Le dessinateur et scénariste Li Kunwu dont nous avions déjà chroniqué “Une vie chinoise” (1), raconte la construction au début du vingtième siècle d’un chemin de fer construit par les français entre Kunming, capitale du Yunnan (sud-ouest de la Chine) et la ville vietnamienne de Haïphong (H?i Phòng). Suite à la découverte fortuite d’un “Cimetière des étrangers” lié à la ligne ferroviaire, Li enquête sur l’histoire de cette ligne grâce aux photographies de Georges-Auguste Marbotte, comptable d’une société française sous-traitante du chantier et au récit de cette saga familiale par son petit-fils Pierre.
La BD bascule constamment entre notre époque, – les tentatives de Li Kunwu pour remonter cette “épopée” coloniale -, et la période de la construction de cette ligne dans ces régions tourmentées de montagnes où plus de 12000 ouvriers chinois et vietnamiens, – les coolies -, moururent. Li alterne aussi les scènes reprises des photos de Marbotte, – architecture ferroviaire, scènes de travail, forçats portants la cangue, mandarins et notables, vie quotidienne -, et les paysages du Yunnan magnifiés par sa plume précise et poétique. Les paysages en noir et blanc défilent sous le trait d’un dessin qui oscille entre tradition et modernité ; les photos peignent les rites sociaux des élites coloniales et chinoises ; la vie s’égraine tranquillement tandis que la mort est présente par petites touches presque anodines…
L’intérêt du livre est suscité par les allers-retours entre la Chine contemporaine qui se révèle indirectement à travers le récit, le témoignage étonnant et documenté de cet européen des colonies porteur d’une réelle empathie pour le pays ainsi que la sensibilité et la curiosité de Monsieur Li. (FS)
La voie ferrée au-dessus des nuages, Li Kunwu, Kana (Made in), 2013, 208 p., 15 €.
(Cahier photographique en fin d’ouvrage).
(1) N’autre école, n°25 L’évaluation], hiver 2010, p. 58.[http://fr.calameo.com/read/000062740500f53ea3e80
