Suite de notre fil sur les instituteurs et institutrices syndicalistes dans la 1ère Guerre mondiale…

Bon, comme annoncé, on reprend notre petit fil pour une petite histoire subversive et populaire de l'école en France avec l'action des syndicalistes de l'enseignement contre la guerre et l'union sacrée… pic.twitter.com/fHW0wXV6Of

— QuestionsdeClasse(s) (@Questions2C) 11 novembre 2018

Pierre Monatte, une des plus belles figures du syndicalisme français, écrivit cet hommage à la Fédération de l'enseignement de la CGT : « Bien peu de fédérations et de syndicats ont résisté aussi bien que les vôtres, camarades instituteurs et institutrices. pic.twitter.com/3DHeUOPea3

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… Votre École est, si je ne me trompe, le seul organe syndicaliste révolutionnaire qui ait su à la fois rester fidèle à son passé et paraître régulièrement durant ces mauvais jours. Vous pouvez en ressentir un légitime orgueil, puisque leur résistance, c'est la vôtre. »

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La Fédération ds syndicats d'instituteurs fut la seule fédé, au sein de la CGT, à mener 1 combat sans merci contre la guerre et à refuser, d'un bout à l'autre du conflit, la politique d'Union sacrée. Cette détermination fut le fait de quelques hommes et de quelques femmes. pic.twitter.com/AZQcLCQOuy

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Dès1904, la Revue de l'enseignement réclame un synonyme au mot « patriotisme » qu'on ne pouvait plus utiliser alors « sans faire le jeu de la réaction et du parti prêtre ».

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Principale publication professionnelle, la Revue de l'enseignement propose ds leçons péda. teintées de pacifisme et dénonce ls poésies ou ls chants patriotiques. Le journal anarchiste Les Temps nouveaux invitent quant à lui ls enseignants à boycotter tte propagande nationaliste.

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«… à mesure que le péril guerrier montait, la Fédéra­tion et l'École émancipée, épaulant directement l'action de la CGT et indirectement la campagne admirable de Jaurès et du PS essayaient de barrer la route aux forces d'abrutissement et de tuerie. Ce fut en vain » Dommanget pic.twitter.com/qGIszFxC2G

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Lorsque la guerre éclate, la Fédération ne compte encore qu'une poignée d'adhérents (un instituteur sur quarante !). La mobilisation va vider la structure de ses forces militantes, d'autant que la plupart ds hommes qui la composent sont encore jeunes et doivent rejoindre le front

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le bureau fédéral se trouvae réduit à la secrétaire-adjointe, Hélène Brion, & au trésorier, F. Loriot le bureau semble se rallier d'abord à la « vague chauvine ». En quelques semaines, les pacifistes d'hier se rallient au patriotisme le plus sanglant, à l'image de Gustave Hervé

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ancien professeur révoqué, symbole de l'extrême gauche antimilitariste, qui retourne « sa veste rouge pour en montrer la doublure tricolore » (selon la formule de Charles Fraval). Lui qui signait ses premiers articles « Sans patrie » devient 1 farouche partisan de l'Union sacrée pic.twitter.com/aBhhMh2p1v

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il est loin d'être un cas isolé, même dns ls rangs ds syndicalistes ou ds anarchistes. Restes quelques syndiqués plus âgés ou réformés, comme Louis Bouët, qui vont consacrer leurs efforts à poursuivre la publication de L'École émancipée et à lutter contre le « bourrage de crâne » pic.twitter.com/13b0uqy8ZZ

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Un arrêté du 24 octobre 1914 – il ne sera abrogé que plusieurs mois après la guerre ! – en suspend la publication au motif d'avoir « 1° inséré des articles de nature à exercer sur l'esprit des instituteurs des idées d'internationalisme évident

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2°[d'avoir] publié un article nettement hostile à la Commission de censure de Marseille instituée par ordre de M. le Ministre de la Guerre.

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3° Pour ne ps avoir tenu compte ds observations qui furent faites aux rédacteurs de cette revue par la Commission de censure elle même qui en a référé à M.l'inspecteur d'Académie de Marseille d'avoir à changer l'esprit de ce périodique. » (extrait de l'arrêté de suspension)

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La commission de censure : « …Nous avons trouvé autre chose dans votre journal. Ainsi dans un de vos articles vous appelez les Allemands "nos frères"; de plus dans un autre article vous avez inséré une phrase en allemand.

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La phrase allemande incriminée est en réalité 1 citation du pédagogue suisse Pestalozzi dns un article d'Eugénie Ravet sur l'école maternelle La revue doit changer de titre, ce fut d'abord L'École, puis L'École de la Fédération du fait de l'existence d'1 revue catho du même nom pic.twitter.com/RTyQwsK4cX

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Le premier numéro de l'année scolaire 1914-1915 reproduit un appel de Marie Guillot « Pourquoi nous égorger mutuellement, Français, Allemands, Russes, Autrichiens, masse de gens qui demandent seulement la paix et du travail. » La conclusion est caviardée pic.twitter.com/B1xoJNLefu

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Les institutrices assurent la diffusion auprès des abonnés. Du fait de leur rôle déterminant, ces militantes, à l'image de Gabrielle Bouët ou de Julie Bertrand, sont surveillées, font l'objet d'enquêtes ou de procès pouvant mener, pour cette dernière, à la révocation.

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Déjà déplacée d'office à 2 reprises pour « délit d'opinion » en 1905 et 1912, elle est arrêtée (elle est inscrite au fameux Carnet B) puis révoquée « pour avoir émis sur l'attitude à observer en cas de guerre par le peuple ds idées qui sont la négation même de l'idée de patrie »

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L'École émancipée ouvrira une souscription pour lui assurer son traitement. Elle sera finalement accueillie comme institutrice au sein de l'école libertaire la Ruche de Sébastien Faure. pic.twitter.com/CY3hIbiVhQ

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Ceux et celles qui restent « à l'arrière » sont donc également mobilisés pour participer à l'effort de guerre. Il s'agit, par des récitations, des leçons de patriotisme, des rédactions, des lectures, etc. de rendre hommage à l'héroïsme national.

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Ls inspecteurs veillent scrupuleusement à ce que ls enseignants tiennent le rôle qui doit être le leur : expliquer aux enfants pourquoi leur père et leurs frères se battent, sensibiliser les familles aux dangers d'une paix immédiate, assurer l'hommage aux morts pour la Patrie.

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Dans la brochure Les Instituteurs syndicalistes et la guerre, qui leur vaudra révocation et emprisonnement, les époux Mayoux s'insurgent contre ce rôle de « missionnaires de la haine » qu'on veut faire jouer aux éducateurs. pic.twitter.com/xh3QNcFcU3

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Si la plupart des enseignants, encouragés par les Amicales toutes acquises à l'Union sacrée, se mettent au service de la politique guerrière, la « petite » fédération CGT de l'enseignement ne plie pas.

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Toute au long du conflit elle s'insurge contre la propagande au sein des établissements scolaires : elle dénonce la distribution d'une brochure de l'administration intitulée Leurs crimes, elle alerte l'opinion sur le projet de rétablir la préparation militaire à l'école,

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elle proteste contre les journées de toutes sortes qui s'inscrivent au calendrier scolaire : « journée serbe », « journée du canon de 75 », « récolte de l'or », etc.

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l'ensemble de la fédération s'engage dans la lutte contre la guerre et se fait représenter aux rencontres socialistes internationales contre la guerre à Zimmerwald (5-8 septembre 1915) et Kienthal (24-30 avril 1916).

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Brion et Loriot s'activent au sein du Comité pour la reprise des relations internationales avec Trotsky. La répression s'en trouve accentuée, contre la revue, qui paraît avec de plus en plus de « blancs » et contre les militants et les militantes, menacés de révocation.

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Le congrès de 1916 réitère la position pacifiste. Celui de 1917 est interdit, mais les congressistes se réunissent clandestinement. À partir de 1917, les mutineries conduisent le pouvoir à renforcer la répression et la surveillance de la population.

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Les plus timorés des opposants à la guerre font profil bas. Pas la Fédération. De leur propre initiative, les époux Mayoux publient une brochure « Les instituteurs syndicalistes et la guerre », sans la soumettre à la censure.

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Cet acte leur vaut une peine de deux ans d'emprisonnement. D'autres militants subissent des perquisitions, des procès, des révocations, des déplacements d'office, etc.

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Cet acte leur vaut une peine de deux ans d'emprisonnement. D'autres militants subissent des perquisitions, des procès, des révocations, des déplacements d'office, etc.

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Hélène Brion, institutrice et secrétaire générale du syndicat des instituteurs et des institutrices, est traduite en conseil de guerre et inculpée en 1918 pour traîtrise et défaitisme du fait de son pacifisme : « Je suis ennemi de la guerre parce que féministe. pic.twitter.com/YHJMQzUlFB

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La guerre est le triomphe de la force brutale, le féminisme ne peut triompher que par la force morale et la valeur intellectuelle » déclare-t-elle à son procès. Elle sera condamnée à 3 ans de prison avec sursis et révoquée.

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Lucie Collard, institutrice dans le Jura, est d'abord « censurée » par le Conseil départemental pour « pacifisme anti-patriotique et germanophilie ». Elle sera ensuite déplacée d'office, puis incarcérée. Le Conseil militaire la condamne à 2 ans de prison ferme

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Morel, instituteur à Thonon est condamné à trois mois de prison et 500 francs d'amende pour « propos fâcheux » sur la guerre. Il sera finalement acquitté. Cancel, répétiteur à Limoges est incarcéré.

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Louis Bouët est menacé de révocation pour avoir soutenu publiquement ses camarades réprimés. Tout comme Loriot, Henriette Izambard et Grimaldi. Les deux premiers seront déplacés d'office. Déplacement également pour Calzan et Cuminal, militants du syndicat du Rhône.

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Josette et Jean Cornec sont « censurés » pour avoir refusé de commenter en classe les affiches de propagande.
Madeleine Vernet est inculpée pour avoir publiée une brochure en faveur d'Hélène Brion. pic.twitter.com/TNpLAGMmMJ

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Au front, deux instituteurs seront fusillés pour « défaitisme » (dont le fameux Théophile Maupas). Plusieurs participent, à côté de leurs camarades, aux mutineries et passent en conseil de guerre. De nombreuses figures du syndicalisme révolutionnaire succombent au combat…

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Il est à noter que seulement 3 députés votèrent contre les crédits de guerre en 1916: Raffin-Dugens, Alexandre Blanc et Pierre Brizon, tous enseignants et syndiqués. Un quatrième élu, lui aussi instituteur, Roux-Costadau, les rejoint en 1917.

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Le congrès de la fédération, tenu clandestinement vote une nouvelle résolution contre la guerre « Les institutrices et instituteurs syndiqués affirment de nouveau leur opposition irréductible à la guerre entre nations, massacre organisé des peuples…

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cause de misère et de ruine pour l'humanité, triomphe du mensonge, de la haine, de l'injustice, de la barbarie. Ils rappellent aux camarades des autres organisations que seule est légitime et nécessaire la lutte de classe,

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la lutte des travailleurs de tous pays contre ceux qui les exploitent et les oppriment. Ils regrettent que des militants syndicalistes, après avoir travaillé pour la paix, s'emploient maintenant à contenir la classe ouvrière, semant ainsi la confusion,

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favorisant la continuation de la tuerie.
Ils envoient leur salut fraternel aux révolutionnaires russes qui ont fait la paix dans leur pays et s'efforcent d'y réaliser le socialisme.

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Ils condamnent toute intervention directe ou déguisée des Alliés en Russie malgré la volonté évidente du peuple russe.
Et, fidèles aux principes de Zimmerwald et de Kienthal, ils décident de continuer résolument leur propagande en faveur de la paix. » 59 pour, 3 contre, 7 abst

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Avant même la fin des hostilités, la Fédération se lance dans une longue campagne pour l'amnistie des militants réprimés. Il faudra attendre dix longues années pour qu'elle aboutisse à la réintégration des militants.

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Le tribu payé par les syndicalistes enseignants est lourd. Chaque syndicat compte ses morts, ses adhérents et adhérentes révoquées ou brisées. En tout, sur les 35 817 instituteurs mobilisés tout au long des quatre années que dura le conflit, 8119 furent tués au front

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soit le quart ds combattants ; les blessés et les gazés représentent près d'1 tiers des effectifs. Après 1918, le sentiment pacifiste ne cessera de se renforcer.
L'histoire du syndicalisme, celle de la pédagogie fut transformée par cette boucherie… mais on en reparlera demain

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