Rubrique Culture : une sexualité d’un autre genre… L’expo le Zizi sexuel
L’exposition « Zizi sexuel enfin le retour ! » de Zep et Hélène Bruller participe de cet art militant celui qui nous éclaire et provoque la controverse. Comme a pu le faire, malgré lui, Paul Mc Carthy, lors de la destruction de son œuvre « Tree » installée sur la place Vendôme en avant-première de la FIAC d’octobre 2014.
L’expo « Zizi sexuel », en 2014 comme en 2007, soulève la polémique et subit attaques et tentatives de suppression, par intervention, pétition, voie de presse et toutes sortes de calomnies.
Présentée une première fois à la Cité des sciences de Paris en 2007, l’exposition remporte un franc succès : 340 000 visiteurs. Suit alors une tournée européenne tout aussi fameuse et ce même dans les pays les plus conservateurs. Elle se révèle
d’une remarquable pédagogie et ouvre pour tous (excepté les plus petits) un itinéraire serein pour aborder la sexualité avec les pré-ados.
Elle mériterait sa place dans le corpus des expositions permanentes de la Cité.
L’exposition bénéfice d’un outil bien conçu : le site [1] qui l’accompagne pour préparer la visite, autant pour les familles (itinéraire) que pour les enseignants (dossiers), adapté à la demande formulée par les textes officiels d’éducation à la sexualité en milieu scolaire. Sa conception s’inspire totalement de l’album éponyme Le Guide du zizi sexuel (Glénat 2001) et bien connu des jeunes.
Elle aborde de façon simple, scientifique et exigeante les questions que se posent les 9-14 ans sur l’amour et la sexualité, accompagnés par les personnages de ZEP dont le célèbre Titeuf et sa copine de classe Nadia.
Son élaboration a suivi un processus rigoureux et scientifique testé ensuite par des enfants et des classes, son itinéraire interactif est une des clefs de sa réussite et capte l’attention du jeune public – et des adultes – grâce aux nombreuses manipulations et questions, le spectateur devient alors « acteur » d’un parcours thématique en 5 étapes, « Être amoureux », « La puberté », « Faire l’amour », « Faire un bébé », « La rue ». Tout au long de l’exposition, les pré-ados doivent agir, réfléchir, répondre aux questions, pour terminer par l’atelier scientifique, « Les transformations du corps » (qui lui a l’inconvénient de nécessiter une réservation préalable).
À remarquer le film préventif réalisé pour expliquer les dangers de la pédophilie, des réseaux sociaux ou de l’inceste, qui dénonce de façon simple et efficace [2]. Un film à conseiller, un soulagement visible pour les parents : trouver un relais, une réponse au « comment le dire ? ».
À la sortie, la boutique offre une large sélection d’ouvrages, pour les jeunes, riches aussi pour les adultes. Pour exemple Qu’est-ce qu’il m’arrive ? (pour les filles) et Comment se raser ? (pour les garçons) par Susan Mérédith (Usborne) ou Filles et garçons, la parité (C. Louart et P. Paicheler, Actes Sud junior « à très petit pas »), sans oublier les adultes Antimanuel d’éducation sexuelle (M. Iacub et P. Maniglier, Bréal) dont la jaquette présente les enjeux : « Nos problèmes sexuels sont bien des problèmes politiques, qui concernent la manière dont une société institue des valeurs, impose certains comportements et même certaines manières de sentir et de penser. Au terme de ce livre une suggestion : Nous avons voulu libérer le sexe, mais c’est peut-être du sexe que nous aurions dû nous libérer. Devenez postsexuel : tel est l’énigmatique proposition de ce livre… »
Reste l’incompréhension face aux polémiques soulevées, tabous et/ou obscurantisme ? Quand allons-nous admettre que nous sommes des êtres pensants mais aussi sexués et qu’il ne sert à rien de se voiler la face ? L’époque accumule malheureusement ce type de manquements, ce qui nous ramène vers une mémoire récente : l’abandon des « ABCD de l’égalité » à l’école [3] après une virulente opposition comme les JRE qui conduisit le ministère à déposer les armes.
L’égalité, le respect de l’autre et de soi-même, le droit de dire non et d’être entendu (bien démontré à l’expo) s’acquiert dès le plus jeune âge. Les deux petits livres La Déclaration des droits des filles et La Déclaration des droits des garçons (E. Brami et E. Billon-Spagnol, Talents hauts) sont la meilleure des initiations pour les plus petits. Comme l’incontournable Melle Zazie a-t-elle un zizi ? (T. Lenin et D. Durand, Nathan).
En observant le jeune public déambuler tout au long de l’itinéraire, force était de constater que le conditionnement des genres reste bel et bien présent, les filles mal à l’aise et timides refusaient pour certaines de s’y pencher, les garçons étaient plus ouverts et attentifs, curieux de comprendre et de s’approprier les connaissances mises à disposition. Du chemin encore à parcourir…
« … sexuellement, c’est-à-dire avec mon âme… »
Boris Vian, L’Herbe rouge.
« Zizi sexuel (enfin) le retour ! » de Zep et Hélène Bruller, du 14 octobre 2014 au 2 août 2015 à la Cité des sciences, 30, avenue Corentin-Cariou, 75019 Paris, métro Porte de la Villette.
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