Dans un temps lointain mais pas mythique (les années 1900), les instituteurs allaient à l’école… de la classe ouvrière pour y prendre des leçons de syndicalisme certes, mais aussi de positionnement social.

C’était l’époque de l’émergence d’un syndicalisme de classe, aux horizons largement ouverts même s’ils nous paraissent aujourd’hui naïfs et bien optimistes. Mais aussi à mille lieux des combats catégoriels.

Cette belle époque, au double sens du terme, est définitivement révolue, nous n’y retournerons pas plus qu’au temps des Jacqueries ou de la prise de la Bastille.

Comment franchir aujourd’hui le fossé entre les catégories relativement privilégiées du salariat, dont les professions enseignantes font partie, les « gros bataillons de la classe… employée – et parfois ouvrière», et les soutiers de la précarité – professions de la sécurité, du nettoyage, caissières et gros oeuvre du bâtiment ? Ce n’est pas ce site ni d’autres qui répondront à « la » question. Mais dans nos métiers, nous pouvons tenter des pistes au quotidien : dans la solidarité avec les familles qui luttent pour leur régularisation, pour un logement voire un hébergement, pour le droit à la santé – concrètement : un coup de fil à la Sécu, un accompagnement à la Préfecture, aider à remplir des formulaires, utiliser le scan de l’école  ; dans un attitude fraternelle et aidante par rapport à ce noeud de discorde que représente l’école, en informant les collègues, en donnant aux familles des trucs et astuces, en reconnaissant nos avantages pour avoir avec elles une relation moins inégalitaire.

N’est-ce pas reprendre, plus dans la solidarité que dans la lutte il est vrai, mais aussi plus dans le présent et moins dans un avenir rêvé, l’inspiration de nos prédécesseurs ?

Jean-Pierre Fournier