Le discours républicain sur l’école dénonce sa marchandisation et celle des savoirs. Pourtant, l’existence d’une notation des élèves constituait déjà un instrument qui permettait d’introduire plus facilement la logique concurrentielle du marché au sein même du système scolaire.

Le collège unique: illusion d’une grande classe moyenne

Avec le collège unique, la société capitaliste a assuré l’illusion libérale d’une société constituée d’une grande classe moyenne composée d’individus libres. Amener 80 % d’une classe d’âge au bac, puis 50 % à la licence, c’est donner l’illusion que la société n’est plus divisée en classes sociales, mais qu’une partie importance de la société voit son statut social s’élever et appartient à la classe moyenne.

Néanmoins, cela revient à inverser les causes et les conséquences. En effet, toute la difficulté tient au fait que le niveau de certification scolaire et le marché de l’emploi ne sont pas nécessairement en adéquation. En effet, ce n’est pas parce que 50 % d’une classe d’âge possédera une licence que l’ensemble de ces individus accéderont à des emplois de professions intermédiaires et à la classe moyenne.

L’institution de la notation

Pour renforcer cette illusion, le libéralisme a trouvé au sein de l’école républicaine un mécanisme permettant de transformer l’institution scolaire en marché capitaliste, c’est le système de la notation.

A l’origine, l’institution de la notation, dans son sens républicain, est sensée organiser les règles formelles de la méritocratie républicaine. Tout comme le beruf de l’éthique protestante, le travail scolaire et la note qui la suit est le signe d’une élection. Elle consacre les aptitudes innées de chacun dans la société et la place qu’il doit y occuper.

Néanmoins, le système de la notation permet d’assurer le passage entre l’école comme institution religieuse républicaine à l’esprit du capitalisme scolaire.

En effet, l’institution de la notation peut être investit par le néolibéralisme avec un autre sens. Elle permet de présenter la réussite scolaire sur le modèle de la carrière professionnelle. Il s’agit d’une concurrence interindividuelle entre des acteurs économiques pour accéder aux meilleurs filières dans le secondaire et après le bac, puis aux meilleurs emplois.

De fait, l’école républicaine ne constitue pas un rampart au néolibéralisme car elle possède en elle-même des mécanismes de notation qui sont en homologie avec le fonctionnement du néolibéralisme.

Cette présentation de la compétition scolaire comme un marché où règne une concurrence pure et parfaite est bien évidement là aussi une illusion. Le marché scolaire ne fait que reproduire les inégalités scolaires. Mais il donne également l’illusion de classer les élèves en fonction de leur mérite, de leur travail personnel. C’était déjà une illusion présente dans la méritocratie républicaine.

Le lien qui a été établit idéologiquement entre certification scolaire et l’accès à l’emploi a une seconde conséquence, il contraint les individus à choisir leurs études en fonction de ce qui devrait leur permettre le mieux d’accéder à un emploi.

Organiser la concurrence entre individus dès l’école primaire, c’est construire les individus comme de futurs acteurs du marché, comme des homo oeconomicus.

Conclusion: Il est alors possible de douter comme l’affirme le discours républicain que ce soit les pédagogies actives qui en elles-mêmes ont constituées un cheval de Troie du néolibéralisme, car avec l’existence de la notation, il existait déjà un système au sein de l’école républicaine qui présentait une homologie avec le marché.