Les auteurs sont membres de l’UJFP (Union Française Juive pour la Paix), organisation juive anti-sioniste qui s’oppose à la politique de l’État d’Israël. Ces militants sont allés à Gaza pour témoigner et mettre en place des actions de solidarité. Il résulte de la mise en ordre de leurs notes journalières un tableau étonnamment vivant et varié de la situation locale : bien sûr elle est vraiment terrible, et le poids de l’injustice est sensible sous tous les aspects de la vie quotidienne. Il est poignant de lire l’enfermement des Gazaouis, leur appauvrissement organisé (l’exemple de la pêche est particulièrement parlant), les suites non-cicatrisées de la guerre. Mais il est aussi profondément encourageant de constater la ténacité et l’inventivité des habitants, notamment pour ce qui est de la production agricole et de l’enseignement : les auteurs évoquent avec précision les activités d’un peuple qui ne vit pas prostré mais qui au contraire multiplie les initiatives. Ainsi, un échange sur les programmes de maths dans le supérieur (Pierre Stambul est enseignant de mathématiques) semble assez ahurissant au lecteur… et symptomatique des capacités de résistance face à une terrible adversité.
La surprise est aussi de constater la variété des options politiques et idéologiques, qui ne résument pas à l’affrontement OLP/Hamas/islamistes : les non-violents, les marxistes, les croyants tolérants voire les athées s’expriment (ce qui ne signifie pas qu’ils ont la vie facile). Et d’autre part la judéité affirmée des auteurs est bien vécue par leurs interlocuteurs. Un livre qui donne le grain de la réalité, qui fait réfléchir aussi sur un des lieux d’oppression le plus cité de notre planète, mais pas si bien connu que ça.
Sarah Katz, Pierre Stambul, Chroniques de Gaza : mai-juin 2016, Acratie, 2016, 92 p., 10 €.
Site des éditeurs : https://editionsacratie.com/
