Un très beau texte d’Eveline Charmeux sur son blog, en voici quelques extraits pour vous donner envie de le lire dans son intégralité

A l’école, les “fondamentaux” n’ont rien de fondamental

[…] Il n’est qu’à se plonger dans les programmes de nos candidats-présidents : le chapitre sur l’éducation y fait penser à une sorte de bâtisse, solidement et visiblement pavée d’intentions excellentes (enfin… pas toutes!), avec des murs de soutiens financiers et de postes supplémentaires, tapissée de grands principes, mais pleine de courants d’air, et généralement présentée non meublée, à l’exception de certains qui dotent la leur d’un mobilier d’occasion, exhumé d’une vieille brocante d’avant-guerre, les “fondamentaux” : lire, écrire et compter.
Et si nos enfants avaient besoin d’autre chose ?

[…] Comme on n’a pas de temps à perdre, et qu’il y a des économies à faire, il suffit de doubler la ration des savoirs “simples”, dits “de base”, pour qu’ils entrent mieux et plus durablement dans leurs têtes.
L’intérêt de ce “minimum vital”, outre son prix modique et l’existence sur place d’outils de transmission rapide qui économisent la recherche, devenue inutile, est qu’il n’encombre pas la tête de certains indésirables avec des savoirs subversifs qui ne les concernent pas, et dont ils ne feraient qu’un usage désastreux pour ceux qui dirigent : en fait, c’est pour ces derniers que ce minimum est “vital”.

Problème : les élèves ne sont pas des être vides à remplir, ce sont des personnes, des partenaires du grand jeu éducatif, et qui ne se laissent pas faire. Ils ont un fonctionnement spécifique, une expérience de la vie à eux, des souvenirs, des rêves, et des savoirs acquis depuis leur naissance, et même avant, autant de données incontournables, auxquelles il faut ajouter le droit de dire non au jeu en question. Leurs savoirs, n’en déplaise à ceux que cela fait ricaner, ils les ont construits, à leur manière, et ne les ont pas reçus tout faits.
Il est amusant de voir comme les partisans, les plus farouches, d’une transmission imposée de savoirs préemballés, sont ceux-là mêmes qui se glorifient d’avoir construit tout seuls leur fortune, sans l’avoir reçue telle quelle en héritage : curieuse contradiction si l’on songe que la culture est tout de même la plus importante des richesses !

[…] Certes, on ne demande pas à un gouvernement, actuel ou futur, de définir une pédagogie : ce n’est pas son travail et il n’en a pas la compétence. En revanche, on attend d’un futur président, qui affirme, comme presque tous ses collègues-candidats, vouloir défendre la démocratie, qu’il manifeste au moins le désir de voir l’école la faire vivre pour l’enseigner à tous, qu’il dise souhaiter voir disparaître l’esprit de compétition des classes, au profit d’un travail d’équipe, pour les élèves et pour leurs enseignants, et qu’il prévoie d’orienter en ce sens la formation de ces derniers.
Les véritables “fondamentaux” de l’école sont là.
C’est par là qu’il fallait commencer pour mettre en route la refondation de l’école.
Il en fut fait autrement, et l’on en connaît le résultat.
Quant à démolir les timides réformes proposées, tant pour le collège que pour le primaire, pas sûr du tout que cela n’aggravera pas les choses. […]