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Neurosciences vs éducation ?

Organisée par l’Association pour la psychanalyse (APLP) et son président Gérard Pommier, avec le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire et quelques personnalités, une réunion a rassemblé près de 150 personnes le 24 mars à Paris dans le cadre du Printemps citoyen 2018 et de la 6e édition de la « Nuit des débats »*. Son objectif : développer la protestation, déjà lancée par une pétition, contre la présence hégémonique de neuroscientifiques dans le Conseil scientifique de l’Education nationale, créé début 2018 par le ministre Blanquer et présidé par le très médiatique spécialiste de psychologie cognitive Stanislas Dehaene (dont l’APLP demande le remplacement).

Sous le titre « Des “neuroscientifiques” à l’Educ. Nationale : révolution ou coup de force? », l’appel des organisateurs précisait : « Certains neuroscientifiques considèrent que les apprentissages scolaires dépendraient de facteurs génétiques ou neurodéveloppementaux. Il n’en existe pas de preuves certaines. Au contraire les facteurs socioéconomiques et familiaux tiennent la plus grande place dans le succès ou l’échec à l’école.
Ce débat prend tout son relief avec le diagnostic de TDA/H qui est déjà préconisé dans certaines écoles. Les enfants qui ont des difficultés d’apprentissage sont considérés comme des handicapés neurodéveloppementaux, alors qu’ils n’ont le plus souvent que des problèmes sociaux et familiaux.
Un conseil scientifique de l’Education nationale devrait comporter en priorité des associations de parents d’élèves, d’enseignants, des spécialistes de la souffrance psychique de l’enfance et des sociologues.
»

Les interventions et le débat qui a suivi ont permis d’aborder de nombreux problèmes liés à ces questions, en particulier : la volonté de ministres de l’Education nationale, De Robien puis Blanquer, d’imposer des normes pédagogiques (méthode syllabique, etc.) au nom des neurosciences ; la nouvelle formation des enseignant-e-s spécialisé-e-s, qui exclut les aspects relationnels et forme essentiellement au diagnostic, réduisant l’enfant à son trouble (et la solution à la Ritaline ?…) ; la place prééminente accordée aux techniques au détriment de la prise en compte des conditions sociales ou familiales ; le développement d’un « appareillage de classification des enfants » qui n’est pas nouveau (cf. Bourdieu) mais dans lequel désormais les neurosciences prennent toute la place ; l’impact sur le grand public d’interprétations des neurosciences appelées à servir de caution à des théories de l’apprentissage infondées et à la délégitimation de l’école publique qui serait aux mains des « pédagogistes ».

Un consensus s’est fait autour de deux points : le fait que le problème est politique et non épistémologique (ce n’est pas la validité scientifique des neurosciences qui est en cause mais leur rôle), et le réductionnisme que représente l’usage actuel des neurosciences, excluant les autres approches (sociologie, pédagogie, psychologie, psychanalyse…). La création d’un collectif a été envisagée.

* : à l’invitation de Gérard Pommier, j’ai participé à cette soirée pour Q2C.

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