglement climatique.

Il suffirait d’appliquer la Convention
Dans la première partie de l’article trois : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.
Quant à la participation de la jeunesse à l’élaboration des politiques même locales, elle est très rare. Son avis n’est pas guère entendu, même si dans l’article 12 : 1. Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. 2. A cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale.
Pourtant associer les enfants et les jeunes aux projets politiques que ce soit dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’alimentation, de la protection des enfants, des jeunes, des familles… serait essentiel pour assurer l’avenir et l’émancipation de tous les humains.
Et ces projets déborderaient d’idées nouvelles pour l’utilisation de sources d’énergie renouvelable, pour renforcer l’éducation environnementale dans les écoles et les espaces éducatifs, pour soutenir les humains dont les moyens de subsistance sont menacés et pour améliorer les dispositifs de prévention et de protection des catastrophes telles que les tempêtes, les inondations et les sècheresses.
La nécessité de ralentir le dérèglement climatique, de limiter les effets du réchauffement, de créer des systèmes de protection, des lieux vivables doivent pour advenir associer les enfants et les jeunes à leur élaboration, à leur mise en œuvre et à leur suivi.
Les enfants d’aujourd’hui sont les adultes de demain, initions ce cycle de participation le plus tôt possible pour qu’une petite chance de survie de l’humanité existe.

Le 11 décembre 2019, Greta Thunberg prend la parole lors de la COP 25.

greta-thunberg-cop-25-unfcc.jpg

Bonjour,
Il y a un an et demi, je ne parlais à personne, sauf quand j’avais vraiment à le faire. Mais par la suite, j’ai trouvé une raison de parler. Depuis lors, j’ai donné beaucoup de discours, et appris que lorsqu’on parle en public, il est conseillé de commencer par quelque chose de personnel, d’émotionnel, pour attirer l’attention de tout le monde. Dire des choses comme “Notre maison est en feu”, “Je veux que vous paniquiez”, ou “Comment osez-vous”. Mais aujourd’hui, je ne ferai pas cela. Parce que ces phrases, c’est tout ce sur quoi les gens se concentrent. Ils ne se souviennent pas des faits, la raison initiale pourquoi je dis ces choses. Nous n’avons désormais plus assez de temps pour laisser de côté ces faits scientifiques. Pendant un an, j’ai constamment parlé, en boucle, de notre budget carbone déclinant rapidement. Et puisque c’est toujours ignoré, je vais tout simplement continuer à le répéter.
Dans le chapitre 2 de la page 108 dans le rapport SR 1.5 du GIEC (IPCC) sorti l’année dernière, il est dit que si nous voulons avoir 67% de chances de limiter la température en dessous de 1,5°C, nous avions, au 1er janvier 2018, 420 gigatonnes de CO² restant à émettre. Et, évidemment, ce nombre est bien plus bas maintenant, puisque nous émettons environ 42 gigatonnes de CO² chaque année, en incluant l’utilisation des terres. Avec des niveaux d’émissions actuelles, ce budget carbone sera complètement épuisé d’ici huit ans. Ces chiffres ne sont pas l’opinion subjective de quelqu’un, ni un point de vue politique, c’est la meilleure analyse scientifique au jour d’aujourd’hui. Même si certains scientifiques pensent que ces chiffres sont encore sous-évalués, ce sont les chiffres qui ont été acceptés par le GIEC. Et notez bien que ces chiffres sont globaux, et ne considèrent pas l’équité, qui est absolument essentielle pour faire fonctionner l’accord de Paris à un niveau mondial.
Cela veut dire que les pays riches doivent faire leur part et arriver à zéro émissions, bien plus vite, et aider les pays plus pauvres à faire de même, de manière à ce que les gens de ces pays moins fortunés puissent augmenter leur niveau de vie.
Ces nombres n’incluent pas non plus la plupart des boucles de rétroactions, les points de basculement non-linéaires, ou les réchauffements additionnels cachés par la pollution toxique de l’air. Nombre de modèles scientifiques partent de l’idée, par contre, que les générations à venir vont être capables d’absorber des milliers de tonnes de CO² de l’air en utilisant des technologies qui n’existent pas à l’échelle requise, et n’existeront peut-être jamais. Le budget approximé avec 67% de chances, est celui donné par le GIEC avec le plus de probabilité. Et désormais nous n’avons plus que 340 gigatonnes de CO² restant à émettre, à partager équitablement.
Pourquoi est-ce si important de rester en dessous de 1,5°C ? Parce que même avec un degré, des gens meurent à cause de la crise climatique. C’est ce que la science unie appelle à : éviter de déstabiliser le climat, de manière à ce qu’on ait le plus de chance possible d’éviter des réactions en chaine, tels que des fontes de glacier, ou la fonte du pergélisol arctique. Chaque fraction de degré a une importance cruciale. Voici de nouveau mon message ; ce sur quoi je veux que vous vous concentriez. Donc dites-moi, s’il vous plait, comment est-ce que vous réagissez à ces chiffres sans sentir, à minima, un certain degré de panique ? Comment réagissez-vous au fait qu’au fond rien n’est véritablement fait contre cela, sans ressentir le moindre fragment de colère ? Et comment pensez-vous communiquer cela, sans donner l’impression d’être alarmiste ? J’aimerais vraiment le savoir.
Depuis l’accord de Paris, les banques mondiales ont investi 1,9 billions de dollars américains dans les combustibles fossiles. 100 entreprises sont responsables de 71% des émissions mondiales. Les pays du G20 totalisent environ 80% des émissions totales. Les 10% les plus riches produisent la moitié des émissions de CO², pendant que les 50% les plus pauvres ne totalisent qu’un dixième. Nous avons effectivement collectivement du travail à faire …
Mais certains plus que d’autres. Récemment, une poignée de pays riches à promis de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de tel ou tel de pourcent à telle ou telle date, ou de devenir “climatiquement neutre” ou “zéro émissions” en un certain nombre d’années. Cela peut sembler impressionnant à première vue, mais même si l’intention peut être honorable, ce n’est pas une façon de gouverner, mais une façon de tromper les gens (1). Parce que la plupart de ces engagements n’incluent pas l’aviation, le transport maritime, les biens importés et exportés, la consommation ; ils incluent par contre la possibilité des pays de compenser leurs émissions ailleurs. Ces engagements n’incluent pas le taux annuel de réduction d’émission requis pour les pays riches, qui est nécessaire pour rester dans le petit budget carbone restant. Zéro carbone en 2050 ne signifie rien si des émissions élevés continuent même si ce n’est que pour quelques années, car le budget carbone restant sera alors épuisé.
Sans avoir une vue d’ensemble, nous ne résoudrons pas cette crise. Trouver des solutions holistiques devrait être tout le sujet de la COP. Mais au lieu de cela, il semble que cela soit devenu un moyen opportuniste des pays de négocier des échappatoires et éviter de réhausser leurs ambitions.
Les pays trouvent des moyens ingénieux autres que prendre des actions véritables, comme compter en double des réductions d’émissions, déplacer leurs émissions ailleurs, et revenir en arrière sur leurs promesses d’augmenter leurs ambitions, en refusant de payer pour des émissions et leurs dommages.
Tout ceci doit cesser. Ce dont nous avons besoin, ce sont de réelles coupes drastiques des émissions à leur source. Mais évidemment, simplement réduire les émissions n’est pas assez. Nos émissions de gaz à effet de serre doivent cesser. Pour rester en dessous de 1,5%, nous devons laisser le carbone dans le sol. Simplement mettre en place des dates butoirs distantes, et dire des choses qui donnent l’impression qu’une action pour le climat est en cours, va probablement faire plus de mal que de bien, parce que les changements requis ne sont toujours nulle part en vue. Les décisions politiques nécessaires n’existent pas aujourd’hui, malgré ce que vous pourriez entendre de la part des dirigeants du monde. Et je continue à penser que le plus grand danger n’est pas dans l’action, mais dans le fait que les politiciens et les PDG donnent l’impression qu’une véritable action est en cours, quand en réalité, rien n’est véritablement fait, en dehors d’une comptabilité maligne, et d’inventivité dans les relations publiques.
J’ai eu assez de chance pour pouvoir voyager à travers le monde. Et l’expérience que j’en ressors est que le manque de conscience du problème est le même partout, et pas le moins parmi ces dirigeants élus. Il n’y a aucun sentiment d’urgence. Nos dirigeants ne se comportent pas comme s’il y avait une urgence : dans une urgence, on est censé changer son comportement. S’il y a un enfant au milieu de la route et des voitures arrivant à vive allure, on ne regarde pas ailleurs parce que c’est trop inconfortable, on accourt immédiatement pour sauver l’enfant. Or sans ce sentiment d’urgence, comment nous, les gens du peuple, pouvons comprendre que nous avons à faire à une urgence réelle ? Si les gens ne sont pas complètement conscients de ce qui se passe, ils ne vont pas presser les gens au pouvoir pour que ces derniers agissent. Et sans cette pression du peuple, les gens au pouvoir peuvent s’en sortir en ne faisant au fond rien de tangible ; c’est là où nous en sommes à l’heure actuelle : la situation stagne et tourne en boucle.
Dans juste trois semaines, nous entrerons une nouvelle décennie. Une décennie qui déterminera notre futur. Aujourd’hui nous sommes désespérément en recherche d’un quelconque signe d’espoir. Mais je vous le dis : il y a de l’espoir ; je l’ai vu. Cependant, il ne vient pas des gouvernements ou des grosses entreprises. Il vient des gens, du peuple. Les gens qui n’étaient pas au courant, mais commencent à se réveiller. Et une fois qu’on est au courant, on change. Les gens peuvent changer. Ils sont prêts pour ce changement. Et c’est un espoir, parce que nous avons des démocraties. La démocratie, ça a lieu tout le temps, pas seulement le jour des élections, mais chaque seconde et chaque heure. C’est l’opinion publique qui dirige le monde libre. En réalité, tout grand changement dans l’Histoire vient du peuple. Nous n’avons pas à attendre, nous pouvons commencer ce changement dès maintenant. Nous, le peuple. Merci.
Traduction par François Braud

Discours de Greta Thunberg : https://medium.com/@phrounz/discours-de-greta-thunberg-%C3%A0-la-cop25-fd29018aad95