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Un rapport à lire

UN RAPPORT A LIRE

Une fois n’est pas coutume, un rapport officiel met les pieds dans le plat et n’hésite pas à franchir deux « lignes blanches » : celle des revendications, et celle de l’implication sociale de la pédagogie.

Le rapport de J.P. Delahaye n’a pas fait la Une, la presse étant embarquée dans les polémiques concernant la réforme du collège. Et son sujet « l’école et la grande pauvreté » passionne visiblement beaucoup moins que le sort du grec, du latin et des classes bilangues, sans parler des menaces supposées sur l’histoire nationale.
Le rapport dénonce le manque d’infirmières et de médecins dans les établissements scolaires : un médecin pour 9 000 élèves, le chiffre résume bien la situation. Faut-il, puisque nous sommes au royaume de l’argent, améliorer les salaires des médecins scolaires (une partie des postes prévus ne sont pas pourvus faute de candidats) ? Il est indispensable en tout cas, et faisable sans tergiversation, de faire que chaque collège en éducation prioritaire ait une infirmière à plein temps, avec prévision des remplacements.
Même chose pour les assistants sociaux : en dehors de Paris, ils n’existent pas dans le premier degré. Et les Parisiens savent à quel point celles de la capitale sont débordées, même quand la Réussite éducative prend en charge une partie des situations. Donc, quand il n’y a rien…
Les Rased sont également cités : si la purge sarkozienne a cessé, on reste dans la pénurie. Il faut conforter les Rased, dit le rapport. Traduisons : recruter.

Si l’on se tourne du côté des financements, la situation des bourses scolaires est bien analysée: on s’y penche sur les cas fréquents des non-recours (les familles qui ont droit à une bourse mais qui ne la demandent pas). Leur nombre est difficilement chiffrable, mais on sait (1) qu’une moitié de ceux qui auraient droit au RSA ne le demandent pas ; pour les bourses, rédigées de façon peu compréhensible, distribuées sans véritable suivi, ça ne doit pas être tellement mieux. Et le montant des bourses (moins de 2 € par jour dans le meilleur des cas) reste trop juste.
Les fonds sociaux sont un autre sujet de préoccupation : le rapport parle à leur sujet de « l’incompréhensible effondrement des crédits » qui leur sont destinés, tableau chiffré à l’appui.

Des infirmières, des médecins, des assistants sociaux dans le premier degré, des enseignants spécialisés ; des bourses revalorisées et plus largement distribuées, des fonds sociaux ré-abondés : voilà pour les revendications.

La pédagogie : explicite, pour que les sous-entendus culturels et cognitifs ne fassent pas barrage à la compréhension des élèves les plus pauvres ; coopérative dans son fonctionnement (l’école Freinet de Mons-en-Baroeul est une nouvel fois citée). Et préparée dès la formation initiale : les Espé sont aujourd’hui peu préoccupées du social, nous dit le rapport. Même chose pour la formation continue.

Bien d’autres choses dans ce rapport, notamment un moyen intéressant de contrainte vis-à-vis du privé, dont on sait bien que c’est aujourd’hui plus le refuge des riches et de tous ceux qui ont peur des pauvres (même quand ils le sont) que celui des cathos !

Et toutes ces informations, toutes ces pistes pour demander, soutenir n’empêcheront plus d’un lecteur d’avoir des remarques critiques (par exemple : pourquoi les plus pauvres et non les classes populaires dans leur ensemble ?). Mais surtout : qui portera ces revendications ?

Laissons cependant le pessimisme aux déclinistes. Et faisons connaître ce document (2), qui pose de vraies questions.

(1) En finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté, édition 2015, 5€ ;
(2) Rapport_IGEN-mai2015-grande_pauvrete_reussite_scolaire_421527, bientôt « doublé » par celui de M.A. Grad d’ATD Quart Monde au CESE, sommaire déjà consultable.

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