Notre attitude face à la peur- KroniKs 588 et Graines d’Orties

De plus en plus , au fil de la destruction du lien et des structures sociales, nous autres , acteurs , nous prenons conscience que ce qui va être déterminant , c’est notre attitude vis à vis de la peur.

Dans une société , socialement protégée, intégrée, la peur était, elle aussi, gérée, c’est à dire, réduite à des situations d’urgence et particulières. C’était le règne de la peur exceptionnelle

Aujourd’hui, à l’inverse, la peur est devenue la matière même de notre quotidien, de nos relations, et de nos projets. Nous devons compter avec elle .

Nous avons à l’apprivoiser comme on l’explique aux jeunes enfants dans de très beaux albums jeunesse où la peur est illustrée par des monstres effrayants mais sympathiques.

Il y a deux manières , à ce qu’il semble pour des acteurs sociaux d’appréhender la peur liée à leur action: nous pouvons la fuir ou l’affronter; la mettre de côté ou la regarder en face. Nous pouvons nous sentir forts ou faibles face à elle.

En travaillant au plus près des familles , d’enfants confrontés à ce que la violence sociale et institutionnelle a de plus terribles,[bleu] nous prenons aujourd’hui des leçons de peur.[/bleu] Nous apprenons à vivre avec, à nous l’inoculer, à la démystifier. Nous apprenons à être inventifs face à elle comme le sont les enfants et les adultes qui nous sont si proches.

[rouge]Où formera t on les travailleurs sociaux à la peur inévitable face à l’importance de leur action?[/rouge] Dans des écoles de la précaution? Dans des universités du retrait? Dans des stages de distance? Par des parcours professionnels d’évitement?

Ou alors est ce qu’on s’y colle, est ce qu’on y va? Est ce qu’on invente? Est ce qu’on produit ? Est ce qu’on crée?

La Pédagogie sociale invite ici et maintenant à travailler avec , malgré et peut être aussi grâce à la peur. Celle ci nous tient éveillés, attentifs, conscients. Elle favorise, rend nécessaire de nouvelles alliances qui étaient improbables.

[rouge] L’homme sans souci n’est pas social .[/rouge] Nous travaillons aujourd’hui à faire progresser le souci, à l’enrichir d’humour, de sensibilité et de créativité.

La peur pousse en général, à 3 réactions: l’immobilisme, l’agressivité , o u à la fuite.

Aujourd’hui, ce sont ces trois réactions qui s’imposent comme logiques mêmes des réactions à tous les étages de la société. Et nous nous heurtons partout , en effet, à l’agressivité , à la fuite et à l’immobilisme. Nous en sommes débordés.

Nous oublions cependant une quatrième alternative; celle-ci est sociale: l’alliance, la communauté.

La peur pousse à s’allier, à se regrouper, à se protéger et à se réunir.

C’est bien cette quatrième possibilité, celle qu’on voit tellement dans les films (de catastrophe et si peu dans la vie), que prépare et travaille la Pédagogie Sociale.

Dans nos ateliers de rue, de bidonville, dans notre travail global et durable auprès de ceux que les institutions ne perçoivent plus globalement et durablement,[rouge] nous construisons des communautés de courage[/rouge] et d’initiatives.

Célestin Freinet: Elargir le domaine de la Pédagogie.

« Élargir le domaine de la pédagogie a toujours été un de nos mots d’ordre. Nous avons montré bien souvent comment le capitalisme obscurantiste sert sa domination en cantonnant l’action éducative entre les quatre murs de la classe, dans les pages mortes des manuels. Si nous voulons, par l’éducation, féconder vraiment l’action sociale et humaine, nous devons, moins que jamais, redouter la vie et la lutte. L’heure est plus que jamais propice. Œuvrez pour le rassemblement des organisations d’enfants prolétariens ; préparez le rassemblement des parents prolétariens. C’est le service le plus grand que vous puissiez rendre actuellement à la cause de l’éducation nouvelle, à la cause de nos techniques. »

in l’Educateur prolétarien – 10 Juillet 1935, cité par C . Chabrun

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Graines d’orties

Association Intermèdes-Robinson