Didier Lapeyronnie, professeur en science politique et en sociologie a consacré l’essentiel de ses travaux aux « quartiers d’exil », des ghettos urbains où vivent majoritairement des immigrés et les personnes les plus pauvres. Très actif, il a été chargé de recherche au CNRS, professeur à l’Université de Bordeaux puis à la Sorbonne.
J’ai connu Didier Lapeyronnie au Conseil national de l’innovation pour la réussite éducative (CNIRÉ) dont il fut le président. Je faisais partie des quarante membres représentants (institutionnels associatifs, économiques ainsi que des experts) et j’y représentais le CAPE (Collectif des associations partenaires de l’Ecole). Le premier rapport (2013-2014) avait cinq parties : l’innovation comme problème – principes et orientations de l’innovation – la fabrique de l’engagement : une école bienveillante – la fabrique de l’ouverture : une école accueillante – la fabrique de la compétence : une école performante. Voici le lien : https://www.education.gouv.fr/pour-une-ecole-innovante-synthese-des-travaux-du-conseil-national-de-l-innovation-pour-la-reussite-5861
Ce que j’écrivais le 25 octobre 2014 :
Le 13 avril 2013 était installé le Conseil national de l’innovation pour la réussite éducative (CNIRE) par Vincent Peillon et George Pau-Langevin.
Un président, Didier Lapeyronnie, professeur de sociologie et trente-neuf acteurs de l’éducation sont nommés.
Trois groupes se mettent au travail :
« Fabriquer des compétences » : formation initiale, continue des enseignants et de tous les personnels, évaluation/valorisation…
« Fabriquer de l’ouverture » : partenariats-école/famille, urbains, institutionnels… démarche collective et coopérative, ouverture à l’intérieur (établissement, école…)
« Fabriquer de l’engagement » (de tous les acteurs de l’éducation) : pédagogie/classe, innovations pédagogiques, institutionnelles dans et hors la classe…
Le 13 juin 2014, le CNIRE finalise son rapport d’étape pour le remettre au ministre de l’Éducation nationale qui n’est plus Vincent Peillon, mais Benoît Hamon qui laissera sa place quelques semaines plus tard à Najat Vallaud-Belkacem.
Plus d’un an de travaux, de rencontres pour ce premier rapport qui présente des propositions concrètes pour changer l’École.
Depuis, c’est le silence. Le rapport a-t-il été remis ? a-t-il été lu ?
Le 16 octobre 2014, le CNIRE devait se réunir pour la suite des travaux, pas de nouvelles…
Et pourtant, le CNIRÉ devait être force de proposition sur les programmes scolaires avec un dialogue à tenir avec le Conseil Supérieur des Programmes (CSP), sur la formation, sur l’analyse partagée des conditions de la réussite, sur les temps de concertation des enseignants, etc.
Le ministère comptait sur le Conseil pour produire de la pensée, des pensées pour convaincre et surmonter les résistances au changement de culture, pour influer sur les manières d’être et de faire ensemble, pour transmettre.
« Institutionnaliser l’innovation, c’est la tuer », avait déclaré Didier Lapeyronnie lors de l’installation du Conseil.
Et qui a tué le Conseil national de l’innovation ? Serait-ce l’institution ?
L’enterrement n’a pas été annoncé laissant les membres du Conseil dans l’ignorance.
Le ministère préfère pleurer sur l’échec scolaire, les inégalités que de soutenir l’innovation pour la réussite éducative. Cette attitude montre bien l’indifférence, voire le mépris de l’institution pour les projets innovants et les expérimentations pédagogiques.
Nous attendons toujours le faire-part.
Catherine Chabrun, militante pédagogique et membre du CNIRE pour le Collectif des associations partenaires de l’école (CAPE)

Didier Lapeyronnie a quitté la présidence du CNIRE pour raison de santé. Depuis d’autres rapports ont eu lieu :
Le deuxième rapport : https://www.education.gouv.fr/pour-une-ecole-innovante-synthese-des-travaux-du-cnire-2014-2016-10598
Le troisième rapport : http://cache.media.education.gouv.fr/file/03_-_mars/97/0/Rapport_Cnire_2016_2017_743970.pdf

Didier Lapeyronnie est mort le 12 septembre 2020, à l’âge de 64 ans.
J’ai le souvenir d’un homme simple, hors démagogie qui valorisait les pratiques quotidiennes « innovantes » ou ancrées et qui souhaitait pour tous les enfants et les jeunes dans et hors l’école et sans aucune discrimination une éducation humaniste.
Son départ me rend triste.