Car la mort de Louis Legrand, si elle porte naturellement à la tristesse, ne doit pas avoir comme sens le deuil des tentatives pédagogiques.

Alain Savary, « le » ministre de l’Education nationale dont on est heureux de se réclamer après la grande figure de Jean Zay 5(cf. http://www.questionsdeclasses.org/luttes-et-ratures/?Vers-l-education-nouvelle-mars ) n’est pas seulement celui qui a permis la naissance des lycées expérimentaux et qui a perdu la bataille contre le privé. Il voulait aussi donner le feu vert à Louis Legrand, qui publiait en 1982 son rapport « Pour un collège démocratique » et devait devenir directeur des collèges.

C’était sans compter avec la sainte alliance de fait entre le SNES, à l’époque beaucoup plus puissant qu’aujourd’hui , et les anti-pédagos. Leur puissance conjuguée fait reculer le ministre, qui ne nomme pas Legrand au poste prévu, et quand Chevènement reprend le ministère en 1984, on tourne la page dans ce domaine-là aussi.

Mais que proposait Louis Legrand de si incendiaire ? La « pédagogie de projet », l’interdisciplinarité, le tutorat, le travail d’équipe, et ce pour tous, agrégés inclus. En termes d’heures : 16 h de cours, 3 h de tutorat, 3 heures de concertation, au lieu des 18 h de cours (15 h pour les agrégés) et de la concertation dans les mailles des emplois du temps si on veut et quand on peut. De qui faire s’étrangler corporatistes et réacpublicains.

N’empêche : si ce progressiste sincère (mais oui, il en existe à tous les étages de l’institution!) a échoué, il nous a aussi passé le relais ! A nous de convaincre la profession que routiner décennie après décennie ne conduit qu’à l’échec des élèves et des enseignants, tout particulièrement en ce qui concerne le collège.

Jean-Pierre Fournier