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Le bonheur à l’école

Le bonheur à l’école Du 16 au 23 mars devait se dérouler « la semaine du bonheur à l’école », parenthèse de liberté et d’initiatives pédagogiques afin d’inventer collectivement l’école de nos rêves. Il en fut autrement et cette semaine restera dans nos mémoires comme la 1ère semaine de confinement à la maison. Paradoxalement, être privé.e.s d’école est peut-être l’occasion d’interroger le sens du bonheur à l’école. La recherche d’un nouveau paradigme À l’initiative du Bhoutan, seul État à reconnaître, depuis 1970, la primauté du bonheur national sur le revenu national, l’Organisation des Nations Unies célèbre, depuis 2013, la Journée internationale du bonheur dans le cadre d’initiatives éducatives le 20 mars. « Le bien-être social, économique et environnemental sont indissociables. Ensemble, ils définissent le bonheur brut mondial ». L’ONU estime que le monde a besoin d’un nouveau paradigme fondé sur ces trois piliers du développement durable. En France, le choix d’une semaine – plutôt que d’une journée – semble mieux adapté au temps scolaire. « Pendant cette semaine, les écoles, collèges ou lycées peuvent y participer en promouvant des dispositifs nouveaux (limités ou non dans le temps) ou en présentant des dispositifs pérennes existant1 ». Ceux-ci s’articulent autour de cinq axes choisis pour diffuser des éléments du bonheur : des pratiques démocratiques comme les débats, le développement personnel des élèves, l’aménagement en commun d’un environnement harmonieux et enfin le bien-être, tant de l’ensemble des personnels que des élèves. Sont alors privilégiés le bonheur d’apprendre et le bien-être dans la classe (instauration de nouveaux rituels autour de l’attention et de la motivation ; intégration des arts et des activités sportives ; essais pédagogiques dans les différentes disciplines).  Les conditions du bien-être à l’école On dispose de nombreux travaux et recherches sur le « climat scolaire ». Ces études permettent de « mesurer l’importance du ressenti des élèves à l’égard de certains faits et de son impact sur les résultats scolaires »2 Elles montrent que bien-être des élèves et bien-être professionnel des enseignant.es sont étroitement liés. De récentes enquêtes de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) permettent de repérer quelles sont les entraves au bien-être des élèves, notamment le sentiment d’injustice, les cyberviolences et les censures entre élèves (une violence symbolique exercée contre ceux et celles qui montrent leur motivation en classe). Le Plan Bien-être et Santé des élèves de 2017 reconnaît la valeur du bien-être pour tout.es. Écarter la souffrance des élèves suffit-il au bonheur ? Il faut prendre aussi en compte leurs besoins psychologiques et les aider à renforcer l’estime de soi. Entre alors en jeu la qualité de la relation pédagogique. « La bienveillance active 3» est une vertu reconnue par l’institution scolaire. Elle est « une mobilisation des ressources cognitives et conatives de l’enseignant pour interpeller l’élève, l’accompagner, le questionner sur le sens de ses choix, de ses difficultés et de son comportement, tout en restant attentif à son bien-être, sa réussite ». Se demander : « Comment puis-je agir au mieux avec lui ou elle ? » La pédagogie ne prétend pas être une science mais un art. Elle met en relation des sujets et exige du tact. Être capable d’adapter la règle à la singularité de l’élève, prendre en compte ses attentes demande du discernement, une sagesse pratique. Une conception technique du bonheur ? Le danger serait d’en rester à une conception purement technique du bonheur visant le bien-être de l’élève comme simple outil de sa réussite scolaire ou de sa performance. Le concept philosophique de bonheur ne saurait relever de la logique de la production ou du faire. Il ne peut pas devenir un moyen en vue d’une fin extérieure. Le bonheur est une action immanente, une transformation de soi par soi. Il est, en lui-même, une fin (Aristote). Sa logique relève de l’éthique et de la politique. « Les bancs de l’amitié », initiative encouragée par l’Association générale des enseignant.es des écoles et classes maternelles publiques (Ageem), s’inscrit dans cette perspective. « C’est un vrai projet artistique et pédagogique permettant d’aborder de manière concrète la notion de laïcité, du vivre-ensemble dans le respect de la différence de l’autre ». Faire du bonheur la finalité de l’éducation, voilà l’enjeu éthique et politique de l’école. 1 François Durpaire (dir), Histoire mondiale du bonheur (Cherche-midi, 2020) 2 Christophe Marsollier, Investir la relation pédagogique (Chronique sociale, 2012) ; L’Éthique relationnelle : une boussole pour l’enseignant (Réseau Canopé, 2016) 3 A. Jellab et C. Marsollier, Bienveillance et bien-être à l’école. Plaidoyer pour une éducation humaine et exigeante (Levrault-Berger, 2018) Dominique Costantini, Professeur de Philosophie, Sud éduc 13

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